Cabinets fermés le 5 février, grève du zèle, fronde tarifaire

Face à la contestation, Touraine obligée de revoir sa copie

Publié le 19/01/2015
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Crédit photo : SEBASTIEN TOUBON

Rien n’y fait. Marisol Touraine reste confrontée, semaine après semaine, à un corps médical très remonté contre son projet de loi de santé, et qui réclame une réécriture du texte en profondeur.

Certes, la profession a provisoirement mis en sourdine ses critiques dans la foulée des attentats terroristes meurtriers qui ont sidéré le pays. Dans un climat d’unité nationale, les leaders syndicaux ont fait preuve de retenue, les chirurgiens ont suspendu leur mouvement. Quant à la guérilla administrative, elle s’est traduite, selon les premiers chiffres de la CNAM, par une baisse de la télétransmission « réelle mais modérée » (-12% de FSE sur neuf jours). « Paradoxalement, l’actualité dramatique du pays a donné un peu d’oxygène à Touraine mais sur le fond rien n’est réglé », décrypte un responsable socialiste joint par « le Quotidien ».

Risque de chienlit

De fait, la parenthèse a été de courte durée. Tous les syndicats ont promis un durcissement de leurs actions. MG France, à l’issue de son comité directeur, a annoncé une nouvelle journée de fermeture des cabinets le 5 février et appelle, comme la FMF avant lui, à la grève des gardes. « Ce mouvement s’impose par son ampleur et par sa durée comme l’un des événements majeurs dans le paysage médical depuis de nombreuses années », prévient le syndicat de généralistes. La CSMF détaillera de nouvelles actions dès demain. À l’issue de son AG extraordinaire, SOSMédecins affiche sa « détermination totale » face à l’« autisme » de la ministre de la santé.

Autre menace : la zizanie tarifaire. Alors que l’UNOF (branche généraliste de la CSMF) réclame désormais un C à 31 euros sans forfaits ni ROSP (lire ci-dessous), des généralistes exaspérés commencent à facturer unilatéralement la consultation à 25 euros et la visite à 56 euros.

Pas en reste, l’Ordre des médecins, à l’occasion de vœux très politiques, a pressé Marisol Touraine de revoir immédiatement sa copie qui conduit à une médecine « administrée ».

Gérard Bapt (PS) : « l’ARS à toutes les lignes... »

Le ministère de la Santé prend la mesure du climat dégradé. Divers groupes de travail sur la loi de santé ont été programmés (sans compter ceux sur la médecine générale et l’hospitalisation). Les syndicats ont réclamé leur copilotage par un médecin, ou une personnalité reconnue par la médecine libérale. « Ça bouge sur la méthode, on s’achemine vers une vraie concertation », note le Dr Jean-Paul Ortiz, président de la CSMF.

D’ores et déjà, il est acquis que certains chapitres sensibles du projet de loi seront revus avant même le débat parlementaire. C’est le cas du service territorial de santé au public (STSP) avec une place renforcée des praticiens libéraux dans les lieux territoriaux de décision. « Les médecins ont eu la mauvaise surprise de trouver l’ARS à toutes les lignes, soupire Gérard Bapt, député PS de Haute-Garonne. Il est acté que cet article sera réécrit. » De même, le ministère devrait lâcher du lest sur le partage des compétences. « Touraine va revoir la question de la vaccination par les pharmaciens qui n’apporte pas grand chose », certifie un visiteur de la ministre.

Reste l’épouvantail du tiers payant généralisé. « Il ne s’agit pas de discuter des modalités techniques », avertit le Dr Ortiz. La question du caractère obligatoire de la dispense d’avance de frais est posée.

Dans la majorité, on fait savoir aussi que l’examen du texte à l’Assemblée et au Sénat fera encore bouger les lignes. « N’oubliez pas le Parlement ! », a lancé il y a quelques jours le Dr Olivier Véran, député et rapporteur PS du premier titre du projet de loi, lors d’un débat tonique sur la loi de santé.

Cyrille Dupuis et Anne Bayle-Iniguez

Source : Le Quotidien du Médecin: 9379
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