C à 31 euros, pied-de-nez ou revendication sérieuse ?

Publié le 19/01/2015
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En réclamant à Marisol Touraine le « C à 31 euros » immédiatement, avec abandon de tous les forfaits actuels et primes sur objectifs de santé publique (ROSP), le Dr Luc Duquesnel, patron de l’UNOF (CSMF), peut se vanter d’avoir fait le buzz.

Pour le syndicat, il s’agissait de prendre Marisol Touraine à son propre piège. À plusieurs reprises en effet, pour justifier son refus de la hausse du C, la ministre de la Santé a additionné la valeur actuelle de l’acte (23 euros), les majorations forfaitaires existantes et la ROSP pour expliquer que la rémunération globale atteint en réalité 31 euros en moyenne par consultation de médecine générale. « Chiche », lui a donc répondu en substance le patron de l’UNOF.

Provocation ou revendication sérieuse ? Le pied-de-nez de l’UNOF a en tout cas rouvert le débat sur la valeur de l’acte de médecine générale, notoirement insuffisant. En creux, la demande du C à 31 euros pose aussi la question de la stratégie des syndicats qui ont accepté ces dernières années de négocier des forfaits et des bonus à la performance, faute d’ouverture sur la valeur du C dans un contexte économique contraint.

À la CSMF, « maison mère » de l’UNOF, le président Jean-Paul Ortiz assure qu’il ne faut pas voir dans l’offensive de sa remuante branche généraliste un rejet de la rémunération sur objectifs (au cœur de la dernière convention médicale) ou un revirement. « Luc Duquesnel a voulu prendre la ministre au mot, il voulait contester à la fois son chiffre et sa méthode ». Même en additionnant « des choses qui n’ont rien à voir avec le C », comme les forfaits ALD ou médecin traitant, ou encore la prime d’informatisation du cabinet, on n’arrive pas à 31 euros, souligne le Dr Ortiz.

Salutaire initiative

Le patron de la FMF, le Dr Jean-Paul Hamon, qualifie pour sa part de « salutaire provocation » la requête de l’UNOF face au blocage ministériel sur le C. Le leader syndical estime qu’« on est loin des 31 euros par consultation, puisqu’on arrive péniblement à 26 ou 27 euros pour les cabinets les mieux organisés ». Avec un C « à 31 ou 32 euros », le Dr Hamon serait prêt à assumer « gratuitement la coordination et la continuité des soins et même une FMC indépendante des laboratoires ».

Au Syndicat des médecins libéraux (SML), le nouveau président Éric Henry, généraliste en secteur I, applaudit d’autant plus qu’il a fait la même proposition tarifaire à Marisol Touraine. « Nous ne mettons pas en doute le calcul de la ministre et lui disons "chiche" sur la consultation à 31 euros, déclare-t-il. Si elle refuse, nous saurons à quoi nous en tenir ».

Note discordante, le Dr Claude Leicher, président de MG France, estime que l’addition de chiffres faussés (et qui n’ont rien à voir entre eux) est un « jeu dangereux ». Le syndicat de généralistes, défenseur du forfait médecin traitant généralisé et de la diversification de la rémunération, a pris la tête du combat pour la consultation à « 25 euros pour tout le monde », allusion à la majoration de deux euros (MPC) dont sont actuellement exclus les seuls spécialistes de médecine générale. Le syndicat expliquera mercredi qu’il est solidaire des généralistes qui ont commencé à prendre d’autorité le C à 25 euros et la visite à 56 euros pour manifester leur exaspération. Une autre façon d’accompagner la contestation tarifaire...

Henri de Saint Roman

Source : Le Quotidien du Médecin: 9379