UNE ÉTUDE récente menée en Angleterre, au Pays de Galles et en Irlande du Nord (1) montre que chez les enfants de femmes diabétiques de types 1 et 2, la mortalité périnatale et les anomalies congénitales sont significativement plus élevées que dans la population témoin.
Une femme diabétique doit donc avoir une contraception très efficace pour limiter les risques de grossesse non programmée et hors de contrôle.
Chez une jeune femme atteinte de diabète de type 1 ?
Selon le consensus 2010 de la Société Française d’Endocrinologie (SFE), une contraception hormonale en cas de diabète de type 1 chez une chez une femme nullipare ou multipare ne peut être envisagée sans prendre en compte les facteurs de risque (dyslipidémie, HTA, tabagisme, ancienneté du diabète) et les complications (néphropathie, rétinopathie proliférante ou œdémateuse ou ischémique, pathologie cardio-vasculaire, neuropathie). En l’absence de facteur de risque et de complication, la contraception de première intention peut être une contraception estroprogestative. En revanche la présence d’un seul facteur de risque ou d’une seule complication la contre-indique formellement et oriente le choix vers une contraception progestative ou vers un dispositif intra-utérin.
Outre la recherche de facteurs de risque et de complications, deux autres données doivent être prises en compte : les antécédents personnels ou familiaux de phlébite ou d’embolie pulmonaire et la présence de migraines avec aura qui sont également des contre-indications aux estroprogestatifs.
En effet, la contraception orale œstroprogestative est associée à des anomalies de l’hémostase, le risque de thrombose veineuse est globalement multiplié par 4 et varie avec la dose d’éthinyl-estradiol ; le risque est le plus élevé avec une dose › 30 µg.
À l’heure actuelle presque toutes les pilules estroprogestatives contenant moins de 30 µg d’éthinyl-estradiol, le choix se fera en fonction du type progestatif associé. « La Haute Autorité de santé recommande de choisir des progestatifs de deuxième génération (le risque veineux étant plus élevé avec les progestatifs de troisième et quatrième générations) », a rappelé le Dr Véronique Kerlan (Brest).
Une autre question se pose également avant de choisir le mode de contraception : la patiente est-elle capable de prendre quotidiennement des comprimés ?
Il existe depuis 2004 de nouvelles méthodes non orales, tels l’anneau contraceptif à mettre en place pendant 3 semaines et les patchs (un par semaine pendant 3 semaines), mais leurs contre-indications sont les mêmes que celles des estroprogestatifs oraux.
On peut alors proposer, soit un implant d’étogenostrel 68 mg pour 3 ans, soit une injection d’acétate de médroxyprogestérone 150 mg pour 3 mois, ou encore, un dispositif intra-utérin au lévonorgestrel chez une multipare ou un stérilet au cuivre chez une femme nullipare.
Chez les diabétiques de type 2 ?
Selon le consensus 2010 de la SFE, les progestatifs et le dispositif intra-utérin sont indiqués en première intention chez la diabétique de type 2 nullipare ou multipare. « Néanmoins, les estroprogestatifs peuvent être prescrits sous certaines conditions : en l’absence de facteurs de risque cardio-vasculaire et de complications micro- et macroagiopathiques et si l’indice de masse corporelle est < 30 », précise le Dr Sophie Christin-Maitre (Paris). La contraception oestro-progestative n’entraîne pas de modifications significatives du métabolisme glucidique chez la femme diabétique, mais elle peut révéler ou aggraver une hyperlipidémie, en particulier une hypertriglycéridémie, le retentissement lipidique dépend de la combinaison estro-progestative (molécules et doses).
En pratique, la contraception estro-progestative se discute en l’absence de facteurs de risque (tabagisme +++) et lorsque le LDL cholestérol est < 2,20 g/l. sous réserve d’une surveillance régulière du bilan lipidique. En revanche, elle est formellement contre-indiquée chez les femmes ayant un LDL › 2,20 g/l ou des triglycérides ›2 g/l.
Les micro- et macroprogestatifs pourront être proposés, toujours en fonction du contexte, sous surveillance de l’équilibre glycémique, de la pression artérielle et du poids.
Au total, chez les diabétiques de type 2, le choix du contraceptif doit privilégier les méthodes locales, en tenant compte des facteurs de risque et de la présence d’une micro- et/ou d’une macroangiopathie ; et, surtout, il doit être personnalisé.
D’après les communications de Véronique Kerlan (Brest), Sophie Christin-Maitre (Paris), lors de l’atelier 2 « Contraception et diabète ».
(1) Macintosh M et al. BMJ 2006;333:177.
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