Depuis ces 20 dernières années, on assiste à une augmentation de la prévalence des infections sexuellement transmissibles (IST), à la fois grâce à un meilleur dépistage, mais surtout en raison du relâchement quant aux mesures de prévention. Les infections à gonocoques ne font pas exception.
Neisseria (N.) gonorrhae est une bactérie diplocoque Gram négatif, germe fragile et parfois difficile à mettre en évidence. Le réservoir est uniquement humain, la transmission quasi exclusivement sexuelle. L’absence de déclaration de rapports à risque ne doit pas écarter la présomption diagnostique.
La manifestation principale est l’urétrite gonococcique, le plus souvent symptomatique chez l’homme avec un écoulement purulent et une dysurie douloureuse. Chez la femme, l’atteinte génito-urinaire est asymptomatique dans 50 % des cas, exposant au risque de portage chronique. Les formes disséminées (pharyngées, oculaires, cutanées et articulaires) sont beaucoup plus rares. Des cas exceptionnels de septicémie et d’atteinte méningée ont aussi été rapportés.
L’adulte jeune davantage concerné
Au cours d’une infection à gonocoque, l’atteinte septique rhumatologique est estimée entre 0,5 et 3 % des cas, tandis que les arthrites septiques à gonocoque représentent 1,6 % des arthrites septiques documentées en France. Cependant, il s’agit d’un des germes les plus fréquemment trouvés dans les arthrites septiques de l’adulte jeune.
L’atteinte est classiquement monoarticulaire, et associe fréquemment arthrite + ténosynovite, parfois migratrice. La peau en regard est volontiers inflammatoire, érythémateuse et chaude. Une atteinte oligo ou polyarticulaire reste possible. Des pustules sont parfois présentes en regard des articulations atteintes : c’est l’un des syndromes arthrocutanés à connaître.
Les articulations les plus fréquemment touchées sont les genoux, coudes, poignets et chevilles. Des atteintes de hanche et sternoclaviculaire ont été rapportées chez des patients VIH. L’atteinte rachidienne est exceptionnelle.
Concernant les arthrites réactionnelles à gonocoque, la littérature est assez pauvre. Plusieurs cas ont été décrits, le principal écueil étant l’absence d’information quant à une co-infection par chlamydia, dont on sait qu’elle est fréquente.
En termes de bilan, la ponction articulaire doit être réalisée, avec ensemencement sur flacon d’hémoculture. Il faut prévenir le laboratoire de la recherche spécifique du gonocoque et prolonger les cultures jusqu’à 7 jours. Une PCR peut être réalisée sur le liquide articulaire, surtout si la culture reste stérile. La sensibilité et la spécificité de cette technique sont peu étudiées, mais une étude récente suggère une meilleure sensibilité de la PCR vs culture.
Le bilan doit impérativement comporter un dépistage des IST chez le patient ET son/ses partenaires (sérologies VIH, VHB, VHC. TPHA-VDRL ; PCR gonocoque et chlamydia sur 1er jet d’urine, pharyngé et rectal +/- vaginal).
Résistances aux C3G, un warning écarté
Le traitement des arthrites septiques à gonocoque est la ceftriaxone, 1 g/24 heures en IV ou IM pendant 7 jours. L’évolution est favorable sous traitement médicamenteux seul. La surveillance est clinique et biologique. Si une augmentation des résistances aux C3G a pu être crainte à un moment donné, les résistances à la ceftriaxone sont en fait exceptionnelles. En revanche, les résistances à l’azithromycine (7 %) et aux fluoroquinolones (45 % !) sont fréquentes. En cas d’allergie à la ceftriaxone, la spectinomycine, voisine des aminosides, injectable par voie IM est une alternative possible.
Le traitement doit systématiquement être associé à celui de C. Trachomatis par azithromycine 1 g en dose unique, ou doxycycline 100 mg x 2/j pendant 7 jours. Le(s) partenaire(s) doivent aussi être traité(e)s.
À l’heure actuelle, il n’existe pas de traitement post-exposition, ni de vaccin préventif. Malgré des résultats intermédiaires encourageants, l’essai Doxyvac n’a finalement pas démontré l’efficacité préventive du vaccin contre le méningocoque B sur le risque de survenue d’infections à gonocoques. Seule l’utilisation systématique et correcte du préservatif est efficace.
Arthrite aiguë, le pari d’une prise en charge en 48 heures
Assurer une prise en charge rapide pour toute suspicion d’arthrite aiguë évoluant depuis moins d’un mois, quelle que soit sa localisation. Tel est le pari réussi du centre de l’arthrite aiguë de Bichat (Caab) qui a ouvert ses portes fin 2023. Première structure de ce type en France, le Caab a déjà pris en charge près de 1 400 patients.
En pratique, dès qu’une demande est transmise par un médecin libéral ou hospitalier, l’infirmière du service propose un rendez-vous au patient sous 48 heures. Le jour J, il bénéficie d’une évaluation globale (constantes, examen clinique, prise de sang, échographie articulaire, ponction articulaire, analyse des microcristaux au microscope), associée si besoin à un avis extra-rhumatologique.
(1) Mamane W et al. Chirurgie de la main 2010;29:335-7
(2) Rosenthal L et al. Ann Rheum Dis 1980;39:141-6
(3) Pascual S et al. J Bone Jt Infect 2024;9:87-97
(4) Couderc M et al. Joint Bone Spine 2020;87:538-47
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