Les pathologies cardiovasculaires et métaboliques sont certainement celles dont le lien avec l’obésité est le mieux connu.
Mais, curieusement, si les obèses sont davantage sujets aux maladies cardio-vasculaires, une fois coronariens ou insuffisants cardiaques, ils s’en sortent mieux, du moins pour les obésités modérées. « Ce "paradoxe de l’obésité" est publié par de nombreux auteurs qui commencent à avancer des explications », indique le Dr Yves Cottin (Dijon).
Première hypothèse : comme le diagnostic d’insuffisance cardiaque (IC) chez l’obèse est connu pour être difficile, « il y a probablement une surcotation dans cette population », avance le spécialiste. D’où un diagnostic à un stade plus précoce. « En les rediagnostiquant plus précocement et en les surveillant mieux, on les traite mieux et ils vont mieux », résume le Dr Cottin.
Par ailleurs, une étude toute récente montre que la physiologie de l’obésité permettrait de limiter l’extension des lésions après un événement aigu.
Une réserve métabolique plus importante
Enfin, les personnes obèses auraient une réserve métabolique plus importante qui leur confère un meilleur pronostic. L’épidémiologie accrédite cette hypothèse : la mortalité en fonction de l’IMC décrit une courbe en J, avec une mortalité qui augmente lorsque l’IMC est inférieur à 20 ou supérieur à 30. Le paradoxe de l’obésité est flagrant lorsqu’on observe la survie de patients en surpoids ou obèses par rapport aux sujets maigres (IMC < 18), lorsqu’ils sont insuffisants cardiaques, coronariens ou en fibrillation auriculaire. Dans ces affections, la maigreur résulte de la gravité de ces maladies et du syndrome inflammatoire ou de la malnutrition intercurrente. À l’inverse, les obèses sont avantagés par leur réserve métabolique qui leur permet de mieux s’adapter à leur pathologie cardiaque. Il faut néanmoins se méfier car certains obèses souffrent de cachexie, c’est-à-dire d’un déficit de masse maigre ou « myopathie de l’obésité ». « Ils auraient aussi des cytokines protectrices », ajoute le cardiologue.
Reste que, selon l’analyse de Framingham, l’IMC est un facteur de risque indépendant d’insuffisance cardiaque, de coronaropathies et d’accident vasculaire cérébral. Les conditions hémodynamiques liées à l’obésité favorisent les remaniements myocardiques et vasculaires : épaississement du ventricule gauche, accroissement de la masse myocardique, augmentation du risque de fibrillation auriculaire et d’hypertension artérielle.
Les données du registre Américain Crusade montrent par ailleurs que non seulement l'obésité est associée à un sur-risque d'infarctus du myocarde, mais celui-ci survient beaucoup plus tôt. Sur une série de 111 847 patients ayant souffert d’un infarctus du myocarde, l'âge moyen est de 75 ans pour les patients de poids normal et de 58 ans chez les obèses. Survenant plus tôt chez l’obèse, la survie en post-IdM est logiquement meilleure puisque le facteur âge pèse lourdement dans le pronostic. Mais « si on ajuste à l’âge, le pronostic est équivalent à celui de la population générale », note le Dr Cottin.
Quant à l'intérêt de la perte de poids sur le pronostic, la notion d’un meilleur pronostic en cas de pathologie avérée a jeté un doute sur l’effet vertueux de la perte de poids. D’autant que contrairement à ce qui était attendu, le taux de BNP qui reflète l’état cardiaque a tendance à augmenter avec le régime ! Malgré tout la perte de poids reste un objectif important de la prise en charge comme le rappelle le Dr Cottin.
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