Actualités des antiarythmiques

La mise sur le marché de la dronédarone

Publié le 11/02/2011
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Crédit photo : S Toubon

DANS LE DOMAINE de la rythmologie, les années 2010 et 2011 ont été marquées par la publication de nouvelles recommandations en Europe, aux États-Unis et au Canada. Sur le plan thérapeutique, l’événement marquant de l’année 2010 a été l’avis de la commission de transparence relatif à la dronédarone (Multaq), publié le 2 juin, qui a fait suite à l’autorisation de mise sur le marché délivrée en 2009.

Selon cet avis, « Multaq est indiqué chez les patients adultes cliniquement stables présentant un antécédent de fibrillation auriculaire (FA) ou actuellement en FA non permanente, afin de prévenir les récidives de FA ou de ralentir la fréquence cardiaque. »*

Ce traitement est administré à la posologie de 400 mg deux fois par jour. La dronédarone, comme l’amiodarone et d’autres molécules encore, appartient à la classe des benzofuranes. Néanmoins, elle est très différente cliniquement de l’amiodarone.

La seule contre-indication à la dronédarone est l’insuffisance cardiaque. Elle concerne les patients « présentant des conditions hémodynamiques instables incluant les patients avec des symptômes d’insuffisance cardiaque au repos ou lors d’un effort minime, correspondant aux patients de classe IV NYHA et de classe III NYHA instables ». Cette caractéristique constitue, pour le Pr Jean-Marc Davy, la force principale de cette molécule.

Dans les études EURIDIS et ADONIS, la première européenne et la seconde extra-européenne, ont été inclus des patients des deux sexes, âgés d’au moins 21 ans, qui avaient fait au moins un épisode de FA dans les trois mois précédents et qui étaient en rythme sinusal depuis au moins une heure avant la randomisation, à la suite d’une conversion spontanée, électrique ou pharmacologique (1). Le critère principal de jugement était le temps écoulé jusqu’à la première récidive de FA. Les critères secondaires étaient été les symptômes de FA lors des ECG ou du monitoring téléphonique, ainsi que la cadence ventriculaire lors de la première récidive. Dans ces essais, le risque de première récidive de FA a diminué de 25 % à un an.

Dans l’étude DIONYSOS, la tolérance de la dronédarone à la posologie de 400 mg/j a été comparée à celle de l’amiodarone, à la dose de 600 mg/j pendant 28 jours puis 200 mg/j, dans le maintien du rythme sinusal, chez 504 patients ayant une FA persistante (2). Une cardioversion était prévue entre le 10e et le 28e jour si le rythme sinusal n’était pas restauré. La durée de la période de suivi a malheureusement été fixée à 6 mois au minimum, alors qu’une durée de 2 ans aurait été préférable, afin de mieux juger du risque de survenue des effets indésirables de l’amiodarone. Le critère principal de jugement, composite, était les récidives de FA ou l’interruption prématurée de l’étude. Le critère de jugement de la sécurité d’emploi était la survenue des événements thyroïdiens, hépatiques, pulmonaires, neurologiques, cutanés, oculaires ou gastro-intestinaux, ou la sortie d’étude pour effet indésirable.

L’efficacité de la dronédarone a été moins bonne sur les récidives de FA, mais elle a fait preuve d’un meilleur profil de tolérance concernant les effets indésirables thyroïdiens et neurologiques, et de moins d’interaction avec les anticoagulants.

Une réduction de morbimortalité.

L’étude ATHENA est la seule étude de morbimortalité dans laquelle un antiarythmique a été évalué en double insu chez des patients en FA (3). Les résultats ont montré qu’en complément de traitements conventionnels, le traitement par dronédarone est associé à une réduction du critère de jugement principal combinant hospitalisations cardiovasculaires et mortalité générale de 24 % (p < 0,001) par comparaison avec le placebo. La mortalité générale a été réduite de 16 %, la mortalité cardio-vasculaire de 29 % et le risque d’hospitalisation pour motif cardio-vasculaire de 26 %. Dans les diverses recommandations émises par les sociétés savantes cette molécule apparaît en première intention dans quasiment tous les schémas thérapeutiques de ces recommandations, exception faite des patients en insuffisance cardiaque.

Le vernakalant, quant à lui, est en cours de développement. Dans l’étude AVRO, très récemment publiée, cet activateur des canaux potassiques IKur a apporté la preuve de sa supériorité sur l’amiodarone, chez des patients en FA nécessitant une cardioversion rapide. Dans cette étude multicentrique, 254 patients en FA ont été inclus. Le vernakalant a été administré par voie veineuse en perfusion de 10 minutes à la dose de 3 mg/kg suivie si besoin d’une seconde perfusion de 2 mg/kg après 15 minutes d’observation. Le critère de jugement principal était la proportion de patients en rythme sinusal à 90 min. Le résultat obtenu sous vernakalant, 51,7 %, a été significativement meilleur que celui qui a été observé sous amiodarone, 5,2 % (p < 0,0001). En terme de tolérance, aucun effet indésirable rythmique grave n’a été constaté.

D’après la communication du Pr Jean-Marc Davy, département de cardiologie et maladies vasculaires, hôpital Arnaud-de-Villeneuve, CHU de Montpellier.

(1) Singh B, et coll. Dronedarone for maintenance of sinus rhythm in atrial fibrillation or flutter. N Engl J Med 2007 ; 357 (10) : 987-99.(2) Le Heuzey JY, et coll. A short-term, randomized, double-blind, parallel-group study to evaluate the efficacy and safety of dronedarone versus amiodarone in patients with persistent atrial fibrillation : The DIONYSOS Study. J Cardiovasc Electrophysiol 2010 ; 21 (6) : 597-605.

(3) Hohnloser SH, et coll. A placebo-controlled, double-blind, parallel arm Trial to assess the efficacy of dronedarone 400 mg bid for the prevention of cardiovascular Hospitalization or death from any cause in patiENts with Atrial fibrillation/atrial flutter (AF/AFL). J Cardiovasc Electrophysiol 2008 ; 19 : 69-73.

(4) Camm A, et coll. A Randomized Active-Controlled Study Comparing the Efficacy and Safety of Vernakalant to Amiodarone in Recent-Onset Atrial Fibrillation. J Am Coll Cardiol 2011 ; 57 (3) : 313-21.

*L’Agence Européenne des Médicaments (EMA) et les Agences nationales, dont l’Afssaps, ont été informées de deux cas d’atteintes hépatiques sévères chez des patients traités par Multaq (dronédarone), pour lesquels la relation causale avec Multaq ne peut être exclue. Le comité des médicaments à usage humain (CHMP) de l’EMA a recommandé des changements sur l’information du produit afin d’aider à la surveillance des complications hépatiques sévère. L’Afssaps recommande donc de réaliser un bilan hépatique avant le début du traitement, renouvelé tous les mois pendant 6 mois, puis à 9 mois et à 12 mois, et régulièrement par la suite.

 Dr GÉRARD BOZET

Source : Le Quotidien du Médecin: 8905