Les infections respiratoires aiguës de l’enfant en hiver se limitent le plus souvent en ville aux états fébriles, rhinopharyngites et bronchites. Les angines et otites sont moins fréquentes, les pneumopathies ou sinusites, exceptionnelles. Ces infections sont dans l’immense majorité des cas virales et bénignes : l’enfant est vu une fois, éventuellement une 2e fois, guère plus. Le Dr Pascal Clerc est pragmatique : « Dans un contexte hivernal, si on revoit un état fébrile une 3e fois ou de façon anormalement rapprochée, une complication est possible. Avoir en tête l’évolution naturelle me semble très important. Le problème n’est pas tant de faire des diagnostics d’emblée que d’être à l’affût d’une complication ou d’une infection bactérienne derrière un état fébrile qui se prolonge. En pratique c’est en 2e recours que l’on envisage la possibilité d’une pyélonéphrite ou d’une pneumopathie ».
Prescrire l’éducation
Le Dr Pascal Clerc souligne l’importance de l’éducation thérapeutique des parents : « Les mesures de bon sens doivent reprendre le devant de la scène sur les médicaments ». Cela prend vingt minutes d’expliquer aux parents comment laver le nez au sérum physiologique ; qu’un mouchage vert témoigne de l’évolution naturelle (desquamation épithéliale, rarement d’une surinfection) ; qu’il faut aérer la chambre au moins une fois par jour et l’humidifier ; en cas de fièvre, ne pas trop couvrir l’enfant et respecter la fièvre (c’est un mécanisme physiologique de lutte contre l’infection : on donne du paracétamol si l’enfant est abattu même s’il a peu de fièvre, pas pour obtenir l’apyrexie s’il a 39 °C et continue à jouer) ; bien l’hydrater (en cas de fièvre, de diarrhée) ; ne pas le forcer à manger s’il n’a pas faim.
Les campagnes de la CNAM « Les antibiotiques, c’est pas automatique » ont marqué les esprits, aidé la relation médecin malade, mais les prescriptions d’antibiotiques ré-augmentent. Face aux infections respiratoires aiguës récidivantes dans un contexte viral, le praticien sait que la prescription d’antibiotique est inadaptée. Mais, en manque d’arguments et de repères pour répondre aux récidives, il se sent parfois acculé à une antibiothérapie « de dernier recours » devant l’inquiétude des parents, l’absentéisme scolaire... Il faut rassurer les parents, leur expliquer que la rhinopharyngite dure 1 semaine - avec ou sans antibiotique - et que l’antibiothérapie est inutile.
Épidémiologie en ville
Une thèse de Médecine générale, réalisée par le Dr Marine De Chefdebien et dirigée par le Dr Pascal Clerc, s’est intéressée à l’évolution des infections respiratoires aiguës au cours de l’enfance avec une vision globale de soins primaires. Sur une cohorte de 1 000 enfants, nés entre 1999 et 2001, suivis en médecine générale pendant 10 ans, les 10 infections les plus fréquentes (rhinopharyngites, bronchites, otites, fièvres, gastroentérites …) ont été comptabilisées et répertoriées par classes d’âge de 0 à 10 ans. À côté de la classique maladie de l’adaptation à la crèche, maternelle ou CP, d’autres schémas s’observent : certains font de plus en plus d’infections annuelles jusqu’à l’âge de 10 ans ; d’autres (environ 15 %, voir encadré) alternent en permanence jusqu’à 10 ans des infections très variées et finissent par être constamment sous antibiotiques. Ce sont eux qui posent le problème de la sur-prescription. Les enfants peu infectés restent dans un registre (rhinopharyngites, états fébriles) et sont très rarement traités par antibiotiques.
Ce 1er travail donne des repères épidémiologiques pour argumenter et résister à l’antibiothérapie. « Il doit être poursuivi pour analyser le contexte de ces infections récidivantes, afin de pouvoir les prévenir mais aussi diminuer l’antibiothérapie inadaptée et les résistances antibiotiques », précise le Dr Pascal Clerc. Ces objectifs de santé publique intéressent de près la Société française de médecine générale.
D’après un entretien avec le Dr Pascal Clerc, médecin généraliste Les Mureaux, membre titulaire de la SFMG, MCA université de St Quentin en Yvelines
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