Angioplastie du syndrome coronaire aigu

Abord artériel radial ou fémoral comparés

Publié le 13/05/2011
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Crédit photo : S Toubon

EN FRANCE, un peu plus de la moitié (59 %) des actes de cardiologie interventionnelle coronaire sont effectués par abord de l’artère radiale. Aux États-Unis, ce taux est à moins de 5 %. Cette différence est probablement due au fait que les rapports bénéfice-risque de ces deux techniques étaient difficiles à apprécier, les études jusqu’ici disponibles n’ayant pas les qualités requises pour une évaluation adaptée.

Il était jusqu’à présent admis qu’un des avantages de la voie fémorale était sa facilité, traduite par un taux plus élevé de succès des procédures. Les avantages de la voie radiale sont une diminution des complications hémorragiques (mais il est possible que cet avantage ne concerne que certaines catégories de patients à risque hémorragique élevé), une déambulation immédiate et un plus grand confort du patient et, potentiellement, une durée d’hospitalisation plus courte. La voie fémorale a comme désavantage d’un taux de complication plus important au point de ponction (hématomes, pseudo-anévrysmes, fistules artério-veineuses). Les désavantages de la voie radiale sont : un apprentissage de la technique plus long, une technique plus difficile (notamment en matière de progression des sondes de canulation coronaire), un taux plus faible de succès des procédures (traduit par une nécessité de recourir à la voie fémorale en cours de procédure proche de 10 %, situation dénommée par l’anglicisme cross-over) et, de ce fait, une augmentation de la dose d’irradiation pour le patient et l’opérateur.

Afin de quantifier les rapports bénéfice-risque respectifs de ces deux procédures, il était nécessaire de conduire un grand essai clinique comparatif. C’est ce qui a été fait avec l’étude RIVAL.

Des opérateurs expérimentés.

L’étude RIVAL a été un essai comparatif, randomisé (par procédure informatisée centralisée). Les patients inclus devaient avoir un résultat de la manœuvre d’Allen indiquant une bonne perméabilité de l’artère cubitale du même côté que la ponction radiale. Les opérateurs devaient avoir pratiqué préalablement au moins 50 procédures par voie radiale.

L’étude a été réalisée pour évaluer, en intention de traiter, si l’abord radial est supérieur à l’abord fémoral pour diminuer l’incidence des décès, infarctus du myocarde (IDM), AVC et hémorragies sans rapport avec une chirurgie de pontage dans les 30 jours suivants la procédure.

Entre juin 2006 et décembre 2010, 7 021 patients ont été enrôlés dans 158 hôpitaux de 32 pays (en Amérique, Europe, Asie et Océanie). Parmi ces patients, 99,8 % ont eu une coronarographie, 66,4 % une angioplastie coronaire et 8,5 % une chirurgie de pontage coronaire.

L’étude a montré qu’il n’y a pas de supériorité de l’abord radial par rapport à l’abord fémoral dans la prise en charge invasive des syndromes coronaires aigus. L’incidence des événements du critère primaire a été de 3,7 % dans le groupe « abord radial » et de 4,0 % dans le groupe « abord fémoral » (risque relatif [RR] 0,92 ; intervalle de confiance à 95 % [IC 95 %] 0,72-1,17 ; p = 0,50).

Des résultats à nuancer selon le volume d’actes.

Au-delà de ce résultat principal, un intérêt de l’étude est l’analyse des différents critères et sous-groupes évalués.

Ainsi, l’abord radial a été supérieur à l’abord fémoral pour réduire les événements du critère primaire dans les centres (tertile supérieur) ayant les plus grands volumes d’abord radiaux (RR 0,49 ; IC 95 % 0,28-0,87 ; p = 0,015) et dans le sous-groupe des patients ayant un IDM avec sus-décalage du segment ST (RR : 0,60 ; IC 95 % : 0,38-0,94 ; p = 0,026). Dans les centres ayant les volumes les moins importants d’actes par voie radiale, l’abord fémoral n’a pas été associé à une supériorité en termes de réduction des événements du critère primaire, indiquant que c’est le volume d’actes important qui modifie en lui-même l’intérêt de la voie radiale.

L’incidence des complications au point de ponction a été moindre chez les patients ayant eu un abord radial, tant en termes d’hématomes importants (RR 0,40 ; IC 95 % 0,28-0,57 ; p < 0,001) que de pseudo-anévrysmes (RR 0,30 ; IC 95 % 0,13-0,71 ; p = 0,006).

Le taux de cross-over a été plus important dans le groupe « abord radial » (7,0 % essentiellement pour des spasmes d’artère radiale, et peu pour boucle radiale ou tortuosité sous-clavière) que dans le groupe « abord fémoral » (0,9 %, essentiellement pour des tortuosités fémorales ou une artérite), de même que la durée d’irradiation (temps de scopie de 9,8 minutes dans le groupe « abord radial » et de 8,0 minutes dans le groupe « abord fémoral », p < 0,0001 pour la comparaison).

Enfin, les données de l’étude RIVAL ont été incluses dans une métaanalyse des essais précédents, qui a montré une diminution significative des complications hémorragiques lorsqu’un abord radial est utilisé.

Pour une pratique régulière de l’abord radial.

L’abord radial n’est pas supérieur à l’abord fémoral pour réduire les complications de la prise en charge invasive des syndromes coronaires aigus. La nécessité de recourir à un abord fémoral lorsqu’une procédure radiale a été envisagée concerne 7 % des procédures.

Dans les centres ayant une grande expérience de la voie radiale et chez les patients pris en charge pour un IDM, la voie radiale est supérieure à la voie fémorale. Ce résultat incite à la pratique régulière de l’abord radial pour augmenter l’expérience des opérateurs et leur permettre de diminuer les complications hémorragiques lors de la prise en charge des IDM.

D’après la communication de Sanjit S. Jolly (Hamilton, Canada) : “Rival Trial: A Randomized Comparison of Radial versus Femoral Access for Coronary Angiography or Intervention in Patients with Acute Coronary Syndromes".

FRANÇOIS DIÉVART

Source : Le Quotidien du Médecin: 8962