La clozapine est le traitement de référence de la schizophrénie résistante. « Elle possède non seulement une efficacité supérieure aux autres antipsychotiques sur la diminution des symptômes positifs et négatifs de la schizophrénie, mais elle entraîne aussi une diminution de la mortalité, toutes causes confondues, et une diminution du risque suicidaire », a déclaré la Dr Maud Rothärmel (Rouen). Elle possède des propriétés anti-agressives et anti-impulsives et réduit le risque de dyskinésies tardives. Cependant, elle reste sous-prescrite à cause de ses effets indésirables : neutropénie, myocardite, syndrome malin des neuroleptiques, fièvre inexpliquée, constipation, sédation, énurésie nocturne, hypersialorrhée…
En cas de neutropénie sévère, l’arrêt est obligatoire. La neutropénie (PNN < 1,5 g/L) peut survenir au début du traitement. Son incidence est de 3,8 %, avec 0,9 % de neutropénie sévère. Son évolution serait fatale dans 2,1 % des cas de neutropénie sévère, soit 1 décès par neutropénie chez 7 700 patients exposés, avec une incidence maximale à un mois. Après un an de traitement, l’incidence diminue à un taux négligeable. Sa survenue n’est pas dose-dépendante, mais il existerait probablement une vulnérabilité génétique.
La myocardite, aussi, survient dans 87 % des cas le premier mois, avec une incidence de 0,1 % ; sa mortalité est élevée, de 15 à 24 %. Elle serait probablement induite par une titration rapide. L’arrêt de la clozapine est obligatoire en cas d’élévation de la CRP et de la troponine.
Savoir réintroduire
« En cas d’effets indésirables, il faut tout d’abord prouver l’imputabilité. Dans notre expérience, sur 53 patients mis sous clozapine entre janvier 2005 et mai 2010, seuls 3 ont eu des effets secondaires graves avec forte imputabilité de la clozapine. Dans 8 autres cas, une autre cause a été identifiée », a ajouté la Dr Rothärmel. Il peut notamment y avoir une association avec des traitements neutropéniants (acide valproïque, carbamazépine, olanzapine, quétiapine, chlorpromazine, cyamémazine).
« Si la clozapine n’est pas responsable, ou en cas de neutropénie bénigne idiopathique, elle peut être réintroduite afin de ne pas priver le patient d’un médicament efficace », précise la spécialiste. Il est possible d’utiliser conjointement des traitements pouvant augmenter le taux de PNN : le lithium (0,4 à 1,1 mEq/L) ou le G-CSF, mais son dosage et la fréquence d’administration ne sont pas complètement déterminés, souvent 0,3 mg/semaine.
La clozapine peut également être réintroduite (titration lente) en cas de syndrome malin des neuroleptiques.
« Ainsi, même en cas de survenue d’effets secondaires graves, il est possible de réintroduire la clozapine avec un gain fonctionnel pour le patient. Il faut l’utiliser le plus largement possible, l’instaurer en douceur et ne pas craindre les effets secondaires, qui sont gérables », souligne la spécialiste.
En cas d’hypersialorrhée, on peut recourir à l’instillation sublinguale d’un collyre à l’atropine (5 gouttes 3 fois/j). La constipation est fréquente (56 % des cas) et il faut systématiquement associer des laxatifs (lactulose). Quant à l’énurésie nocturne, elle touche 1 patient sur 5 et les règles hygiénodiététiques sont essentielles. « Il y a encore trop souvent, pour la clozapine, une surévaluation des risques et une sous-évaluation des bénéfices », a conclu la Dr Rothärmel.
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