Incidence de l’asthme

Le poids de la pollution atmosphérique dans la petite enfance

Publié le 20/05/2011
Article réservé aux abonnés
1309358158255346_IMG_61148_HR.jpg

1309358158255346_IMG_61148_HR.jpg

L’augmentation de la prévalence des maladies allergiques et de l’asthme découle de facteurs génétiques et environnementaux, tels que les infections dans la petite enfance, l’exposition aux allergènes et aux polluants. Si l’impact des pics de pollution sur les exacerbations de l’asthme est parfaitement établi, le rôle de celle-ci dans la genèse de l’asthme est resté plus contesté.

L’exploration de ce domaine de recherche pose la question des méthodes de mesure de la pollution et conduit à développer des marqueurs géographiques. « Mesurer la pollution atmosphérique est un exercice difficile, car la pollution est un mélange de particules fines et de polluants gazeux, et il faut tenir compte de la notion de temps - durée d’exposition, exposition de fond et pics - et d’espace - distance par rapport au lieu de vie - », rappelle le Dr Jocelyne Just (Paris).

L’exposition à la pollution peut être estimée, par exemple, par la moyenne de plusieurs mesures directes d’un polluant. Cette approche a notamment permis de retrouver, dans un travail prospectif longitudinal, une corrélation entre le risque d’apparition de nouveaux cas d’asthme et la concentration moyenne en NO2.

Elle peut également tenir compte de la distance du domicile par rapport à un axe routier à fort trafic. Dans un travail datant de 2006, une relation forte avait été démontrée entre cette distance et la prévalence de l’asthme.

Des marqueurs géographiques pour suivre l’exposition.

C’est sur cette base qu’a été développée une modélisation de l’exposition en fonction de caractéristiques géographiques : le géocodage.

Ce modèle prend en compte des paramètres tels que la distance du domicile par rapport aux routes à fort trafic, le nombre d’arrêts de bus à proximité, ou l’étage de l’habitation. La pertinence de ce modèle a été soulignée dans une étude suédoise de 2008, qui a mis en évidence une bonne corrélation entre la concentration en NO2 mesurée et extrapolée, puis dans une étude américaine, qui a montré une association entre le degré d’exposition évaluée par géocodage et le risque d’apparition de sifflements chez l’enfant.

Une association significative avant l’âge de un an.

Puis le concept de fenêtres d’exposition a été mis en avant pour expliquer l’augmentation des nouveaux cas d’asthme. « Il semble que les expositions environnementales précoces soient déterminantes. Les données issues de la cohorte interventionnelle PIAMA (Prevention and incidence of asthma and mite allergy), portant sur 4 146 enfants, montrent qu’il existe une association significative entre asthme et exposition à un polluant entre la naissance et 12 mois, et ce quel que soit le polluant », précise le Dr Just. Et cette association perd sa significativité pour les âges supérieurs. Il y a également une relation entre le NO2 respiré au cours du dernier trimestre de la grossesse et le NO exhalé chez le nouveau-né, marqueur de l’inflammation pulmonaire. « Plutôt qu’une maladie, l’asthme est un phénotype qui évolue au cours de la vie en fonction de différents facteurs. Tous les asthmes ne persistent pas et il existe une relation entre l’asthme persistant et l’exposition au NO2 au cours de la première année de la vie », souligne-t-elle.

Quand l’ennemi se situe à l’intérieur.

L’impact de la pollution intérieure a également été étudié. Dans la cohorte PARIS (Pollution asthma risk in infant study), qui a évalué l’impact de la pollution sur les symptômes respiratoires, le risque de présenter une bronchiolite est augmenté de 21 % chez les nourrissons soumis à un niveau élevé, au domicile, de formaldéhyde (polluant présent notamment dans les parquets vitrifiés ou les meubles en panneau de particules). « L’exposition au formaldéhyde joue un rôle aussi important que les antécédents familiaux, même si le mode de garde en crèche reste bien sûr le facteur causal numéro un », expose le Dr Just, et ce en raison des infections virales.

Une autre donnée très importante est l’effet synergique des différentes expositions. Une étude américaine a ainsi montré que l’exposition prénatale à des particules diesel et, en post-natal, à un tabagisme passif, a un effet synergique sur le risque d’apparition de l’asthme au cours des deux premières années de vie.

Enfin, il y a une susceptibilité génétique à la pollution. Les facteurs impliquant les relations gènes-environnement sont multiples. Il est par exemple établi que les enfants ayant un génotype GSTM1 sont plus susceptibles de développer un asthme en cas de tabagisme maternel durant la grossesse. Les mécanismes épigénétiques sont particulièrement explorés pour expliquer la relation entre la pollution et la survenue de nouveaux cas d’asthme. Dans un modèle in vitro, l’exposition de cellules bronchiques à des particules diesel entraîne la méthylation de gènes impliqués dans l’inflammation, comme celui codant pour la COX-2. Et l’exposition maternelle, au cours de la grossesse, au diesel au-delà d’un certain taux est associée à l’expression d’un gène par la méthylation de son promoteur ainsi qu’au risque d’asthme chez l’enfant avant l’âge de 5 ans. Ce domaine est en cours d’exploration et la meilleure connaissance des mécanismes impliqués pourrait permettre à terme de mieux comprendre les relations entre la pollution et les maladies telles que l’asthme.

D’après la communication du Dr Jocelyne Just (Paris) « Impact de la pollution sur l’asthme de la petite enfance ».

Dr Isabelle Hoppenot

Source : Le Quotidien du Médecin: 8967