Le SARS-CoV-2 provoque des lésions endothéliales qui augmentent le risque thrombotique. Selon une récente étude américaine (1), le risque de développer une maladie cardiovasculaire est augmenté de 55 % dans l’année qui suit l’infection : arythmies, myocardites, insuffisance cardiaque, embolie pulmonaire, thrombose veineuse profonde et AVC. Parmi les patients hospitalisés pour Covid-19, l’incidence de l’AVC ischémique a été estimée à environ 1,5 % (2).
Un effet sur la mortalité
Une méta-analyse, la plus grande réalisée à ce jour sur le sujet, confirme que la pandémie a interféré avec la prise en charge des AVC (3). Ce travail a permis d’évaluer le risque de mortalité lié aux AVC des patients hospitalisés pendant l’épidémie de Covid-19, par rapport à la période prépandémique. Les 31 études analysées ont regroupé 455 073 hospitalisations pour AVC, dont 365 253 prépandémiques et 89 820 durant la crise sanitaire. L'âge moyen des patients était de : 72 versus 70 ans. La distribution était comparable concernant les hommes, la fibrillation atriale et la thrombolyse.
L’étude met en évidence un risque de mortalité plus élevé, de près de 40 % pendant la pandémie par rapport aux admissions précédant cette période (OR = 1,42, IC 95 % : 1,06-1,92, p = 0,018). Selon l’analyse en sous-groupes, le risque de mortalité serait légèrement plus élevé chez les patients de moins de 70 ans d'âge moyen (n = 11, OR = 1,48, p = 0,020) ) par rapport à ceux de 70 ans et plus (n = 17, OR = 1,27, p < 0,001). D'autre part, la mortalité est significativement plus élevée en Europe (OR = 1,31, p < 0,001) pendant la pandémie qu’auparavant, mais non significativement en Asie (OR = 1,13, p = 0,57), aux États-Unis (OR = 1,59, p = 0,23) et en Afrique (OR = 1,20, p = 0,46).
Prudence les trois premiers jours
D’après une autre étude, le risque d’AVC chez les personnes âgées diagnostiquées pour Covid-19 est plus élevé au cours des trois premiers jours suivant le diagnostic (4). Le risque d’AVC ischémique aigu a été examiné en reprenant les dossiers de santé de 37 379 bénéficiaires de Medicare âgés de 65 ans et plus. L’infection par le SARS-CoV-2 a été diagnostiquée entre le 1er avril 2020 et le 28 février 2021. Les patients étaient alors âgés en moyenne de 80 ans, et 57 % étaient des femmes. Le risque d’AVC dans les jours précédant et suivant immédiatement ce diagnostic a été comparé à celui observé les autres jours de l’étude ou lors de la période de contrôle.
Selon les résultats, le risque d’AVC était 10 fois plus élevé au cours des 72 premières heures suivant le diagnostic que pendant la période de contrôle. Après ces trois premiers jours, il a diminué rapidement. Mais il est resté plus élevé qu’au cours de la période de contrôle : de 60 % entre le quatrième et le septième jour, et de 44 % entre le huitième et le quatorzième. Après 15 à 28 jours, il devient plus faible. Un sous-groupe de patients, moins âgé (de 65 à 74 ans), présentait un risque accru d’AVC après le diagnostic de Covid-19 par rapport aux sujets de 85 ans et plus, et à ceux sans antécédents d’AVC. « Ces résultats peuvent éclairer le diagnostic et la prise en charge des AVC chez les patients atteints de Covid-19 », a déclaré le Dr Quanhe Yang, auteur principal de l’étude (États-Unis).
Vers un nouveau score de risque
Comment prédire le risque d’AVC chez les adultes hospitalisés pour Covid-19 ? Un nouveau système d'évaluation semble pouvoir relever ce défi (5). Il a été développé en utilisant les informations du registre Covid-19 de l’American Heart Association, une base de données de santé sur le traitement de l’infection par SARS-CoV-2, et les facteurs de risque de maladie cardiovasculaire des sujets hospitalisés.
Les chercheurs ont ainsi identifié six facteurs cliniques permettant de prédire le risque d’AVC ischémique ou hémorragique, d’accident ischémique transitoire ou de thrombose des veines cérébrales. Ces facteurs comprenaient : l’absence de fièvre (inférieure à 38,3 °C) au moment de l’admission à l’hôpital et d’antécédent de pathologie pulmonaire, une hyperleucocytose, une pression artérielle systolique élevée lors de l’admission (>140 mmg Hg), ainsi que des antécédents d’AVC et d’hypertension artérielle. « Parmi ces six facteurs liés à un risque accru d’AVC, deux sont contre-intuitifs : l’absence d’antécédent de maladie pulmonaire et l’absence de fièvre. Cela semblait un peu surprenant car les patients atteints d’une maladie pulmonaire et ceux ayant une forte fièvre sont plus à risque de développer un Covid-19 sévère », a souligné le Pr Alexander E. Merkler, auteur principal de l’étude (États-Unis).
L’essai a examiné les données d’environ 21 420 adultes hospitalisés pour Covid-19 dans 122 centres de soins de santé aux États-Unis entre mars 2020 et mars 2021. L’âge moyen des patients était de 61 ans et 54 % étaient des hommes. Parmi eux, 312 (1,5 %) ont eu un événement cérébrovasculaire, soit un adulte sur 65. La présence d'au moins quatre facteurs de risque cliniques augmentait de plus de 10 fois le risque de faire un AVC (par rapport aux patients en ayant moins). « Ce score de risque clinique peut aider les professionnels à mieux comprendre quels patients atteints de Covid-19 ont une probabilité accrue d’AVC et, par conséquent, à les surveiller de manière plus intensive et à débuter un traitement plus rapidement, a expliqué le Pr Merkler. Les recherches futures pourraient se concentrer sur des traitements spécifiques bénéfiques à ces malades ».
(1) Xie Y et al. Nature Med (2022). https://doi.org/10.1038/s41591-022-01689-3
(2) Nannoni S et al. Int J Stroke 2021;16:137-49
(3) Desai R et al, abstract 54
(4) Yang Q, abstract TMP 16
(5) Merkler AE, abstract TMP 13
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