Changement de formule du Lévothyrox

Rassurer les patients, doser la TSH si besoin

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Publié le 04/09/2017
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lévothyroxine

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Crédit photo : PHANIE

Pétition de patients, numéro vert mis en place par l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM), communiqués des sociétés savantes, et plus récemment, plainte d’une patiente contre Merck… quelques mois après le changement de formule du Lévothyrox, la machine s’est emballée.

Au mois de mars, et à la demande de l’ANSM, le laboratoire Merck a remplacé dans son médicament le lactose par du mannitol et ajouté de l’acide citrique, sans modification du principe actif, la lévothyroxine. « Ces changements viennent optimiser la stabilité du médicament dans le temps, dans le but d'améliorer sa qualité, précise Dominique Martin, directeur général de l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM), au « Quotidien ». Nous avions en effet constaté, par les signalements de pharmacovigilance, qu’il y avait une perte de stabilité du médicament, et ce avant la date de péremption. Le produit se dégradant, de petites variations de doses survenaient, et des patients pouvaient présenter des troubles. » La nouvelle formule a donc été commercialisée en mars. Mais des patients ont ressenti des effets secondaires (fatigue, vertiges, maux de tête…), et lancé une pétition pour réclamer le retour à l’ancienne formule. Ce que l’ANSM n’envisage pas.

Dosage de la TSH dans certains cas

« Avec la nouvelle formule, qui améliore la stabilité, certains patients peuvent ressentir des effets secondaires transitoires, qui peuvent être corrigés par une adaptation du traitement, après examen clinique, et si nécessaire dosage de la TSH, ajoute Dominique Martin. La nouvelle formule est de meilleure qualité que l’ancienne. »

« Certains patients pouvaient être équilibrés depuis des années puis déstabilisés par ce changement de formulation, s’agissant d’un médicament à marge thérapeutique étroite », précise le Pr Marc Klein, endocrinologue au CHU de Nancy. Nous nous attendions à des répercussions chez certains patients. Mais il faut se méfier de l’effet de panique et ne pas arrêter le traitement. En cas de doute face aux symptômes, on fera réaliser un dosage de la TSH. »

L’ANSM a mis en place mercredi 23 août un numéro vert destiné aux patients. Il recevait 50 000 appels le jeudi (poussant l’Agence à augmenter le nombre de téléopérateurs de 15 à 90), 22 000 le vendredi, 12 000 le lundi et 5 000 le mardi.

3 millions de patients

Les derniers chiffres sur l’utilisation de la lévothyroxine en France montrent que le nombre de sujets traités dans la population générale en 2012 est d’environ 2,9 millions (versus 2,0 millions en 2006). « Les ventes des spécialités pharmaceutiques contenant de la lévothyroxine ont fortement augmenté puisqu’elles sont passées d’environ 4 millions de boîtes en 1990 à environ 34 millions en 2012 », souligne le rapport de l’ANSM. L’initiation du traitement se fait à 85 % en ville (15 % à l’hôpital), où 74 % des primo-prescripteurs sont des médecins généralistes. Et un peu plus des deux-tiers des initiations sont précédées d’un dosage de TSH remboursé.

« La pathologie thyroïdienne est la pathologie endocrinienne la plus fréquente », rappelle le Pr Klein. « Et il y a eu un surdiagnostic de cancer de la thyroïde comme l'a montré une étude du CIRC publiée dans le « New England Journal of Medicine » en août 2016. Les nouvelles recommandations poussent à être moins interventionnistes et à prendre en compte l’âge avant de commencer un traitement. »

Fabienne Rigal

Source : Le Quotidien du médecin: 9598
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