LE Pr MICHEL PINGET rappelle que la France est entrée dans la phase épidémique du diabète de type 2 qui touche le monde, avec pour triste perspective quelque 400 millions de malades en 2 025 ; en effet, pour la première fois, l’augmentation de la prévalence du D2 n’est plus seulement la conséquence du vieillissement de la population, la responsabilité de l’obésité de l’adulte ne faisant que croître.
Cette épidémie aura des conséquences dramatiques quand on sait que, selon les données de l’InVS (2 006), le diabète est mentionné dans 6,1 % des causes multiples de décès (2,2 %). En particulier le diabète multiplie par 2 à 4 le risque de maladie coronarienne, près de 75 % des diabétiques mourant d’une telle complication. « Toutes les artères sont égales, souligne le P Michel Pinget, et toutes les artériopathies ont des conséquences dramatiques chez le diabétique ». Or le diabétique est à haut risque vasculaire à tous les niveaux : cérébral (avec une prévalence de 5 %), ophtalmologique (3,9 % des patients perdent la vue d’un œil), rénal (0,3 % de passage en dialyse) et périphérique (1,5 % d’amputations et 9,9 % de maux perforants plantaires).
L’Alsace est particulièrement touchée.
Avec une prévalence proche de 9 % l’Alsace est particulièrement touchée par le D2, ce chiffre étant comparable à celui enregistré aux Antilles, par exemple. « Si la qualité du dépistage paraît très bonne dans notre région, se félicite le Pr Pinget, cela n’explique pas cette surmortalité qui apparente notre région aux pays Anglo-saxons : composante génétique, mauvaise habitude alimentaire, obésité de l’enfant et de l’adulte ».
Les conséquences de cette surmortalité sont tout à fait perceptibles alors que, pour l’ensemble de la France, 30 à 40 % des entrées en dialyse concernent des diabétiques, ce pourcentage approche 60 % en Alsace.
Dans ces conditions, on comprend que la région ait donné priorité à quatre thèmes de santé publique : l’obésité de l’enfant, les maladies cardio-vasculaires, les complications du D2 et l’éducation thérapeutique.
La nécessité d’une prise en charge globale.
« Au plan individuel, il faudrait considérer le diabétique comme un patient qui sort des soins intensifs cardiologiques, ce qui est loin d’être toujours le cas », déplore le Pr Pinget. Cela signifie une prise en charge globale, intensive et aussi précoce que possible. Ce qui passe, bien sûr, par l’arrêt du tabac et par des mesures hygiénodiététiques mais aussi par un contrôle strict des dyslipidémies et de l’HTA. À ce titre le Pr Pinget salue les conclusions du consensus des diabétologues alsaciens – entériné par l’Assurance-maladie de la région - et qui abaissent le seuil de LDL-cholestérol chez le diabétique à haut risque cardio-vasculaire (0,7 g/l), alors que le diabétique à risque modéré reste à objectif de 1 g/l.
En ce qui concerne l’action sur la glycémie, les résultats des grands essais cliniques (UKPDS, STENO2, ADVANCE, ACCORD…) montrent que le contrôle strict d’HbA1c entraîne un bénéfice microvasculaire rapide et constant mais que les choses sont plus complexes pour le risque macrovasculaire. Pour que ce bénéfice soit significatif, il faut une prise en charge globale (contrôle des autres facteurs de risque), précoce (l’être humain mémorise son équilibre métabolique toute sa vie, au niveau des artères) et en optant pour une approche progressive et privilégiant les stratégies limitant le risque d’hypoglycémies et la prise de poids, comme la stratégie de l’étude ADVANCE. « La baisse de l’HBA1c est très vraisemblablement payante au plan macrovasculaire si l’on respecte ces règles, surtout chez les patients âgés et fragiles », conclut le Pr Pinget.
(*) Réunion organisée avec le soutien institutionnel du groupe Servier
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