Prévention des infections à HPV

Les programmes de vaccination dans le monde

Publié le 06/05/2011
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SI LES MODALITÉS d’introduction des nouveaux vaccins dans les programmes nationaux varient selon les pays, celle-ci se fait souvent en deux étapes : d’abord l’élaboration de recommandations par une institution consultative, puis la prise de décision officielle par les autorités sanitaires. Une enquête menée dans le cadre du projet VENICE (Vaccine European New Integrated Collaboration Effort) met en évidence la progression forte et rapide de la vaccination HPV en Europe. Le nombre de pays dans lesquels des recommandations ont été élaborées est en effet passé de 12 sur 27 en février 2008 à 21 sur 29 en juillet 2010. Et à cette date, 18 d’entre eux avaient mis en place un programme national de vaccination HPV. La vaccination HPV et son impact potentiel sur le contrôle du cancer ont suscité un vif intérêt à la fois dans la communauté scientifique et parmi les acteurs de santé publique. L’absence de programmes nationaux de vaccination dans le reste des pays européens s’explique principalement par des raisons financières (coût élevé des vaccins). « Comparé à d’autres vaccins comme celui contre le rotavirus ou même le pneumocoque, la décision a été relativement rapide et simple », commente Pier Luigi Lopalco. L’analyse des données 2010 du système de surveillance de la couverture vaccinale (CV), qui existe dans 13 des 18 pays concernés, révèle des disparités importantes, les taux de CV allant de 17 % à 81 % pour les trois doses. Une faible CV se comprend dans les pays ayant introduit très récemment la vaccination, mais dans les autres cas, elle peut traduire un désintérêt ou un problème d’acceptation.

En France.

Une équipe de Rhône-Alpes a réalisé une étude transversale sur la population cible de la vaccination HPV (filles de 14 ans et 15 à 23 ans pour le rattrapage) afin d’évaluer leurs connaissances du cancer du col et cette vaccination ainsi que leur comportement vis-à-vis des infections sexuellement transmissibles (IST). Un autoquestionnaire a été administré à 316 participantes recrutées en médecine générale, complété par un entretien avec un sociologue pour 28 d’entre elles, précise Delphine Lutringer-Magnin. Dans cette série, le taux de vaccination global était de 42,7 % (51,2 % chez les 14-16 ans, 44 % chez les 17-20 ans, 18,9 % chez les 21-23 ans). Quatre-vingt-dix pour cent des non vaccinées connaissent le vaccin HPV, mais seulement 24,3 % déclarent qu’elles ont l’intention de se faire vacciner rapidement. La même proportion se dit non concernée, 30,4 % préfèrent attendre et 11,6 % y sont opposées. Les filles vaccinées sont plus souvent informées que les autres par leur famille (58,5 % contre 28,7 %) ou par le médecin généraliste (75,6 % contre 50,3 %). La cible du vaccin HPV n’est connue que par 8,5 % des filles (13,5 % des vaccinées et 5,5 % des non vaccinées). En ce qui concerne la prévention des IST, la grande majorité cite le préservatif (87,2 %) et l’utilise (88 %) quel que soit leur statut vaccinal HPV. La vaccination HPV n’a pas d’impact sur son utilisation.

Des actions doivent être entreprises pour améliorer l’information des filles et de leurs parents, et le généraliste a un rôle majeur dans ce domaine, concluent les auteurs de l’étude. Les programmes d’éducation du public sur le HPV doivent aussi s’adresser à la population masculine qui est encore moins bien informée que les femmes. Selon une étude australienne présentée par Marian Pitts, 12 % des garçons de 16-18 ans pensent que les infections à HPV ne touchent que les hommes contre 29 % des filles du même âge et, respectivement 21 % et 39 % savent qu’elles concernent les deux sexes. L’association condylomes génitaux-HPV est également peu connue (9 % et 17 %). Il existe également une différence de connaissance du rôle du HPV dans le cancer du col entre les hommes (15 %) et les femmes (49 %). Seulement 20 % des hommes citent spontanément le cancer du col comme un problème de santé publique lié au HPV contre 82 % des femmes. Aux États-Unis, les deux vaccins actuellement disponibles sont autorisés chez les garçons et les hommes jeunes, signale Sheirri Shenfield Gorin.

Dans les pays multiculturels.

Le succès de la mise en place des programmes de vaccination contre le HPV dans les pays multiculturels nécessite de prendre en compte les préoccupations des différentes communautés qui les composent. Les programmes actuels, fondés sur le paradigme occidental, ne répondent pas tout à fait à ces besoins, souligne Margaret Heffernan. Une enquête australienne menée auprès de populations de différentes origines ethniques (Anglais, Aborigènes, Chinois) met en lumière le risque d’impact négatif sur l’acceptabilité des vaccins qui peut en résulter. Les messages doivent donc être adaptés aux spécificités culturelles.

D’après les communications de Pier Luigi Lopalco (European Centre for Disease Prevention and Control, Stockholm), Delphine Lutringer-Magnin (centre Léon Bérard, Lyon), Sheirri Shenfield Gorin (université Columbia, New York), Margaret Heffernan (université de Melbourne, Australie), Marian Pitts (centre de recherche australien « sexe, santé et société », Melbourne, Australie), Anne Szarewski (Institut de médecine préventive Wolston, Londres).

Dr CATHERINE FABER

Source : Le Quotidien du Médecin: 8957