Accès à l’imagerie pédiatrique

Une enquête à l’hôpital et en ville

Publié le 19/11/2015
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Des connaissances spécifiques, une prise en charge particulière plus longue, qui reste encore à...

Des connaissances spécifiques, une prise en charge particulière plus longue, qui reste encore à...
Crédit photo : PHANIE

L’enquête a été réalisée à l’initiative de la Société française de radiologie et la Société française de pédiatrie, auprès d’un échantillon de 754 praticiens dont 514 radiologues (323 hospitaliers et 191 libéraux) et 240 pédiatres (182 hospitaliers et 58 libéraux). « C’est la première étude qui nous donne des informations objectives sur la pratique de l’imagerie pédiatrique », a expliqué le Pr Hubert Ducou Le Pointe (hôpital Trousseau, Paris). L’échantillon représentatif reflète la diversité des modes d’exercice, avec plus de 50 % des réponses émanant de radiologues libéraux.

Le CHU : un rôle majeur dans l’urgence

Les résultats montrent que le recours à l’hôpital augmente avec la complexité de la prise en charge. Les pédiatres adressent généralement les enfants aux radiologues de ville pour l’imagerie généraliste, c’est-à-dire la radiographie standard et l’échographie (sauf le nourrisson), mais le recours au secteur libéral est globalement plus important chez les enfants de plus de 6 ans que chez les plus jeunes. Lorsqu’ils prescrivent une IRM, 88 % d’entre eux adressent l’enfant en milieu hospitalier, 64 % au CHU et 24 % dans un établissement de santé. Le CHU est le lieu de recours privilégié, tant chez les pédiatres hospitaliers que libéraux pour l’IRM. Pour un scanner, les trois quarts des pédiatres envoient également l’enfant à l’hôpital, le plus souvent au CHU (50 %). Ces examens nécessitent, en effet, une prise en charge particulière que bon nombre de radiologues ne peuvent ou ne savent pas assurer, mais aussi une connaissance spécifique pour l’interprétation des images.

« Les résultats de l’enquête illustrent bien la spécificité de la prise en charge du jeune enfant, et donc la nécessité d’une formation particulière, en radiologie comme en clinique, a souligné le Pr Delacourt (Necker, Paris). Il faut examiner le jeune enfant, le préparer, le rassurer, le mettre en confiance, le sédater dans le cas de l’IRM, et donc le surveiller pendant et après, cela demande beaucoup plus de temps que pour un examen chez un adulte. L’enfant n’est pas un petit adulte, il faut du temps pour l’apprivoiser, lui faire découvrir l’IRM… ».

Les délais d’obtention des examens augmentent avec leur complexité (échographie du nourrisson, scanner et IRM), tant pour les pédiatres hospitaliers que libéraux, et ces délais restent encore trop longs. Si la radiographie standard est obtenue dans la journée dans 68 % des cas et, dans la semaine dans 31 % des cas, seulement 8 % des prescriptions d’échographie chez le nourrisson sont réalisées sous 24 heures, 55 % entre 2 et 7 jours et 35 % demandent un délai de 8 à 31 jours. Néanmoins, ces résultats ne concernent que les situations non urgentes. En urgence, de nuit ou le week-end, les enfants sont adressés au CHU dans 62 % des cas, ou dans un établissement de santé : le recours à l’imagerie en cabinet libéral est exceptionnel. Pour le scanner, dans la moitié des cas, il faut attendre 8 à 31 jours, dans 37 % des cas entre 2 et 7 jours et dans 8 % des cas plus de 31 jours. « Or, on devrait pouvoir passer un scanner en 24-48 heures partout en France. Ce délai d’attente est difficile à gérer pour les familles », a déclaré le Pr Ducou Le Pointe.

Des délais trop longs, surtout pour l’IRM

Quant à l’IRM, le délai est supérieur à 31 jours dans 49 % des cas, 43 % des enfants ont l’examen dans la semaine et 8 % dans la journée. « Cette situation est liée au manque d’appareils dans notre pays. Une pénurie qui persiste de façon inadmissible. On peut avoir un délai de 4-6 mois (en dehors de l’urgence) pour une IRM sous anesthésie générale », précise le Pr Ducou Le Pointe.

En revanche, en ce qui concerne le scanner, s’il existe un nombre suffisant de machines, ce qui manque ce sont des radiologues formés à la pédiatrie. « Certaines structures, même publiques, n’ont qu’une seule vacation de radiopédiatrie par semaine… et nombre de centres ne savent ni prendre en charge les enfants, ni interpréter les résultats », a-t-il poursuivi.

Le temps que prend nécessairement un examen pédiatrique ralentit la cadence et réduit la rentabilité des appareils : cette imagerie requiert plus de temps médical et paramédical. Or, la valorisation de ces actes n’est pas prise en compte. Par ailleurs, l’enquête montre que, pour 25 % des pédiatres, dont la grande majorité se trouve en zone urbaine, le centre d’imagerie spécialisée est à plus de 20 km.

Bon accès au scanner pour les traumatismes crâniens

L’accessibilité aux examens pour les traumatismes crâniens est bonne en termes d’horaires, sauf pour l’IRM. Ainsi, dans 92 % des cas, le scanner est accessible 24 heures sur 24, 7 jours sur 7, un taux qui atteint 96 % pour les radiographies standards et 80 % pour l’échographie généraliste. Alors que 21 % des établissements n’ont pas d’IRM ; dans 33 % des cas, celui-ci n’est disponible que les jours ouvrables et en journée. Seulement 35 % des centres recevant des urgences pédiatriques ont accès à l’IRM 7 jours sur 7 et 24 heures sur 24.

98 % des pédiatres hospitaliers pratiquant dans un établissement de santé accueillant les urgences pédiatriques ont accès au scanner en urgence pour un traumatisme crânien chez un enfant de moins de 6 ans. Un résultat tout à fait rassurant, pour les praticiens comme pour les parents.

Améliorer la formation et le partenariat pédiatre/radiologue

La nécessité d’une prise en charge particulière est le premier motif de non-réalisation de certains examens chez les enfants de moins de 6 ans chez les radiologues libéraux (65 %), le second pour les hospitaliers (41 %). Juste derrière, le manque de formation est invoqué pour 45 % d’entre eux. Seuls 46 % des radiologues interrogés sont en capacité de pratiquer des sédations. Or, la sédation est nécessaire pour pratiquer une IRM chez les enfants. Pour le scanner, elle s’impose également jusqu’à 2,5-3 ans minimum.

Enfin, il faudrait améliorer également la diffusion de l’information, notamment sur la radioprotection, un sujet qui n’est que rarement abordé par les pédiatres libéraux (24 %).

En conclusion, les résultats de cette enquête mettent en avant de nombreux points à améliorer pour une prise en charge optimale des jeunes patients et l’accès à la réalisation d’actes d’imagerie pédiatrique pour l’ensemble du territoire.


Source : Le Quotidien du Médecin: 9451