Depuis la stratégie nationale, les choses se sont-elles améliorées ? Un généraliste en burn-out est-il mieux pris en charge ?
Pr Éric Galam : La stratégie nationale a donné une reconnaissance institutionnelle et formelle au sujet. L’Observatoire de la qualité de vie au travail et la médiation ont récemment vu le jour. Les nouveaux outils n’ont pas donné des résultats flagrants, immédiats et palpables, mais beaucoup de structures s’intéressent désormais à la thématique. L’association SPS fait un travail important, la plateforme de l’Ordre également. Le DPC a intégré dans ses objectifs la formation à l’épuisement professionnel, même si pour l’instant il n’y a pas beaucoup de participants. Un médecin qui fait face à ce type de problèmes est donc mieux protégé qu’il y a cinq ans, car on en parle. Les personnes concernées sont plus vigilantes. La demande d’aide est légitimée, même si encore rare. Face à un confrère qui va mal, le médecin se retrouve face à quelque chose auquel il est déjà acclimaté. Nous sommes dans une belle dynamique, mais il y a encore beaucoup à faire.
Vous faites partie de l’Observatoire mis en place il y a un an, quel est son rôle ?
Pr É. G. : L’Observatoire élabore des thématiques liées au travail. Il collige aussi des données sur l’épuisement professionnel. Il valorise celles que les experts jugeront de bonne qualité. Cet outil encore en balbutiement est nécessaire, pour observer les données spécifiques aux soignants d’abord, mais aussi les organiser, les développer et les utiliser pour qu’elles soient fiables et valides.
Le tabou a été levé ces dernières années. Faut-il des moyens pour passer la vitesse supérieure ?
Pr É. G. : L’enjeu est majeur. Nous avons toujours besoin de moyens, c’est certain. Mais ce n’est pas le seul aspect. Nous butons sur une thématique difficile dès lors qu’il est plus aisé de dire : le malade c’est l’autre, et pour le soignant tout va bien, il fait ce qu’il a à faire. Nous devons apprendre à travailler la défaillance potentielle des professionnels de santé. Il faut avancer sur cette culture collective. Au niveau organisationnel, nous cherchons les outils pertinents pour former, accompagner, soigner et gérer les défaillances.
La Stratégie nationale avançait la nécessité pour les soignants de déclarer un médecin traitant. Faut-il relancer la campagne « Dis doc, t’as ton Doc » ?
Pr É. G. : Il faudrait reprendre cette initiative, mais pas seulement. Si les praticiens n’ont pas de médecin traitant, ce n’est pas uniquement parce qu’ils sont nuls et refusent de comprendre. La médecine du travail à l’hôpital existe mais les médecins la boudent. Avec «Dis Doc», un gros travail a été accompli, mais les résultats ne sont pas mirobolants. Donc, soit on les oblige vraiment, soit on les invite à comprendre à quoi un médecin traitant sert, et ce qu’il leur apporte vraiment. Accepter cette démarche, et dans l’autre sens d’accepter d’être médecin traitant pour un confrère, cela se travaille. Il faut donc continuer cette campagne, mais aussi identifier pourquoi les praticiens demeurent réfractaires. Plus globalement, un travail de recherche s’impose pour trouver un outil d’accompagnement pertinent, attractif et adapté aux besoins du médecin.
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