L’hypertonie sphinctérienne non neurologique peut découler de deux mécanismes différents, soit une contraction paradoxale du sphincter strié lors de la miction, soit un défaut de relaxation initial pour enclencher la miction.
Syndromes de Hinman et d’Ochoa
Le premier mécanisme, la contraction paradoxale du sphincter strié, se rencontre dans les syndromes de Hinman et d’Ochoa. Le syndrome de Hinman est un trouble de la miction acquis ou « appris » (learned voiding dysfunction), lié à l’éducation. Il regroupe différents critères, cliniques (incontinence diurne et nocturne, encoprésie, infections urinaires à répétition, sans obstacle anatomique et avec un examen neurologique normal), psychologiques (anxiété, timidité, introversion) et radiologiques (dilatation du haut appareil urinaire, parois vésicales trabéculées). Il y a un asynchronisme vésicosphinctérien lors du bilan urodynamique. Il est favorisé par certains facteurs environnementaux : invalidité, maladie chronique, divorce, désordre familial, syndrome de Münchhausen par procuration, consommation excessive d’alcool, père dominateur ou castrateur, sévices sexuels, enfant placé, troubles de l’attention.
À l’inverse, le syndrome d’Ochoa (ou syndrome uro-facial) est génétique, de transmission autosomique récessive. L’inversion de la mimique lors des cris et pleurs, donnant l’impression que la personne rit, et une lagophtalmie nocturne sont des caractéristiques cliniques qui doivent faire évoquer ce diagnostic. Les examens neurologiques cliniques et paracliniques ne retrouvent pas d’anomalies.
Rétention aiguë d’urine chez la femme jeune
Trouble primaire de la relaxation sphinctérienne décrit pour la première fois en 1985, le syndrome de Clare Fowler est la première cause de rétention aiguë d’urine chez la femme jeune, après élimination des causes neurologiques, iatrogènes ou obstructives. Il se caractérise par une fibrillation du sphincter externe de l’urètre secondaire, et une perturbation des canaux calciques hormonodépendante. Il touche exclusivement la femme entre la puberté et la ménopause, le plus souvent entre 20 et 35 ans (âge moyen 27,7 ans). La rétention d’urine est indolore, malgré l’importance des volumes (plus d’un litre). Ce syndrome survient dans deux tiers des cas suite à un facteur déclenchant (intervention chirurgicale surtout gynécologique, accouchement), mais des antécédents de troubles mictionnels sont retrouvés dans plus de 80 % des cas. Des kystes ovariens sont présents chez trois quarts des patientes atteintes, avec un syndrome des ovaires polykystiques dans la moitié des cas, témoignant de son caractère hormonodépendant. Lors des autosondages intermittents, premier traitement de ce syndrome, les patientes rapportent de façon assez caractéristique une sensation d’agrippement de la sonde. Le diagnostic peut être confirmé par une électromyographie du sphincter strié de l’urètre. La neuromodulation des racines sacrées, traitement de référence, donne de bons résultats dans 80 % des cas.
Dyssynergie fonctionnelle comportementale
Également appelée « syndrome du plancher périnéal spastique », la dyssynergie fonctionnelle comportementale est un diagnostic d’élimination, d’origine indéterminée. Elle est associée à certains troubles psychiatriques (anxiété, dépression, troubles obsessionnels compulsifs) et neurologiques fonctionnels (crises non épileptiques, faiblesse des membres inférieurs, troubles sensitifs et/ou de la mémoire). Le stress peut être un facteur déclenchant.
La thérapie comportementale, visant l’apprentissage d’une vidange complète et efficace de la vessie par relâchement complet du sphincter lors de la contraction vésicale, peut être efficace dans le syndrome de Hinman et dans le syndrome du plancher périnéal spastique. Elle n’est d’aucun bénéfice dans le syndrome de Fowler.
« En pratique, il faut toujours penser à rechercher des abus sexuels, qui sont un facteur de risque de troubles urinaires à type d’hyperactivité vésicale, de dysurie, d’énurésie ou encore d’infections urinaires à répétition », a souligné la Dr Caroline Thuillier, urologue à Grenoble. Les abus sexuels sont très fréquents et concerneraient de 12 à 33 % des filles et de 8 à 16 % des garçons à l’âge de 18 ans. Chez l’adulte, la question peut être posée clairement, avec empathie. Chez l’enfant, le praticien peut s’aider de questionnaires sur les traumatismes en général.
D’après les communications de la Dr Caroline Thuillier (Grenoble) et du Pr Xavier Gamé (Toulouse)
Article précédent
Féminisation de l’urologie : encore un plafond de verre !
Article suivant
Infection urinaire : la voie des phages
Cancers urologiques : une stratégie thérapeutique en pleine évolution
Empreinte carbone : l’urologie se met au vert !
Mieux gérer les complications chirurgicales
Féminisation de l’urologie : encore un plafond de verre !
Diagnostiquer l’hypertonie sphinctérienne non neurologique
Infection urinaire : la voie des phages
Dix ans de toxine botulique dans l’hyperactivité vésicale
Reprise chirurgicale de bandelettes sous-urétrales
Symptômes du bas appareil urinaire : gare à l’effet placebo !
Les SMS du congrès français d'urologie (CFU)
Dr Patrick Gasser (Avenir Spé) : « Mon but n’est pas de m’opposer à mes collègues médecins généralistes »
Congrès de la SNFMI 2024 : la médecine interne à la loupe
La nouvelle convention médicale publiée au Journal officiel, le G à 30 euros le 22 décembre 2024
La myologie, vers une nouvelle spécialité transversale ?