Médecine du travail : un parcours de soins au service du patient-travailleur

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Publié le 13/06/2024
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Médecin du travail et médecin traitant devraient coopérer beaucoup plus fréquemment dans l’intérêt du patient. Or, en pratique, il existe encore des freins par manque de connaissance et de contact entre les deux. Plusieurs sessions du congrès font le point.

En cas de souffrance d’un patient dans le cadre professionnel, le médecin du travail devrait être le recours naturel

En cas de souffrance d’un patient dans le cadre professionnel, le médecin du travail devrait être le recours naturel
Crédit photo : GARO/PHANIE

Du fait de l’importance des interactions entre la santé et le travail, la santé au travail devrait faire partie intégrante du parcours de soins tout au long de la vie. Mais les acteurs du parcours de soins et du milieu du travail ont parfois des points de vue et des représentations qui divergent concernant les relations entre santé et travail, ainsi que sur le rôle de chacun. « La santé au travail est un sujet majeur dans la vie de nos patients et donc, dans leur prise en charge. On est obligé de s’en occuper », souligne le Dr Cyril Bègue, médecin généraliste à Morannes-sur-Sarthe et maître de conférences à la faculté d’Angers. « Pourtant, les médecins généralistes ne connaissent pas toujours bien la place de la médecine du travail, qu’ils ont parfois tendance à minimiser… », déplore celui qui milite pour développer un lien entre ces spécialités.

La santé au travail est centrale dans la vie de nos patients

Dr Cyril Bègue

Les exemples sont nombreux, montrant les interactions entre pathologies et travail. « Un patient ayant fait un infarctus devrait pouvoir reprendre son travail dans un délai raisonnable, mais ce n’est pas toujours le cas… Il faudrait favoriser la collaboration entre cardiologue, médecin généraliste et médecin du travail, car le retour au travail est important sur le plan psychologique et social », souligne-t-il.

Au congrès, d’autres sessions portent notamment sur la souffrance au travail, pour laquelle le médecin du travail joue un rôle important car il peut peser sur l’employeur et les conditions de travail. Il peut agir en obtenant une adaptation ou un changement de poste, et éviter ainsi la désinsertion professionnelle. Le médecin du travail devrait donc être le recours naturel.

La grossesse également est une période clé, où de nombreuses précautions de santé sont prises… alors que la sécurité du poste de travail n’est pas systématiquement vérifiée.

Des idées reçues à balayer lors de la formation initiale

La relation entre médecin généraliste et médecin du travail est insuffisamment développée. « Après un arrêt de travail, le médecin traitant a la possibilité d’adresser son patient au médecin du travail, pour une visite de préreprise et un plan de retour au travail. Malheureusement, c’est encore insuffisamment fait : ils ne se connaissent pas, ou parfois même il n’y a pas de médecin du travail, ajoute le Dr Cyril Bègue. Le médecin du travail est un médecin comme les autres, avec ses particularités. Il doit s’intégrer dans le parcours de soins dans l’intérêt du patient, le médecin traitant doit donc échanger avec lui. »

Le médecin du travail est un médecin comme les autres

Dr Cyril Bègue

Les médecins généralistes peuvent ainsi inciter leurs patients à consulter le médecin du travail. Et les contacts peuvent se faire, dans les deux sens, toujours avec l’accord du patient-travailleur et dans son intérêt, aussi bien directement, par courrier ou par téléphone, que par l’intermédiaire du patient.

« Les freins mentionnés par les médecins généralistes sont liés au fait de ne pas connaître l’organisation de la médecine du travail, ou de ne pas identifier le médecin du travail, mais également à leurs représentations des médecins du travail qui auraient, selon eux, un manque d’indépendance vis-à-vis de l’employeur. Ce travail sur les représentations devrait être fait notamment au cours de la formation initiale », insiste le Dr Bègue, pour qui les médecins de soins et les médecins du travail doivent mieux se connaître : chacun a sa place dans la continuité des soins.

Leurs compétences sont complémentaires dans l’accompagnement du patient-travailleur à l’entrée, pendant et après sa carrière professionnelle. Plus largement, c’est avec tous les autres professionnels de santé que les médecins du travail doivent collaborer. La mise en place du dossier médical partagé (DMP) devrait favoriser ces échanges.


Source : Le Quotidien du Médecin