Pompe à insuline, boucle fermée, qu'en est-il pour le diabète de type 2 (DT2) des sujets âgés ? Tel était le thème de la conférence inaugurale du congrès « Perspectives Diabétologie et gérontologie » présentée par le Pr Yves Reznik, endocrinologue au CHU de Caen.
« La pompe peut être utilisée chez le patient DT2 âgé mal équilibré par un traitement optimisé avec multi-injections, répond le Pr Reznik. L'éducation thérapeutique doit être la plus simple possible, elle est adaptée à ses capacités. L'assistance d'une tierce personne (famille, infirmière) peut être nécessaire. »
Il est vrai que la prise en charge du DT2 ne peut pas être approchée chez les sujets âgés comme chez les plus jeunes en raison de l'espérance de vie limitée, des comorbidités, de la polymédication, de la vulnérabilité à l'hypoglycémie liée à l'âge et ses conséquences (chute, fracture, infarctus du myocarde, arythmie).
Mais les classes médicamenteuses non insuliniques peuvent poser des difficultés chez le sujet âgé : la metformine est à utiliser avec circonspection, les sulfonylurées et les glinides peuvent provoquer des hypoglycémies. Pour les nouvelles molécules, « les inhibiteurs de DPP4 sont intéressants, rapporte le spécialiste. Mais les analogues du GLP-1 peuvent favoriser une anorexie, des troubles digestifs et une sarcopénie ». Et quant aux inhibiteurs de SGLT2, on manque encore de recul pour leur utilisation chez la personne âgée.
« L'insuline est le traitement de prédilection chez les personnes polymédiquées à haut risque hypoglycémique. Une assistance infirmière quotidienne, voire pluriquotidienne est souvent nécessaire », explique ainsi l'endocrinologue. Tous les schémas d'insuline ne conviennent pas (en particulier du fait de la maniabilité). Et le choix de première intention est d'introduire une basale. Parallèlement à une titration bien conduite, on pourrait associer un analogue de GLP-1 ou un analogue rapide de l’insuline pour atteindre l’objectif glycémique.
Des limites à connaître
Qui plus est, les pompes présentent des plus-values chez le sujet âgé. « L'ajustement des doses d'insuline est plus fin avec programmation précise sur 24 heures, détaille le Pr Reznik. L'objectif final est d'améliorer l'HbA1c et de limiter les hypoglycémies. La pompe permet aussi de tracer les doses administrées, ce qui est utile face à un patient non observant ou pour détecter les erreurs de doses. »
La mise en place d’une pompe peut être limitée par le manque de dextérité pour manipuler les outils, une déficience visuelle, auditive, l'appréhension technologique ou l'isolement de la personne. Les troubles cognitifs sont aussi un obstacle, ce qui doit être recherché lors du bilan pré-pompe (score Moca). « Et quand des troubles cognitifs s'installent, le système de soins en France nous met en sécurité avec l’assistance paramédicale au traitement par pompe », indique le spécialiste de Caen. Par ailleurs, il faut être vigilant à ne pas imposer des outils dont la personne ne voudrait pas, au risque d'altérer sa qualité de vie.
Deux études, auxquelles a participé l'équipe du Pr Reznik, prouvent les bénéfices à attendre de la pompe chez le sujet âgé, l'une randomisée, l'autre en vraie vie. Dans l'étude OpT2mise, qui a évalué l'efficacité de la pompe dans le DT2 déjà traité par schéma optimisé avec au moins trois injections par jour, les bénéfices à six mois (HbA1c, temps dans la cible) ont été retrouvés dans le sous-groupe des patients de plus de 65 ans. Ces résultats ont été confirmés en vraie vie dans la cohorte de Caen/Normandie, avec une durabilité de l’efficacité de la pompe jusqu'à neuf ans et des besoins en insuline stables dans le temps.
La boucle fermée à l'horizon
Lors de la mise sous pompe, les objectifs éducatifs chez le sujet âgé sont ciblés sur les fondamentaux : savoir administrer un bolus, identifier les alertes (réservoir vide, occlusion, batterie faible), vérifier la délivrance d'insuline, le cathéter ou encore la validité de l'insuline, et bien sûr connaître la conduite à tenir lors d'une hypoglycémie.
Chez la personne âgée, la mise sous pompe est réalisée lors d’une hospitalisation pour ajuster les réglages sur cinq jours, pour être en conditions de sécurité. La mesure continue du glucose interstitiel avec le Freestyle libre présente un intérêt pour détecter les hypoglycémies.
Quant à la boucle fermée testée dans le DT2 par l'équipe britannique de Roman Hovorka, elle fait mieux que le traitement conventionnel par injections (temps dans la cible augmenté de 25 %) à dose d'insuline équivalente et sans davantage d'hypoglycémies. « L'algorithme est efficace, même en l’absence de bolus », constate le diabétologue. Le Pr Reznik participe par ailleurs à la Close Study, une étude française multicentrique sur la boucle fermée (Dexcom G6) chez les patients DT2 multi-injections non autonomes. « Cette étude réalisée avec un effectif limité de patients inclus – une vingtaine – constituera une preuve de concept », précise-t-il. La boucle fermée est une perspective intéressante, qu'il faudra continuer d'évaluer.
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