Après la révolution de l’immunothérapie par l’anti-CTLA-4, ipilimumab, les immunothérapies de deuxième génération par les anti-PD-1 nivolumab et pembrolizumab montrent des résultats jamais vus en immunothérapie. En particulier les réponses sont fréquentes et de longue durée (40 % de réponse, survie médiane non atteinte). Ces effets, mis en évidence dans des essais de phase 1, ont été jugés suffisants pour justifier des ATU (autorisation temporaire d’utilisation) de cohorte pour ces deux médicaments en France. Une avancée très récente concerne le nivolumab. En effet, les résultats d’une étude comparant le nivolumab à la carbazine chez des patients porteurs d’un mélanome métastatique montrent que le nivolumab est associé à une nette amélioration de la survie globale à 1 an (73 % dans le bras nivolumab vs 42 % dans le bras carbazine) et de la survie sans progression médiane (5,1 mois vs 2,2 mois), un taux de réponse objective de l’ordre de 40 % dans le bras nivolumab (1). L’étude a été interrompue précocement pour raison d’avantage évident dans le bras nivolumab en analyse intermédiaire.
Les combinaisons anti-BRAF et anti-MEK.
Des mutations du gène BRAF sont détectées dans plus de la moitié des cas de mélanome. Il s’agit majoritairement de la mutation V600E (près de 90 % des mutations BRAF observées dans les mélanomes). Cette mutation est à l’origine d’une activité enzymatique de la protéine correspondante, une kinase située en amont de MEK (Mitogen-activated Extracellular-signal-regulated Kinase) sur la voie des MAP Kinases, voie impliquée dans la progression du mélanome.
Le vemurafenib et le dabrafenib ciblent spécifiquement cette enzyme et inhibent sa fonction de façon très importante en cas de mutation V600E. Ces deux produits sont relativement proches en terme de survie sans récidive avec un petit avantage pour le dabrafenib probablement lié au fait que les patients avaient continué le traitement au-delà de la progression. Le vemurafenib a fait également la preuve d’une certaine efficacité sur les métastases cérébrales symptomatiques, en échec de traitement, dans une première étude ouverte incluant 24 patients ayant un mélanome avec mutation BRAF.
La moitié environ des patients ont une résistance primaire au vemurafenib et au dabrafenib et le développement d’une résistance secondaire semble inéluctable.
En outre, les effets secondaires des inhibiteurs de BRAF surviennent de façon quasi certaine après quelques mois de traitement et sont une préoccupation d’autant plus légitime que l’espérance de vie des patients s’allonge. À côté du risque de polypes, de nouveaux mélanomes BRAF sauvage et de cancers liés à des mutations RAS (cancer du côlon, cancer du pancréas, leucémie), un premier cas de syndrome de Lyell et plusieurs cas de coagulation intravasculaire disséminée ont été décrits. A signaler les effets oculaires du vemurafenib.
La trametinib et le cobimetinib présentent un mécanisme d’action légèrement différent. Ils agissent comme des inhibiteurs de MEK et sont indiqués chez les patients dont les tumeurs expriment les mutations BRAF V600E et V600K.
Trois essais de phase 3
Afin de retarder l’échappement au traitement et de diminuer la toxicité de chacun des produits et l’induction d’un nouveau cancer en inhibant la stimulation paradoxale de la voie MAPK dans des cellules portant l’allèle BRAF sauvage sous l’effet des inhibiteurs de BRAF, des études ont été menées associant un inhibiteur de BRAF et un inhibiteur de MEK.
Les résultats des trois premiers essais de phase 3 étaient très attendus et sont parus fin 2 013 et en 2 014. Ces associations augmentent significativement la survie sans récidive chez les patients ayant un mélanome muté : 9,9 mois pour la combinaison vemurafenib + cobimetinib contre 6,2 mois pour le vemurafenib seul (essai CoBrim) (2) ; 9,3 mois pour la combinaison dabrafenib + trametinib contre 8,8 mois pour le dabrafenib seul (essai Combi D) (3) ; et 11,4 mois pour l’association dabrafenib + trametinib comparée à 7,4 mois pour le vemurafenib seul dans le troisième (essai Combi-v) (4).
En outre, les résultats de ces essais montrent que l’utilisation de deux agents (un anti-BRAF et un anti-MEK) réduit la toxicité, et en particulier le nombre de cancers secondaires de la peau.
Dr Brigitte Martin
D’après les communications du Dr Thomas Jouary (Hôpital François Mitterrand, Pau et
Hôpital Saint-André, Bordeaux) et du Pr Philippe Saiag (Hôpital Ambroise Paré, Boulogne).
(1) Robert C. et al N Engl J Med, 2 014 Nov 16
(2) Larkin J. et al. N Engl J Med 2 014 Sep 29
(3) Long GV. N Engl J Med 2 014 Sep 29
(4) Robert C. et al. ESMO 2014
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