La chimioradiothérapie (CRT) pelvienne avec 5FU ou capecitabine avant chirurgie, qui constitue le traitement de référence depuis 20 ans dans les cancers du rectum localement avancés, réduit les récidives locales au prix d’une lourde comorbidité.
Limiter le recours à la radiothérapie
Présenté en session plénière, l’essai de phase 3 Prospect (1) avait pour objectif de montrer la non-infériorité d’une stratégie utilisant le FOLFOX modifié (FOLFOXm) en néoadjuvant, la CRT étant décidée selon la réponse tumorale, versus la CRT systématique, dans les cancers du rectum localement avancés (stade II/III). Les 1 128 patients étaient randomisés pour recevoir soit six cycles de FOLFOXm, soit une CRT avant la chirurgie suivie par une chimiothérapie adjuvante FOLFOX ou CAPOX. Dans le groupe FOLFOXm, si la régression tumorale était d’au moins 20 %, il n’y avait pas de CRT avant la chirurgie rectale. Par contre, cette CRT était indiquée lorsque la régression tumorale était inférieure à 20 %. Les sujets étaient âgés en moyenne de 57 ans. La tumeur se situait à 8,5 cm de la marge anale chez les patients du groupe expérimental et à 8,6 cm dans le bras témoin. Il y avait un envahissement ganglionnaire chez respectivement 60,3 % et 63,5 % des patients.
Dans le groupe FOLFOXm, la CRT a dû être administrée à 53 participants (9,1 %) en raison d'une réponse tumorale inférieure à 20 % ou d'une intolérance au FOLFOX. Les résultats sont pratiquement identiques sur le taux de survie sans maladie (SSM) à cinq ans (80,8 % dans le groupe FOLFOXm versus 78,6 %, HR = 0,92, p de non-infériorité = 0,0051) et similaires sur la survie globale (SG : 89,5 % versus 90,2 % HR = 1,04, p de supériorité = 0,84), avec moins de séquelles à long terme en particulier sexuelles, digestives ou neurotoxiques, et moins de complications postopératoires sévères en l’absence de CRT. « Cette stratégie de FOLFOXm en néoadjuvant, avec un recours sélectif à la CRT pelvienne, représente une option efficace et bien tolérée, dans les tumeurs du rectum localement avancées, remarque la Dr Deborah Schrag (New York). Néanmoins, les cancers à haut risque touchant la paroi pelvienne, qui nécessitent une radiothérapie, n’ont pas été inclus dans cet essai ».
Intensifier la chimiothérapie préopératoire
Les résultats à sept ans de l’étude Prodige 23 (2), promue par Unicancer GI, ont été présentés par le Pr Thierry Conroy (Nancy). L’essai était mené dans le cancer du rectum à un stade plus avancé (T3 ou T4, M0), dans lequel aucune avancée majeure n’avait été réalisée depuis 20 ans. Les premiers résultats avaient montré qu’une chimiothérapie néoadjuvante par le FOLFIRINOXm (suivie de la CRT, la chirurgie et de chimiothérapie adjuvante) ont significativement amélioré les résultats par rapport au traitement de référence (CRT, chirurgie et chimiothérapie adjuvante pendant six mois). Les 461 patients avaient été randomisés pour recevoir soit le traitement standard, efficace mais où il persiste un risque de métastases de 25 %, soit six cycles de FOLFIRINOXm précédant la CRT, puis la chirurgie, puis trois mois de chimiothérapie adjuvante. « On a gardé le même traitement standard mais avec trois mois de chimiothérapie intensifiée par FOLFIRINOXm avant l’opération, et trois mois de FOLFOXm après la chirurgie », résume le Pr Conroy.
Avec une médiane de suivi de près de sept ans, tous les résultats sont significativement supérieurs dans le groupe FOLFIRINOXm, avec une augmentation de 7,6 % en SSM (67,6 % versus 62,5 %, HR = 0,80), de 6,9 % pour la SG (81,9 % versus 76,1 % , HR = 0,73), de 9,9 % concernant la survie sans métastases (73,6 % versus 65,4 %, HR = 0,73), et de 5,7 % pour la survie liée spécifiquement au cancer (84,9 % versus 78,6 %). « Une chimiothérapie plus intensive intervenant précocement sur les micro-métastases est la stratégie à privilégier, conclut Pr Conroy. Ces résultats ouvrent la voie à des traitements plus personnalisés, moins mutilants et préservant la qualité de vie ».
(1) Schrag D et al. Abstract LBA2, session plénière
(2) Conroy T et al. Abstract LBA3504
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