Tabac et insuffisance cardiaque

Un effet direct sur la fonction myocardique

Publié le 05/11/2015

Parmi les complications cardiovasculaires du tabagisme, on parle essentiellement de l’infarctus du myocarde et de l’AVC, beaucoup moins de l’insuffisance cardiaque (IC). Parce qu’on ignore généralement l’effet direct du tabagisme sur la fonction myocardique ventriculaire, en particulier la fonction diastolique. Or, il existe un certain nombre d’études concernant l’action du tabac sur la fonction myocardique. Elles démontrent deux mécanismes possibles. Le premier est évident ; il s’agit de l’action toxique directe du monoxyde de carbone (CO) sur les cellules myocardiques. Une étude expérimentale sur le rat soumis à une inhalation de CO a montré l’apparition d’une dysfonction ventriculaire chez ces animaux. L’autre mécanisme est une vasoconstriction au niveau de la microcirculation coronaire par altération de la fonction endothéliale.

Il est intéressant de noter que dans les études la dysfonction diastolique peut survenir pour une seule cigarette fumée et qu’elle est immédiate. Cet effet, bien visible en échographie survient pour une très faible exposition et augmente avec la durée du tabagisme. Des études de cohortes se sont attachées à évaluer le risque de survenue d’une IC au cours du temps dans des études en population générale chez des fumeurs, des non-fumeurs et des ex-fumeurs. Le risque de développer une IC chez le fumeur est 1,5 à 2 fois plus important que le risque du non-fumeur. Le risque d’IC pour les ex fumeurs rejoint pour une partie d’entre eux celui des non-fumeurs. Cependant, une étude montre que pour les ex-fumeurs, ce risque dépend de la durée du tabagisme antérieur, le bénéfice de l’arrêt étant d’autant plus important que celui-ci aura été plus précoce.

Enfin, le bénéfice de l’arrêt du tabac sur l’IC est encore plus important chez les sujets déjà en IC. Par exemple, l’étude SAVE a mis en évidence, au terme d’un suivi moyen de 42 mois, une réduction de 43 % des décès toutes causes et de 35 % des décès et hospitalisations pour IC chez les sujets abstinents au sixième mois.

Entretien avec le Pr Daniel Thomas, département de cardiologie médicale, institut de cardiologie, groupe hospitalier Pitié-Salpêtrière, Paris
Dr Brigitte Martin

Source : Le Quotidien du Médecin: 9447