Sevrage du sujet âgé

Les dés ne sont jamais jetés !

Publié le 05/11/2015

Crédit photo : PHANIE

Le nombre de fumeurs âgés augmente. En France en 2014, 10 % des hommes et 7 % des femmes entre 65 et 75 ans fumaient. En 2010, ces taux étaient respectivement de 9 et 5 %. Le problème pèse inévitablement sur les plans médical et économique. En Chine, par exemple, 40 % des hommes et 20 % des femmes de plus de 60 ans fument. C’est dans ce pays un élément limitant de la croissance économique : sans sécurité sociale, c’est à la famille que revient la prise en charge financière.

S’il est évident pour chacun que le tabac a une grande part de responsabilité dans la survenue des maladies cardiovasculaires et cancéreuses, on connaît moins son implication dans la survenue de maladies rétiniennes comme la DMLA, le déclin cognitif, la maladie d’Alzheimer, l’ostéoporose et les fractures induites, toutes ces pathologies atteignant le sujet âgé et étant plus fréquentes chez les fumeurs que chez les non-fumeurs. Sans compter que les fumeurs âgés ont tendance à se désociabiliser ; parfois, le tabagisme s’accompagne d’une cyberaddiction et du mésusage d’autres substances addictives comme l’alcool.

Il n’est jamais trop tard

Plus le sevrage survient tôt dans la vie d’un fumeur, plus les bénéfices sont importants. Cependant, l’arrêt du tabac à 65 ans peut laisser espérer un surplus de longévité de 2 ans chez l’homme et de 4 ans chez la femme… Gain qui s’exprime aussi sur les plans physique et psychique, avec diminution de la morbidité. Et qui survient très rapidement, quasiment dès l’arrêt du tabac.

La prise en charge du sevrage chez la personne âgée est quasiment identique à celle de la personne plus jeune. Or le médecin hésite parfois à conseiller l’arrêt du tabac à partir d’un certain âge. C’est un tort. Une étude menée aux États-Unis dans un établissement pour personnes âgées a révélé que 88 % du personnel soignant estimaient que les pensionnaires ne désiraient pas arrêter de fumer alors qu’en interrogeant ces derniers, les investigateurs se sont aperçus que deux-tiers d’entre eux désiraient arrêter. Les soignants doivent percevoir et évaluer l’intention de l’arrêt pour proposer une aide efficace. Et, quand la motivation est là, la prise en charge est la même que celle d’un sujet plus jeune. Quand on compare la prise en charge pour sevrage dans deux populations, l’une de plus de 60 ans et l’autre de moins de 60 ans, les résultats sont meilleurs chez les sujets plus âgés.

À motivation égale

Il est important de noter que le tabagisme chez la personne âgée est favorisée par le stress et que certains éléments de compensation de déficits cognitifs légers pourraient être compensés par le tabac. En début du sevrage de la personne âgée, ces déficits légers pourraient s’accentuer et justifient le recours à une substitution nicotinique afin de les limiter et de faciliter l’arrêt du tabac.

Entretien avec le Dr Jean Perriot, pneumologue-tabacologue, CHU de Clermond-Ferrand
Dr Brigitte Martin

Source : Le Quotidien du Médecin: 9447