LE PATIENT lui-même est le meilleur juge de sa douleur, c’est sur ce principe qu’ont été conçues les échelles d’auto-évaluation. Toutes les études montrent que la seule hétéro-évaluation sous-estime la douleur d’autrui. Les échelles d’autoévaluation doivent être simples, rapides à réaliser et efficaces. Une trace écrite de cette évaluation doit être laissée dans le dossier pour permettre une analyse de l’évolution.
Utiliser des échelles d’autoévaluation
Les trois échelles d’autoévaluation EVA, EN et EVS sont d’utilisation facile pour mesurer l’intensité de la douleur. En pathologie aiguë, postopératoire par exemple, elles sont très utiles.
L’échelle d’évaluation analogique (EVA), la plus utilisée et la plus fiable, se présente sous la forme d’une réglette munie d’un curseur mobilisé par le patient en fonction de l’intensité de la douleur, de « pas de douleur » à « douleur insupportable ».
Avec l’échelle numérique (EN), le patient donne une note de 0 à 10 pour exprimer l’intensité de la douleur : 0 « pas de douleur » à 10 « douleur insupportable ».
Avec l’échelle verbale simple (EVS), le patient donne une série de qualificatifs pour évaluer la douleur (absente, faible, modérée, intense, extrêmement intense).
Douleurs neuropathiques
Dans le cas de douleurs chroniques, il faut recourir à des échelles spécifiques permettant de tenir compte des autres composantes de la douleur, tel que le questionnaire DN4 par exemple, outil simple pour rechercher les douleurs neuropathiques (DN).
DN4 comporte 4 questions représentant 10 items : caractéristiques de la douleur (brûlure, sensation de froid douloureux, décharges électriques), symptômes (fourmillements, picotements, engourdissements, démangeaisons), localisation dans un territoire présentant une hypoesthésie au tact ou à la piqûre, provocation ou indifférence de la douleur au frottement.
Cette échelle, très performante, est encore sous utilisée, comme en témoignent les résultats d’une enquête (1) réalisée, en 2011, auprès de 580 généralistes de l’Ile de France. Ils montrent l’écart entre la pratique et les recommandations sur la prise en charge en ambulatoire des douleurs neuropathiques éditées par la Société Française d’Étude et de Traitement de la douleur : 26 % des généralistes interrogés ne connaissent aucun élément de l’interrogatoire orientant vers une douleur neuropathique et 68,5 % ne connaissent aucun élément de l’examen clinique ; 56 % connaissent le questionnaire DN4, mais moins de 1 % l’utilisent ; 80 % disent évaluer la DN, 39 % utilisent un outil d’évaluation, seulement 13 % transcrivent cette évaluation dans le dossier.
Retentissement sur la vie quotidienne
Les douleurs chroniques ont un fort retentissement sur la vie quotidienne dont la nature et l’intensité doivent être évaluée : quel est le retentissement sur le sommeil, sur l’activité quotidienne, sur l’humeur ? Quelques items du Brief Pain Inventory peuvent enrichir l’évaluation.
Si le patient reçoit un traitement antalgique, le pourcentage de soulagement de la douleur (10 %, 20 %, 30 % …) est un bon indicateur évolutif.
L’utilisation de quelques uns de ces nombreux outils rend donc tout à fait possible, en quelques minutes, l’évaluation d’une douleur chez un patient en ville.
* Anesthésiste-réanimateur, hopital Raymond-Poincaré, Garches.
Dr Valeria Martinez : aucun lien d’intérêt.
(1) Altmeyer J, Martinez V. Douleurs neuropathiques : écart entre la pratique en médecine générale et les recommandations. Résumé : 116.TO32 SFEDT 2011.
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