En 2016, il y a eu 785 000 naissances en France et on dénombre environ 25 millions de femmes en âge de procréer.
D’une manière générale, l’utilisation de médicaments doit être évitée au cours de la grossesse. Cependant, le médecin généraliste est, presque quotidiennement, consulté en première intention pour prendre en charge une pathologie aiguë ou chronique chez une femme enceinte ou susceptible de l’être. De nombreuses questions se posent alors : une prescription médicamenteuse est-elle nécessaire ? Quels sont les risques ? Où trouver les informations ?
Il doit prendre tous les moyens à sa disposition pour vérifier que le médicament qu’il souhaite prescrire est bien autorisé chez la femme enceinte et qu’il ne lui fait courir aucun risque.
Justifier sa stratégie
« Il n’y a pas de véritable hiérarchie des normes, mais il doit y avoir pour le médecin prescripteur un souci permanent du respect du principe de précaution car c’est celui qui prescrit qui endosse l’entière responsabilité de sa prescription, même lors de la poursuite d’un traitement antérieurement prescrit par un spécialiste par exemple », a expliqué Didier Charles (juriste MACSF).
Le praticien doit toujours être en mesure d’expliquer sa prescription par référence à l’état de la patiente. Une prescription hors autorisation de mise sur le marché (AMM) n’est pas de facto considérée comme illégale et nécessairement fautive. En l’absence de RTU (recommandation temporaire d’utilisation), le praticien doit pouvoir justifier du caractère indispensable du médicament au regard de l’état de la patiente et de l’absence d’alternative médicamenteuse bénéficiant d’une AMM. La prescription doit être inscrite et motivée dans le dossier médical du patient.
Rubrique grossesse du RCP : savoir la lire
L’outil essentiel dont disposent les prescripteurs pour évaluer les conséquences éventuelles d’une exposition médicamenteuse pendant la grossesse est le résumé des caractéristiques du produit (RCP, rubrique grossesse, 4.6), disponible sur le site internet de l'agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) et publié dans le Vidal. Les informations contenues dans cette rubrique indiquent la conduite à tenir. Elles sont fondées sur l’ensemble des données animales et cliniques disponibles et ont été validées par l’AMM.
Or, la lecture de la dite rubrique n’est pas toujours très facile à comprendre car, les six libellés semblent voisins : « Ne doit jamais être utilisé… », « Ne doit pas être utilisé, sauf… », « Déconseillé au cours de la grossesse… », « À éviter au cours de la grossesse… », « Utilisation envisageable, si nécessaire », « Utilisation possible, si nécessaire… ». Toutes ces mentions semblent conduire finalement à ne pas utiliser le médicament chez la femme enceinte…
C’est ainsi que pour mieux comprendre la signification précise de chaque phrase, le Groupe de travail « reproduction, grossesse et allaitement » de l’ANSM et le Collège de médecin générale viennent d’élaborer un document explicatif : « Médicaments & Grossesse : Mode d’emploi ».
Le CRAT, la référence
Le centre de référence sur les agents tératogènes (CRAT) a été créé en 1975 afin d’apporter aux professionnels de santé et au grand public, une information actualisée et validée sur les risques tératogènes ou fœtotoxiques de divers agents en cours de grossesse. Il répond à un besoin car sur le terrain, la consommation médicamenteuse en cours de grossesse est bien réelle (3 à 13 médicaments par grossesse). Par ailleurs, 33 % des grossesses ne sont pas planifiées et elles peuvent donc être exposées par mégarde à des médicaments. L’analyse de la balance bénéfice/risque pour chaque produit et pour chaque patiente doit être rigoureuse.
« Il ne faut pas tout interdire, mais soigner les femmes enceintes malades avec des thérapeutiques efficaces bénéficiant des avancées contemporaines (éviter une perte de chance pour les mères) tout en protégeant au maximum l’embryon, le fœtus et le nouveau-né » a précisé la Dr Élisabeth Elefant (responsable de CRAT).
Le CRAT propose deux moyens d’information : un site internet (www.lecrat.fr) et un service hospitalier (tel 01 43 41 26 22) pour des conseils et des aides à la prescription ainsi que des consultations hospitalières.
D’après les communications du Dr Sylvain Bouquet (Collège de la médecine générale), de Christelle Ratignier-Carbonneil (directrice générale adjointe de l’ANSM), de la Dr Élisabeth Elefant (CRAT) et de Didier Charles (juriste, MACSF)
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