Quel est le poids économique de la prescription des médicaments à visée gastro-intestinale (MGI) en France ? Cette question est au cœur d'une étude présentée lors des JFHOD. « Nous avons soumis le texte pour une publication prochaine dans une revue d'hépato-gastroentérologie. Mais c‘est lors du congrès que nous présenterons les principaux résultats pour la première fois », indique le Dr Philippe Tuppin, épidémiologiste et expert en santé publique à la Caisse nationale d'Assurance-maladie (Cnam), qui a conduit ce travail en lien avec le Pr Jean-Marc Sabaté (gastroentérologue à l'hôpital Avicenne).
En moyenne 28 € remboursés par patient
Cette étude ne vise pas à évaluer l'importance de la consommation totale des MGI en France. En effet, dans bon nombre de cas, ces médicaments sont utilisés sans donner lieu à un remboursement. « Pour notre étude, nous avons utilisé le système national des données en santé pour 2016. Et nous avons mené notre analyse sur les médicaments ayant été remboursés par le régime général et les sections locales mutualistes. Ce régime et ces sections couvrent au total 57,7 millions de personnes soit 86 % de la population en France », indique le Dr Tuppin.
Il s'agit donc de données particulièrement exhaustives, qui permettent de dégager des tendances fortes dans la prescription des médicaments remboursés pour les symptômes gastro-intestinaux, repérés par la classification ATC (anatomique, thérapeutique et chimique). Avec un premier constat : en 2016, la moitié de la population sélectionnée a eu au moins une prescription remboursée. L'étude a en effet recensé 130 millions de prescriptions remboursées pour 25,7 millions d'individus. Le montant global remboursé atteint 707 millions d'euros, la moyenne par consommateur étant de 28 €. « Si on extrapole à l'ensemble de la population, on arrive à un montant estimé à 800 millions d'euros », indique le Dr Tuppin.
Plus de 400 millions dépensés pour les IPP
Parmi ces 25,7 millions de patients, 24 % se sont fait prescrire des inhibiteurs de la pompe à protons (IPP), 20 % des médicaments pour des troubles fonctionnels intestinaux, 10 % des médicaments contre la constipation dont la classe ATC inclut les préparations coliques, 10 % des antidiarrhéiques, anti-inflammatoires/infectieux intestinaux, 7 % des antiémétiques et antinauséeux, 6 % d'autres médicaments pour des troubles de l'acidité, 5 % d'autres médicaments pour ulcère et RGO (sucrafalte) et 2 % des antiacides.
La classe de produits, ayant donné lieu au montant de remboursement le plus élevé, est de loin celle des IPP : 423 millions devant les antidiarrhéiques (76 millions), les laxatifs (72 millions), les antiémétiques et antinauséeux (59 millions) et les médicaments des troubles fonctionnels intestinaux (47 millions).
89,5 % des prescriptions par les généralistes
Qui prescrit les médicaments pour des symptômes gastro-intestinaux ? Des généralistes dans l'immense majorité des cas puisqu'ils sont à l'origine de 89,5 % des prescriptions devant les gastroentérologues (3 %). À noter quand même que ces derniers délivrent 9,9 % des laxatifs remboursés incluant les préparations coliques. L'étude montre aussi que bien souvent, ces MGI sont prescrits avec d'autres classes de produits. Dans plus de la moitié des cas (53,8 %) la prescription d'IPP s'accompagne d'AINS et dans 33,6 % des cas de corticoïdes.
« L'étude permet aussi d'identifier des phénomènes de prescriptions importantes d'IPP pour certains patients alors qu'en principe ces produits sont indiqués pour des situations ponctuelles et pas comme traitements au long-cours, comme pour l'insuffisance rénale chronique terminale. Cela devrait conduire à des actions de sensibilisation confraternelles pour rappeler les règles de bonne pratique de ces IPP », indique le Dr Tuppin, en relevant aussi que 15 % des enfants de 2 à 9 ans ont reçu un antidiarrhéique.
D'après un entretien avec le Dr Philippe Tuppin, épidémiologiste et expert en santé publique à la Caisse nationale d'assurance-maladie (Cnam)
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