Neurologues, chirurgiens ou gériatres entre espoir et exaspération

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Publié le 26/11/2018
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« Je suis en poste depuis sept ans. J'ai passé le concours de la liste A trois fois et je ne l'ai pas eu. Dans ma spécialité, il y avait sept postes pour 300 candidats. Je n'ai pas de perspectives professionnelles. Je me bats pour une régularisation. »

Kylian est chirurgien de la main. Diplômé en Algérie, il occupe un poste de faisant fonction d'interne (FFI) au CHU de Bordeaux. Comme lui, de nombreux praticiens à diplôme hors Union européenne (PADHUE) sont dans une situation inextricable. Leur avenir professionnel a longuement été débattu au dernier congrès de la Fédération des praticiens de santé (FPS), le 17 novembre à Paris. 

Aux portes de la retraite

Dossiers sous le bras, entre espoir et colère, une cinquantaine de médecins ont exprimé leur ras-le-bol vis-à-vis d'une situation jugée « intenable » par beaucoup. Comme Kylian, plusieurs d'entre eux ont échoué au concours de la liste A avec des notes pourtant excellentes dans leur spécialité. C'est le cas du Dr Larisa Svechnikova, neurologue russe médusée. « J'ai passé le concours trois fois, témoigne-t-elle aussi. J'ai obtenu une moyenne de 15,20 sur 20 mais aucun poste car il n'y en avait que trois à pourvoir. Est-ce que, un jour, je vais intégrer un hôpital français ? Pour cela, je suis prête à tout ! »

Au-delà de la difficulté du concours, la réalisation de trois années d'exercice obligatoire est aussi pointée du doigt. Dans la salle, la tension est palpable. Les PADHUE jugent la période probatoire trop longue, les stages difficiles à dégoter. Les postes tombent en priorité dans les mains des chefs de clinique ou des internes. « J'ai travaillé trois ans, j'ai passé l'examen, mon dossier est passé en commission mais on m'a réclamé un diplôme universitaire et un stage de six mois en plus. La gériatrie est devenue une spécialité l'année dernière et ça fait un an que je ne trouve pas », illustre, amère, Nadia, praticien attaché associé gériatre en Île-de-France, diplômée en Algérie. Et de s'écrier : « Je ne suis pas la seule. Certains collègues attendent une validation depuis 15 ans, ils sont aux portes de la retraite ! »

Avide de reconnaissance

Les PADHUE s'inquiètent également du manque de débouchés pour les 500 praticiens de la liste C, supprimée en 2017, ayant échoué à l'examen ou ne l'ayant pas passé dans les délais impartis. Si rien ne change, au 31 décembre 2018, ces praticiens devront partir. En dépit du énième sursis qui devrait leur être accordé, les médecins de terrain doutent. Ils craignent une fois encore des « mesurettes »  qui ne résoudront rien à moyen et long terme. « Ça fait dix ans qu'on entend le même discours ! », fulmine un médecin dans la salle. Un autre : « Ça fait plusieurs années qu'on annonce une loi pérenne pour sécuriser notre statut mais rien. Toujours rien. Comment être sûr qu'il y en aura bientôt une ? À quand, enfin, la reconnaissance ? »

*Ce prénom a été modifié.

 

Sophie Martos

Source : Le Quotidien du médecin: 9705