La très récente diffusion de techniques de biologie moléculaire pour tester la sensibilité bactérienne des souches d’Helicobacter pylori et l’évolution de la résistance aux macrolides justifiaient la révision du rapport de consensus européen de Maastricht 2017.
Parue en août 2022, la nouvelle feuille de route a été détaillée pour la première fois lors du congrès européen de gastroentérologie (30th United European Gastroenterology Week, 8-11 octobre 2022, Vienne, Autriche).
La nouveauté concerne plutôt le traitement, une fois la présence du pathogène documentée, avec la recommandation de tester la sensibilité de la souche aux antibiotiques. En effet, alors qu’elle nécessitait des cultures bactériologiques difficiles et réservées à quelques centres experts, les techniques de biologie moléculaire sont depuis peu largement accessibles, permettant une évaluation fiable de la sensibilité de H. pylori aux macrolides, aux quinolones, à la rifampicine ainsi qu’à la tétracycline.
Tout en poussant le plus possible à la recherche de la sensibilité pour adapter l’antibiothérapie, le consensus définit cependant deux cas de figure si, malgré tout, la souche ne peut être testée. La stratégie thérapeutique est alors probabiliste et dépend du niveau de résistance aux macrolides dans le pays et même la région considérés. Ainsi, dans les zones où la résistance aux macrolides dépasse 15 % – comme c’est le cas en France avec 20,9 % en 2021 –, une quadrithérapie bismuthée est recommandée en première intention, composée d’oméprazole, de sel de bismuth, de tétracycline et de métronidazole. Si la plupart des études ont montré que la durée de traitement pouvait être de 10 jours, les experts recommandent pour leur part 14 jours. En cas de sensibilité à la clarithromycine, un traitement « concomitant » de 14 jours est recommandé associant IPP, amoxicilline, clarithromycine et métronidazole.
En cas d’échec de l’un de ces deux traitements de première ligne, l’autre option devra être prescrite en seconde ligne, ou éventuellement un traitement à base de quinolones. Au-delà de ces deux lignes, il est impératif de disposer d’une analyse de la sensibilité aux antibiotiques afin d’opter pour des traitements à base de quinolones ou de rifampicine. Enfin, l’éradication doit toujours être vérifiée au minimum un mois après l'antibiothérapie (hors prise d’IPP, arrêtés depuis au moins 14 jours au moment du test).
Dyspepsie, la stratégie « Test and treat » toujours d’actualité… sauf en France
Les experts réitèrent par ailleurs leur préconisation de la stratégie « Test and treat » (tester et traiter) en cas de symptômes dyspeptiques non explorés chez des patients de moins de 50 ans et sans signes d’alarme. Ils estiment que l’endoscopie n’est pas nécessaire dans l’investigation initiale de la dyspepsie dans les zones à faible prévalence d’H. pylori.
Ensuite, si le test diagnostique non invasif (sérologie, test respiratoire à l’urée, test antigénique dans les selles) est positif, cela doit déclencher un traitement d’éradication d’H. pylori. Les patients dont les symptômes étaient liés à un ulcère gastro-duodénal ou à une dyspepsie associés à H. pylori seront soulagés par son éradication. Seuls ceux dont les symptômes persistent seront orientés vers l’endoscopie digestive. En cas d’examen endoscopique normal et de persistance de symptômes dyspeptiques malgré l’éradication, le diagnostic de dyspepsie fonctionnelle pourra être retenu.
Cette stratégie n’est pas validée en France à ce jour, en raison du faible coût de l’endoscopie digestive dans l’Hexagone. Ce point de divergence implique que ces recommandations soient validées et adaptées à la situation française. Tout le monde s’accorde en revanche pour recommander systématiquement une endoscopie digestive haute chez les patients dyspeptiques âgés.
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