La France est un pays précurseur du dépistage néonatal. Depuis 1972, cinq maladies ont été ciblées, 35 millions d’enfants dépistés et 24 000 diagnostiqués positifs sur la phénylcétonurie, l’hypothyroïdie congénitale, la drépanocytose, l’hyperplasie congénitale des surrénales et la mucoviscidose. Presque 50 ans plus tard, le 1er décembre 2020, une sixième maladie est venue compléter le programme : le déficit en Medium-Chain-Acyl-CoA-Déshydrogénase (MCAD).
Cette maladie est caractérisée par la difficulté de l’organisme à utiliser les acides gras comme source d’énergie. Le risque majeur : des hypoglycémies et des troubles cardiaques et neurologiques aigus graves chez le nouveau-né lors des périodes de jeûne (espacement des allaitements et des biberons). Des conseils hygiénodiététiques pour rythmer l’alimentation permettent d’améliorer la maladie, laquelle s’amoindrit chez l’enfant et l’adolescent.
Ces dépistages néonataux, non obligatoires, sont proposés systématiquement à tous les nouveau-nés, excepté pour le dépistage de la drépanocytose qui est recommandé dans un contexte familial à risque. Quelque 750 000 naissances sont ainsi concernées annuellement. La surdité bilatérale néonatale est également dépistée depuis 2014. « L’excellente adhésion de la population au dépistage est confirmée par le faible nombre de refus, de l'ordre de 300 à 350 par an », souligne le Pr Emmanuel Rusch, responsable du Centre national de coordination du dépistage néonatal (CNCDN).
Il n'y a pas de controverse scientifique : des critères internationaux définissent les maladies pouvant faire l’objet d’un dépistage néonatal. Il s’agit généralement de maladies rares (cf encadré) lesquelles, pour la plupart, engagent le pronostic vital. Ces maladies doivent pouvoir être dépistées avec des outils robustes, sensibles et spécifiques. « Des recommandations d’hygiène de vie ou des approches thérapeutiques doivent exister pour améliorer significativement l’espérance de vie et la qualité de vie de l’enfant », précise le Pr Rusch.
Une coordination rattachée au CHU de Tours
Jusqu’en juillet 2018, le dépistage néonatal reposait sur des associations régionales avec une supervision nationale. Son organisation a évolué avec le développement des technologies modernes pour les mesures biologiques (spectrométrie de masse). D’où son ancrage à des structures régionales (CHU de France) pourvues d’un plateau technique performant pour le dépistage néonatal. Le CHU de Tours a été retenu en juillet 2018 par les autorités sanitaires comme le CNCDN pour cinq ans avec le Pr Emmanuel Rusch comme coordonnateur et référent Santé publique.
Le CNCDN vient en soutien des structures régionales pour répondre à leurs besoins et interagit avec deux commissions nationales. L’une est tournée vers la biologie pour « l’évolution du buvard » (support de prélèvement), la définition des arbres décisionnels de dépistage et des seuils de positivité, et l’autre vers l’épidémiologie pour faciliter la mise en place d’une base nationale de dépistage néonatal modernisée et pour proposer des études de recherche.
Le CNCDN étudie actuellement la faisabilité de l’extension du dépistage néonatal à sept erreurs innées du métabolisme graves et héréditaires, dont l'impact sur la morbi-mortalité en fait une problématique de santé publique.
La distinction entre diagnostic prénatal et néonatal ne se pose pas aujourd’hui face à ces maladies dont la prise en charge permet dans la plupart des cas une évolution satisfaisante des nouveau-nés. « Mais elle pourrait être soulevée dans un avenir plus ou moins lointain face à de nouvelles pathologies, souligne le Pr Rusch. Un débat qui sera alors à partager avec les parents et plus globalement avec la société ». Si la France a été précurseur dans les années 1970, elle a été rattrapée progressivement et certains pays européens ont inscrit entre 10 et 15 maladies dans leurs recommandations.
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