« Je suis une fervente partisane de la démocratie sanitaire, mais je siffle la fin de la récré, car il y a des enfants qui meurent (...) On parle d'un risque sanitaire ! » a répondu Agnès Buzyn à Nicolas Demorand qui l'interrogeait sur le bien-fondé et la pertinence d'une loi rendant les 11 vaccins pédiatriques obligatoires (et non seulement le DTP comme aujourd'hui) dans un contexte de responsabilisation croissante d'un patient toujours plus expert, au cours de la matinale radio de France inter du 15 septembre.
La ministre de la Santé a défendu l'idée que « la contrainte vise à rendre la confiance ». « Le manque de confiance est véhiculé par des informations qui circulent sur les réseaux sociaux. Il faut lutter contre les fausses informations. C'est compliqué pour les pouvoirs publics », a-t-elle reconnu. Cette défiance à l'égard de la vaccination conduit à faire tomber le taux de couverture vaccinale à 80 % pour les vaccins fortement recommandés (alors que l'OMS préconise un taux de 95 %). Les sondages montrent même une éventuelle baisse du taux de vaccination contre le DTP de 15 % si ces valences n'étaient plus obligatoires, a précisé Agnès Buzyn, jugeant la situation « inquiétante ».
Appelant à faire œuvre de pédagogie, la ministre de la Santé a montré la voie, en rappelant les arguments en faveur d'une vaccination universelle (comme elle l'a fait sur Cnews, fin août). « Les 15 % d'enfants encore non vaccinés (outre le DTP) doivent l'être pour protéger l'ensemble de la population, notamment les nourrissons, les enfants qui souffrent de cancer et de leucémie, immunodéprimés, qui peuvent mourir de ces maladies. Il y a 10 enfants morts de la rougeole ces dernières années qui n'étaient pas vaccinés. Il y a 2 000 cas d'hépatite B chez nos jeunes », a-t-elle dit.
Clause d'exemption ou non, l'exigibilité demeure
Les vaccins ne sont pas dangereux, a-t-elle continué, la preuve par l'exemple : « 80 % des enfants français reçoivent les 11 vaccins. Et ils ne sont pas malades, ils ne souffrent d'aucune maladie ». Interpellée sur la présence d'aluminium comme adjuvant dans certains vaccins : « Nous en mangeons (par ailleurs) tous les jours de très grandes quantités. (Pour les vaccins) Il n'y a aucun risque, tous les rapports le montrent », a-t-elle réagi.
La ministre a estimé nécessaire d'aider les médecins, avec des outils pédagogiques, à expliquer la vaccination à leur patientèle. « Lorsqu'un médecin prend le temps, les parents adhèrent plus facilement », observe-t-elle.
Quant à l'éventuelle introduction d'une clause d'exemption, comme suggérée dans les conclusions de la concertation citoyenne, présidée par le Pr Fischer, l'analyse juridique est toujours en cours, a répondu le Pr Buzyn. Clause d'exemption ou non, les vaccins seront exigibles et exigés pour toute entrée dans la vie en communauté, a-t-elle ajouté.
La ministre a aussi fait part de son souhait de lancer une mission sur les médicaments, pour éclairer un paradoxe français : la défiance à leur égard, en même temps qu'une consommation très importante.
Évaluation de l'application de la loi Leonetti Claeys
« Je comprends à titre individuel » le choix d'Anne Bert, écrivaine atteinte de la maladie de Charcot, qui a décidé de recourir à l'euthanasie en Belgique, a affirmé Agnès Buzyn. Néanmoins, la ministre a dit vouloir d'abord évaluer le déploiement sur le terrain de la loi Leonetti Claeys sur la fin de vie, avant d'envisager toute évolution, éventuellement dans le cadre de la révision des lois de bioéthique, prévue en 2018. « Une société doit être mature pour prendre certaines lois », a-t-elle commenté. « Quelle est votre intime conviction sur le sujet » ? « Je ne suis pas sûre que cela ait un intérêt pour les Français » a répondu la ministre à Nicolas Demorand.
Et de faire preuve d'une grande prudence dans sa réponse à Marie-Geneviève Lambert, sœur de Vincent Lambert, qui l'interpellait plus tard sur le rôle que pouvaient avoir les pouvoirs publics à l'égard de l'hôpital qui tarde à reprendre la procédure collégiale ordonnée par la justice. « Ce n'est pas un sujet à traiter à l'antenne d'une radio. Je le traiterai directement avec les personnes concernées », a-t-elle promis.
Article précédent
Hépatite B : le plan de bataille des autorités pour vacciner les étudiants de santé
Article suivant
La couverture vaccinale ne remonte pas dans le monde, déplorent l'OMS et l'UNICEF
À l'IAS 2017, un pas de plus vers le vaccin contre le sida
Obligation vaccinale : la Société française de santé publique veut des mesures d'accompagnement sans délai
Vaccins : pour une critique constructive
Origine et solutions
11 vaccins obligatoires : une entrée en vigueur prévue au 1er janvier 2018
La rougeole a fait 35 décès au cours de ces 12 derniers mois en Europe
Non vaccinée, une jeune fille est décédée de la rougeole en PACA
Hépatite B : le plan de bataille des autorités pour vacciner les étudiants de santé
Vaccination obligatoire : Agnès Buzyn « siffle la fin de la récré »
La couverture vaccinale ne remonte pas dans le monde, déplorent l'OMS et l'UNICEF
Dr Daniel Lévy-Bruhl : « L'enjeu : obtenir un taux de couverture élevé »
Épidémie de rougeole en Italie : près de 4 500 cas dont 3 décès chez des non-vaccinés en 2017
Bénéfices attendus sur la couverture vaccinale
Aluminium dans les vaccins : rien pour l'instant ne remet en cause la balance bénéfice risque
Journée nationale de lutte contre les hépatites B et C : aller au plus près des populations « vulnérables »
Calendrier, absence de sanction, exigibilité... L'obligation vaccinale par le menu
Guyane : premier cas de fièvre jaune depuis près de 20 ans, une personne décédée
Première preuve d'efficacité vers un vaccin gonocoque
Agnès Buzyn : « Nous sommes dans l’irrationnel le plus total », à propos de la nocivité des adjuvants vaccinaux
BCG, méningocoque, HPV... les recommandations du calendrier vaccinal 2017
Hépatite A chez des HSH à Rouen : les leçons d'une épidémie
Plus de 9 millions d'Européens souffrent d'hépatite
Chez les ados dans Calvados et dans l'Orne, mauvaise couverture vaccinale et mauvaise perception du risque
Italie : un enfant de 6 ans atteint de leucémie meurt des complications liées à la rougeole
La non-vaccination en partie responsable du retour de la coqueluche aux États-Unis
Un vaccin contre la fièvre typhoïde envisagé pour l'immunisation à grande échelle
Hépatite A et B : AIDES lance un appel à la vaccination à l'approche de l'été
Savoir pour agir
Vaccins, prévention : l'Afrique et l'Asie misent sur les nouvelles technologies
Vaccin contre la grippe à haute dose : moins d'hospitalisations pour maladies respiratoires chez les personnes âgées, même les plus fragiles
Transition de genre : la Cpam du Bas-Rhin devant la justice
Plus de 3 700 décès en France liés à la chaleur en 2024, un bilan moins lourd que les deux étés précédents
Affaire Le Scouarnec : l'Ordre des médecins accusé une fois de plus de corporatisme
Procès Le Scouarnec : la Ciivise appelle à mettre fin aux « silences » qui permettent les crimes