Les corticoïdes représentent le traitement le plus classiquement impliqué dans l’ostéoporose iatrogène mais de nombreuses autres molécules peuvent être en cause, avec un impact sur l’os souvent intriqué avec celui de la pathologie sous-jacente.
➔ Chez les femmes traitées par anti-aromatases pour cancer du sein, après trois ans de traitement, le risque global de fracture est multiplié par 1,38, celui de fracture de hanche par plus de 3. Les recommandations françaises préconisent donc, avant tout traitement, d’évaluer les facteurs de risque d’ostéoporose et de chutes et de réaliser une ostéodensitométrie. Un traitement anti-ostéoporotique est proposé en cas d’antécédent personnel de fracture sévère de faible traumatisme, de T-score ≤ -2,5 au niveau lombaire ou fémoral, ou de T-score entre -1 et -2,5 lorsque le score de Frax est augmenté. Les biphosphonates, qui préviennent la perte osseuse, voire permettent un gain de masse osseuse, seront alors prescrits en première intention, par voie orale ou en perfusion. Le dénosumab apporte un gain de DMO au niveau lombaire et fémoral et a un effet antifracturaire.
➔ On retrouve le même risque d’ostéoporose chez l’homme après une thérapie de privation androgénique (TPA) : la prévalence est de 10 à 40 % et augmente à tous les sites avec l’âge et la durée du traitement. Le risque de fracture avec les agonistes de la GnRH est dose-dépendant et rejoint celui lié à l’orchidectomie à forte dose (risque multiplié par 1,5 environ). Globalement, le risque de fracture sous TPA est augmenté de 20 à 60 % et la prévalence des fractures vertébrales de 37 %. Il est recommandé de traiter les hommes ayant des antécédents de fracture ostéoporotique sévère et/ou ayant un T-score < -2,5.
En cas de T-score entre -1,5 et -2,5, la décision thérapeutique repose sur l’existence d’au moins deux autres facteurs de risque (âge ≥ 75 ans, antécédent personnel de fracture, IMC < 19 kg/m2, comorbidités, corticothérapie en cours et chutes à répétition). Les biphosphonates oraux ou intraveineux sont à prescrire en 1re intention ; le dénosumab peut être envisagé en cas de contre-indications ou d’intolérance.
➔ Sous IPP ou anti-H2, le risque de fractures, en particulier de l’extrémité supérieure du fémur et des vertèbres, est augmenté dans les trois quarts des études. Selon les méta-analyses, le risque de fracture est multiplié par 1,22 pour la hanche et 1,5 pour les fractures vertébrales. Il augmente avec la durée du traitement. Il peut être lié en partie à la pathologie sous-jacente mais aussi à la baisse de l’absorption du calcium, et du stock de vitamine B12, ce qui favorise les chutes, l’élévation de la gastrinémie et de la PTH.
➔ Le risque de fracture est également augmenté avec les héparines de bas poids moléculaire (HBPM), les AVK mais pas avec les AOD. La vitamine K interviendrait dans la différenciation des ostéoblastes en ostéoclastes, et le risque de fracture après un an d’AVK est multiplié par 1,7 au niveau vertébral, mais augmenté aussi au niveau des poignets et des côtes. « Mais il peut aussi exister une association entre fracture et maladie initiale, ainsi la fibrillation auriculaire semble multiplier par deux le risque de fractures », avertit le Pr Karine Briot (Paris).
➔ Les antiépileptiques multiplient par deux à six le risque de fracture. La perte osseuse est liée à l’impact des antiépileptiques inducteurs enzymatiques – phénytoïne, carbamazépine, topiramate… – sur le métabolisme de la vitamine D mais aussi au risque de chutes. Le risque augmente avec l’âge, un IMC bas, la durée de l’épilepsie, son caractère généralisé et le nombre de molécules. Il n’est pas augmenté avec la lamotrigine ni les nouveaux antiépileptiques. Une ostéodensitométrie est préconisée en cas de prise de deux inducteurs enzymatiques depuis plus de deux ans ou d’un seul associé à d’autres facteurs de risque.
➔ Les antidépresseurs augmentent, chez la femme de plus de 50 ans, le risque de fracture, qui est multiplié par plus de 2 sous IRS, de 1,2 sous tricycliques. Mais une partie du risque est associée à la dépression elle-même, la consommation d’alcool et de tabac, la perte de poids, la sédentarité, les comorbidités et les chutes.
➔ Le risque fracturaire chez le diabétique est plus complexe à appréhender puisque le diabète lui-même entraîne une fragilité osseuse. Il semble en fait que la plupart des antidiabétiques sont neutres sur la densité minérale osseuse, voire l’augmentent (comme les iDPP-4 ou les iSGLT2) sauf les thiazolidinediones, qui diminuent la résistance osseuse.
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