Il ne fait aucun doute que l'investiture d'une femme constitue un progrès colossal ; que Mme Pécresse, tout en durcissant ses positions antérieures au point de les faire ressembler à ce que propose Éric Ciotti, s'est emparé d'un créneau populaire ; qu'il faut instamment la prendre au sérieux ; qu'elle a largement démontré ses qualités de politicienne, y compris sur le plan de l'autorité ; qu'elle a déjà le langage présidentiel ; et qu'elle est parfaitement capable de l'emporter sur Emmanuel Macron.
On s'est aussi perdu en félicitations adressées à Christian Jacob, le président de LR, au sujet de l'excellent procédé qu'il a mis au point pour faire désigner sa candidate. Elle-même, dans son discours d'investiture, a estimé que Les Républicains étaient désormais « rassemblés » et « unis », ce qui est aller un peu vite en besogne, car le second tour chez LR a montré qu'il existait une minorité, favorable à M. Ciotti et à ses idées, et qui représente 39 % des votants. M. Jacob n'a pas jugé utile d'organiser une primaire ouverte à tous les volontaires, car il se souvenait d'un précédent fâcheux, celui qui a désigné François Fillon, au détriment de MM. Juppé et Sarkozy. Mais le « clan Ciotti » existe et il demande plus que ce propose Mme Pécresse. Dès le 5 décembre, M. Ciotti s'est déclaré mécontent du programme de Mme Pécresse et estime qu'elle n'a pas fait le bon choix programmatique, laissant entendre qu'il envisage de faire bande à part, avec ses 39 %.
Un candidat tout trouvé
Les Républicains risquent donc de se diviser pendant une campagne qui a commencé par une pré-campagne sur des chapeaux de roue et sera particulièrement hargneuse. Je veux bien que Valérie Pécresse soit une professionnelle de la politique et qu'elle ne se laissera pas dépasser par la surenchère, mais elle va avancer en terrain miné, avec une gauche assurée de perdre qui n'en sera pas moins agressive et une Marine Le Pen qui est persuadée que 2022, c'est son tour. L'autre des avantages de Mme Pécresse, c'est qu'elle semble capable d'empêcher le match Macron-Le Pen, mais elle doit encore le prouver.
En effet, ce n'est pas parce que, au lieu d'attaquer la gauche, LR a décidé de s'en prendre seulement à Macron, et de quelle manière, que le président et son entourage vont rester passifs face à la droite. Il a déjà démontré qu'il était en mesure de marcher sur ses plates-bandes et d'engranger des suffrages et il continuera à le faire. La droite, c'est aussi Édouard Philippe et son mouvement Horizons. C'est un peu le MoDem, c'est Agir et d'autres. Les Républicains se sont plaints trop souvent d'avoir été privés des votes d'une partie de leur électorat qui leur a préféré Macron pour croire que désormais, pas une seule voix de LR n'ira au président sortant.
S'il est vraisemblable qu'Éric Zemmour ne franchira pas le cap du second tour, rien ne dit que les Pécresse-sceptiques, qui ont voté en faveur de M. Ciotti, ne rallieront pas le Rassemblement national lors de la présidentielle. On commencera à le savoir lorsque paraîtront de nouveaux sondages sur la cote de popularité de Mme Pécresse. On admettra en tout cas que le choix d'une femme par LR, ce parti de caciques, et la présence de trois femmes dans la compétition sont l'honneur de la France même si celle qui représente le RN n'est pas notre tasse de thé. Il n'y a que Zemmour pour crier à la cantonade qu'une femme ne peut pas gagner une élection présidentielle ; la plus belle riposte serait d'élire cette femme présidente.
Il faut ajouter que Valérie Pécresse a suivi une stratégie très efficace. Elle a fait le constat d'une France indignée par l'immigration et l'insécurité et ainsi, elle a coupé l'herbe sous le pied de M. Ciotti. Toutefois, il serait absurde d'ignorer un électorat qui ne la rejoint pas dans ces deux choix et qui serait frustré s'il n'y avait pas un candidat pour le représenter. Ce peut être Emmanuel Macron, Yannick Jadot ou Anne Hidalgo. On a beau se méfier des sondages, il me semble que les deux derniers ne passeront pas le premier tour et que, si un électeur ou une électrice préfèrent la sobriété dans les domaines régaliens, ils disposent d'un candidat tout trouvé.
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