Le président de la République a accompli un exploit. Il n'a réellement fait campagne que pendant quinze jours ; il a trouvé une majorité dans un paysage politique en fusion avec deux adversaires, Le Pen et Jean-Luc Mélenchon qui, associés à Zemmour et à Dupont-Aignan, rassemblent 52 % des électeurs. Il ne peut pas empêcher les gauches et les droites d'envisager des coalitions capables de faire un enfer de son second mandat. Mais ce sont là les objections de tous ceux qui ont perdu. Son analyse de départ, celle qui l'a conduit à la magistrature suprême, a été largement ratifiée ; loin de ressembler à un feu de paille, sa candidature en 2017 lui a ouvert un boulevard électoral. Loin de l'abaisser, de le minoriser, de l'écarter, les critiques dont il a été abreuvé, souvent avec cynisme et perversité, l'ont renforcé.
La puissante mécanique des institutions de Vè République lui a permis de l'emporter en se servant des divisions de la gauche et de la droite. Elles veulent s'unir ? Pourquoi pas ? Encore faut-il qu'elles se redressent alors que la mêlée électorale a laissé à droite, à gauche et chez les écologistes un champ de ruines. Les partis classiques doivent maintenant se livrer à une profonde réflexion, qui ne sera pas terminée avant les élections législatives. Le RN n'est pas sûr de s'appuyer sur le réseau d'implantations locales dont il bénéficie pour faire élire des députés et encore moins pour obtenir une majorité ; le PS est en lambeaux et ne survivra pas sans une complète refonte de ses méthodes et de son personnel ; EELV risque de tomber dans les oubliettes et laisser la gestion de l'écologie à la prochaine majorité.
Macron salué dans le monde
Le président réélu n'a pas nié que la France traverse une crise profonde, Il a fort bien compris que la grogne nationale ne vient pas seulement des invectives qu'on ne cesse de lui lancer et qu'il faut l'attribuer aux inégalités et aux difficultés financières que rencontre la classe moyenne. Il a été élu par une droite des villes que Le Pen rebute et qui vient de LR. Une classe dont il protège les intérêts parce qu'elle est indispensable aux progrès de la société française. Mais il est temps pour lui de se pencher sur le sort de millions de citoyens exaspérés qui croient que l'extrémisme est une solution.
Salué par le monde entier, le triomphe de Macron lui permet de changer son programme en profondeur et d'y introduire des notions de gauche, même s'il a été élu par la droite. Le cheminement de sa pensée risque d'être contrarié par ceux de ses proches qui penseront peut-être qu'on ne tourne pas le dos à une victoire et qu'on ne donne pas satisfaction à ceux qui vous insultent. Mais la réconciliation nationale est devenue un impératif catégorique. Il faut apaiser les colères, rassurer des gens que la violence ambiante, la pandémie et la guerre en Ukraine a littéralement affolés. C'est un devoir : l'opposition, bien entendu malveillante sur le long cours, explique, à juste titre, qu'il n'y aura pas toujours un wonder boy pour calmer le peuple et que, même si un autre président aurait rencontré les mêmes difficultés que celles de Macron, on ne peut réduire le RN et la LFI qu'en satisfaisant au moins partiellement les revendications de leurs électeurs, même si elles ne sont pas toujours soutenues par la raison.
La France a bien voté, en ce sens qu'elle s'est épargné, à elle et au reste du monde, un terrible déshonneur si elle avait élu Marine Le Pen. On a tout le temps de réfléchir à la prochaine majorité et à la recomposition de l'Assemblée nationale. La République en marche a montré sa ténacité, elle se présente aujourd'hui comme un havre, elle est du côté de l'espoir, elle luttera avec vigueur contre la tentation totalitaire. Macron n'est pas un héros. Il ne fait pas de miracles. Il a seulement choisi de mettre un plus de vertu dans son action politique et un peu moins de cynisme et de perversité.
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