Emmanuel Macron s'étant dépensé sans compter pour tenter de trouver une alternative diplomatique au projet d'invasion de Vladimir Poutine risque d'être blâmé pour n'avoir pas empêché le résultat négatif de ses efforts. À l'inverse, il peut être encouragé d'avoir essayé avec sa fougue habituelle de persuader Poutine que la Russie et l'Ukraine pouvaient faire l'économie d'une guerre dévastatrice. Il se peut aussi que le conflit n'ait aucune influence sur le résultat du scrutin.
Cependant, une guerre en Europe aurait un effet de sidération non seulement sur les belligérants mais sur les autres peuples d'Europe qui, assistant à la rapide destruction d'un pays par la Russie, auraient pour réflexe d'adopter le statu quo si des élections leur proposent l'hypothèse du changement. Le précédent de cette crise est celle des Balkans au lendemain du démantèlement de la Yougoslavie. Il est toutefois difficile de comparer les deux événements car ils ne se ressemblent nullement. La Serbie a sans doute dominé le conflit, mais elle n'avait pas la puissance militaire de la Russie.
En outre, les pays occidentaux et l'ONU sont intervenus militairement pour forcer les Serbes, les Croates et les Bosniaques à baisser leurs armes. Ce n'est pas le cas de l'Ukraine qui, en dépit de tous les soutiens qu'elles a reçus et des armements qui lui ont été fournis, est seule face à une puissance nucléaire, peu disposée à brider sa force. Les sanctions prises par les Américains et les Européens contre Moscou seront, comme les précédentes, à double tranchant et pertuberont les échanges, notamment les importations d'énergie dans une période où le prix des carburants s'envole. Mais le mécontentement qui s'ensuivrait ne s'exprimera qu'après les élections.
L'opinion a besoin de pédagogie
Pour tout gouvernement occidental, le problème se pose au niveau des explications à donner aux peuples concernés qui ignorent tout de la géopolitique et ne commencent à s'alarmer que lorsque l'énergie devient rare ou trop chère. Autrement dit, le prochain président de la République française n'aura pas la partie facile. Les promesses électorales des uns et des autres seront vite oubliées quand il faudra parer au plus pressé. Le soutien à l'Ukraine, même s'il ne suffit pas à empêcher l'invasion, aura un coût. Nos économies seront affectées par une longue crise avec la Russie. On n'ose imaginer le chaos voulu par Poutine qui, lui, n'a pas de comptes à rendre à son opinion.
La seule question sera ensuite, pour les amis de l'Ukraine, de ne pas se laisser entraîner dans la guerre, tout en apportant une aide aux Ukrainiens. Je ne sais pas si M. Macron est l'homme le plus qualifié pour cette tâche subtile et complexe, mais les autres candidats et candidates ne sauraient exciper de leurs compétences en la matière. Par respect pour la démocratie, on s'efforce, lors de chaque élection présidentielle, de faire du président sortant un candidat comme les autres et ce n'est que justice. Mais la forme démocratique ne garantit pas l'égalité des candidats. Il est à peu près certain que M. Asselineau, par exemple, ne fait pas le poids face à Poutine, ou tout au moins que c'est là le sentiment des Français. Tandis que M. Macron, lui, a déjà eu maintes occasions de s'occuper de la bête sans être dévoré par elle, ce qui lui confère une qualification que n'ont pas les autres candidats.
Il n'est d'ailleurs pas impossible que François Hollande, formé aux conflits et à la lutte contre le terrorisme, estime qu'il pourrait être candidat. Divisés comme jamais, les socialistes ne lui voient pas obtenir un second quinquennat. De même qu'on ne songe pas, à LR, à appeler Nicolas Sarkozy, bien qu'il ne cache pas son envie de sauter dans l'arène.
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