L’ASTHME et l’obésité (ou le surpoids) sont les plus fréquentes des pathologies chroniques chez l’enfant dans les pays riches (et dorénavant dans un certain nombre pays en développement) touchant respectivement plus d’un enfant sur six et plus d’un enfant sur cinq. Leur prévalence ne cesse de croître partout dans le monde. Dans la mesure où cette évolution va de paire avec l’urbanisation et ses conséquences sur l’environnement et les modes de vie, il est possible que des facteurs environnementaux communs soient en cause dans la progression des deux maladies.
De nombreuses études témoignent de la plus grande fréquence du surpoids et de l’obésité chez les enfants asthmatiques par rapport à la population générale. Ce lien entre obésité et asthme apparaît plus étroit en cas d’asthme non allergique (1). Une revue de la littérature (2) a confirmé l’absence d’atopie et d’hyperréactivité bronchique à la méthacholine dans l’association entre asthme et obésité ou surpoids. Une étude récente a révélé une prévalence plus importante d’asthme non éosinophilique chez les filles obèses asthmatiques que chez les garçons (3). Le rôle du genre dans la relation entre les deux pathologies est diversement évalué mais celle-ci semble plus fréquente chez les femmes que chez les hommes.
Deux analyses d’une large cohorte (4,5) ont montré qu’une augmentation de l’IMC et/ou une adiposité chez les enfants étaient associées à une augmentation des symptômes d’asthme, des exacerbations d’asthme et des consultations aux urgences. Une étude prospective (6) rend compte d’une diminution de l’efficacité des corticoïdes inhalés chez les enfants asthmatiques obèses suggérant une possible insensibilité aux stéroïdes chez les enfants qui ont un IMC élevé. Une autre étude récente (7) montre que la perte de poids induite par des mesures diététiques aboutit à une amélioration significative des paramètres cliniques chez les enfants asthmatiques obèses. L’hypertriglycéridémie et la résistance à l’insuline sont associées positivement à l’asthme, indépendamment de l’IMC. Chez les garçons adolescents qui sont obèses et souffrent d’un asthme persistant modéré, la prévalence du syndrome métabolique est significativement plus élevée que chez les adolescents obèses non asthmatiques.
Une des premières études longitudinales menée sur ce sujet chez des adultes a montré que les femmes qui prennent du poids après l’âge de 18 ans ont un risque majoré de développer un asthme dans les 4 années suivantes indépendamment de la prise calorique ou de l’activité physique. En pédiatrie, la première étude longitudinale est celle menée en 2001 par Castro-Rodriguez et ses collègues (7) qui ont pu établir que les filles, et non les garçons, qui deviennent obèses ou en surpoids entre 6 et 11 ans ont un risque 7 fois plus élevé de développer un asthme que ceux qui gardent un poids normal, indépendamment de l’activité physique ou du statut allergique. Par ailleurs, la variabilité du volume expiratoire maximal seconde (VEMS) et du débit expiratoire de pointe s’est révélée plus importante chez les filles obèses et en surpoids que chez celles qui avaient un poids normal. Ceci a conduit à suggérer l’existence possible d’anomalies dans la régulation du tonus bronchique chez les filles. De plus, la prévalence de l’asthme est apparue plus importante chez les filles obèses pubères avant l’âge de 11 ans que chez celle dont la puberté avait été plus tardive. Ceci pourrait indiquer que l’obésité entrave la production (ou la sensibilité périphérique) des hormones impliquées dans la puberté des filles et qu’une augmentation de la production d’hormones féminines (ou de la sensibilité à ces hormones) altère le développement pulmonaire et la régulation du tonus bronchique chez les filles à l’âge de la puberté (par augmentation de la réactivité bronchique). Cette association entre obésité et asthme chez les filles dont la puberté est précoce a été confirmée dans des études menées indépendamment au Mexique et en France.
Les auteurs proposent un nouveau phénotype d’asthme associant sexe féminin, puberté avant l’âge de 11 ans, développement d’une obésité à la puberté, absence d’allergie, variabilité importante du débit expiratoire de pointe, absence d’hyperréactivité à la méthacholine.
(1) Papoutsakis C et al. Childhood overweight/obesity ans asthma: is there a link ? A systematic review of recent epidemiologic evidence. J Acad Nutr Diet 2013;113:77-105.
(2) Matricardi PM et al. The asthma-obesity link in childhood: open questions, complex evidence, e few answers only. Clin Exp Allergy 2007;37:476-84.
(3) Jensen ME et al. Airway and systemic inflammation in obese children with asthma. Eur Respir J. 2013 Jan 24. [Epub ahead of print]Pubmed PMID : 23349447
(4) Kattan et al. Asthma control, adiposity, and adipokines among inner-adolescents. J Allertgy Clin Immunol 2010;125:584-92.
(5) Visness CM et al. Association of childhood obesity with atopic and nonatopic asthma: results from The National Health and nutrition Examination Survey 1999-2006. J Asthma 2010;47:822-9.
(6) Forno E et al. Decreased response to inhaled steroids in overweight and obese asthmatic children. J Allergy Clin Immunol 2011;27:741-9.
(7) Castro-Rodriguez et al. Increased incidence of asthmalike symptoms in girls who becocme overweight or obese during the school years. Am J Respir Crit Care Med 2001;163:1344-9.
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