Reste à charge zéro en audioprothèse

Les malentendants enfin entendus

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Publié le 10/11/2020
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Avec le remboursement à 100 % de certaines audioprothèses et un élargissement des critères pour être éligible, le « reste à charge zéro », voté en 2018, va dans le bon sens pour les 16 millions de malentendants.
Appareiller en partenariat avec le patient

Appareiller en partenariat avec le patient
Crédit photo : phanie

La surdité est la quatrième cause de perte d'années de vie en bonne santé, toutes pathologies confondues. Elle représente le facteur modifiable le plus significatif dans la prévention des troubles cognitifs. Un appareillage précoce est un élément essentiel à son efficacité, mais le délai reste trop long : 3 ans en moyenne après la plainte auditive.

L’offre « 100 % Santé » en audiologie a pour objectif de lever l’obstacle financier et d’assurer à tous les citoyens, notamment les personnes âgées, l’accès à une audioprothèse. Pour raccourcir les délais, il s’agira aussi d’aller au-devant de l’hypoacousie et de la repérer, par exemple dans les bilans préretraite ou lors des troubles de la fragilité.

L’éligibilité par l’intelligibilité

Les critères pour qu’une prothèse soit éligible au remboursement ont été modifiés et permettent une extension des indications. On retient une perte moyenne auditive d’au moins 30 dB, mais surtout des éléments qualitatifs, comme un seuil d’intelligibilité dans le silence > 30 dB, une perte sur les fréquences aiguës au-delà de 2 000 Hz d’au moins 30 dB. « On prend en compte aussi maintenant la dégradation significative de l’intelligibilité dans le bruit, bien souvent le premier signe d’une hypoacousie, un élément qui ne figurait pas dans les précédents textes », insiste le Pr Christophe Vincent (Lille).

Pour que ce « reste à charge zéro » (RAC 0) soit un succès, il faudra l’évaluer non pas sur le nombre d’appareils vendus mais sur la qualité de ce qui va être fait, c’est-à-dire la tolérance et l’observance vis-à-vis de l’appareil, l’amélioration de la perception et de la compréhension, l’impact sur la cognition et surtout l’adéquation avec les attentes du patient.

Un bilan préprothétique bien défini

La prescription d’une audioprothèse ne se limite donc pas à des chiffres bruts de perte auditive, mais doit aussi mentionner les facteurs susceptibles d’affecter la réhabilitation, comme l’intelligibilité ou d’éventuels phénomènes de distorsion, les activités sociales et culturelles du patient et définir avec lui ses besoins, en priorisant les situations auditives dans lesquelles il souhaite être amélioré ; le questionnaire Cosi (Client oriented scale of improvement) est utile.

À la fin de ce bilan, le prothésiste doit l’aider à choisir la solution la mieux adaptée à ses besoins et ses attentes : type d’aide auditive, niveau technologique requis, intérêt d’une éventuelle connectivité. « L’audioprothésiste doit établir un pronostic de résultat, des informations précises sur l’utilisation et le remboursement de l’appareil qu’il préconise et fournir un devis qui propose une offre 100 % santé » précise François Dejean, audioprothésiste à Montpellier.

Cette offre de classe I couvre des besoins simples, avec des prix plafonnés à 950 euros, dont 240 seront pris en charge par l’Assurance-Maladie et 710 par la mutuelle. La classe II répond à des besoins plus complexes, avec des prix libres de 1000 à 2000 euros, avec le même remboursement par l’Assurance-Maladie, mais une prise en charge par la mutuelle variable et qui, contrairement à ce qu’on pourrait penser, n’atteindra pas obligatoirement de 710 euros !

Le compte rendu de l’appareillage par l’audioprothésiste est obligatoire, et la phase d’essai pour évaluation de l’efficacité, souvent proposée, est maintenant imposée pendant au moins 30 jours.

Table ronde « Reste à charge zéro en audioprothèse »

Dr Maia Bovard-Gouffrant

Source : Le Quotidien du médecin