Depuis une quinzaine d'années, on observe une évolution vers une alimentation sur un mode anarchique, avec un excès d'aliments gras et sucrés lié à l'essor de la restauration rapide (le snacking des Anglo-Saxons) et des restrictions, souvent pour des raisons de mode et d'imitation. « Le mode d'alimentation des adolescents est ainsi volontiers paradoxal », souligne le Dr Georges Picherot. In fine, le régime alimentaire est trop gras, trop sucré et pauvre en calcium et en protéines d'origine animale.
Parallèlement, les adolescents sont de plus en plus sédentaires. En témoignent les chiffres rapportés en 2017 dans l'étude INCA 3 menée par l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et travail (ANSES), qui a montré que deux-tiers des 15-17 ans sont trop sédentaires (Écrans ?), ce qui s'accompagne souvent d'une consommation alimentaire inadaptée. Conséquence de ce comportement : 13 % des adolescents sont en surpoids en France, et 6 % sont aujourd'hui obèses. Contrairement aux États-Unis, le diabète de type 2 n'est pas encore une préoccupation majeure chez les adolescents dans notre pays, mais les comportements boulimiques prédisposent à l'obésité à l'âge adulte qui, elle, est un facteur favorisant le diabète de type 2 et le syndrome métabolique.
Les adolescents adoptent également, au nom de convictions de mode, des conduites restrictives, qui évoluent parfois vers des troubles plus complexes du comportement alimentaire, notamment une anorexie mentale. Les régimes restrictifs sont d'autant plus fréquents à cette période de la vie que les adolescents ne sont pas satisfaits de leur corps dans 43 % des cas, selon des données très récentes du NCHS (North Central Health Service 2019) aux États-Unis.
« Les praticiens doivent ainsi être très vigilants, surveiller l'état nutritionnel et faire passer des messages de prévention, ce qui n'est pas facile », reconnaît le Dr Picherot, qui insiste sur l'importance de la surveillance régulière de la courbe staturo-pondérale et d'indice de masse corporelle de façon systématique à chaque consultation.
Le dysfonctionnement alimentaire peut entraîner des carences. En calcium, conséquence de la baisse de consommation des produits laitiers, très en vogue aujourd'hui. En vitamine D, en lien avec les aliments gras et sucrés en excès et la sédentarisation, qui limite l'exposition au soleil. Et en fer, surtout chez les jeunes filles, dont les besoins sont supérieurs à ceux des garçons et qui ont spontanément moins d'appétence pour la viande et le poisson.
Le devoir d'exemplarité des adultes
La perte de la représentation d'un repas familial ou entre amis, assis en prenant le temps, est une autre conséquence néfaste du « binge-eating », car les repas pris à plusieurs autour d'une table sont un moment d'échanges important. « La reprise des repas familiaux est un moyen de prévention, et elle est en pratique souvent souhaitée par les adolescents pour peu qu'on leur propose », indique le Dr Picherot.
Les messages de santé et de prévention ne sont pas facilement reçus à cette période de la vie, et dans ce contexte, les adultes ont un devoir d'exemplarité. « Il faut leur proposer des alternatives acceptables, et éviter, notamment au sein de la famille, de manger de façon anarchique ou de se lancer tête baissée dans des régimes restrictifs mal équilibrés », conclut le Dr Georges Picherot.
D'après un entretien avec le Dr Georges Picherot, CHU, Nantes.
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