L’obésité prédispose à l’insulinorésistance et au diabète, tous deux pourvoyeurs de neuro-inflammation. Il s’agit ainsi d’un facteur de risque modifiable de la maladie d’Alzheimer (MA) qui serait responsable de 1 % des cas… mais seulement lorsqu’elle est présente en milieu de vie. « Chez les seniors, à 65 ans ou après, l’obésité apparaît plutôt comme un facteur protecteur. En consultation mémoire, on ne voit pas tellement de patients obèses d’une cinquantaine d’années. Et chez la personne âgée, un IMC trop bas est souvent associé à la MA. De plus, une fois la MA déclarée, une dénutrition est un facteur pronostique catastrophique », souligne le Pr Matthieu Lilamand (gériatrie, hôpital Lariboisière-Fernand Widal, Paris), qui a présenté ce sujet lors des Journées francophones de nutrition en décembre 2024.
Un amaigrissement annonciateur
Une perte de poids inexpliquée est même retrouvée dans les deux années qui précèdent l’apparition de troubles neurocognitifs, « au point que l’on peut se demander si c’est la cause ou la conséquence de cette dernière », note le spécialiste. La littérature sur les pertes de poids qui précèdent une MA est abondante, en particulier chez les femmes. Elle apparaît comme un facteur pronostique du déclin cognitif. « À partir du moment où un diagnostic de MA est posé, et ce, quel que soit l’IMC, le fait de perdre du poids est associé à un déclin cognitif plus rapide : la probabilité d’être déclineur rapide est de 50 % si la perte de poids est de 4 % au cours de la première année de suivi », insiste le Pr Lilamand.
Un IMC trop bas est un facteur pronostique catastrophique
Pr Mathieu Lilamand
Il ne faut donc pas chercher à faire maigrir une personne en surpoids avec une MA, au risque sinon d’accélérer son déclin cognitif.
La leptine, cible potentielle ?
Plusieurs hypothèses sont avancées pour expliquer l’association entre perte de poids et déclin cognitif. Parmi elles, l’implication de la leptine, hormone produite par les adipocytes et qui régule l’appétit, le poids, les dépenses énergétiques. Elle présente des taux plasmatiques plus bas chez les patients avec une MA, du moins chez les personnes âgées. Or la leptine joue un rôle de protection contre le stress oxydatif, la dysfonction mitochondriale, etc. L’hypothèse est que les lésions amyloïdes dans le cerveau pourraient inhiber le récepteur de la leptine et donc entraîner une perturbation de sa signalisation, suivie d’une anorexie, associée à une baisse du poids, une baisse des concentrations de leptine, etc.
« Le Centre de neurologie cognitive, à Paris, a réalisé des dosages des protéines amyloïdes et tau sur plus de 1 000 patients qui ont tous eu une ponction lombaire pour s’assurer du diagnostic de MA : il a bien été retrouvé une association significative entre taux de leptine plasmatique diminué et présence de lésions amyloïdes cérébrales », indique le Pr Lilamand. Cette protéine pourrait-elle être une cible thérapeutique nutritionnelle éventuelle dans le futur ? « Les travaux de recherche sur les adipokines comme médiateurs des troubles nutritionnels dans la MA doivent d’autant plus se poursuivre que les études sur l’alimentation idéale dans ce contexte ne sont pas probantes », prévient le Pr Lilamand.
Article précédent
Aliments ultratransformés : il y a urgence à diviser leur consommation au moins par deux !
Article suivant
Un régime alimentaire contre l’endométriose
Aliments ultratransformés : il y a urgence à diviser leur consommation au moins par deux !
Maladie d’Alzheimer : le rôle contesté du surpoids
Un régime alimentaire contre l’endométriose
Que valent les insectes ?
Les compléments alimentaires ne sont pas sans risques
Microplastiques, macroconséquences
Le rôle de l’urbanisme dans l’équilibre alimentaire
Les SMS des JFN 2024
CCAM technique : des trous dans la raquette des revalorisations
Dr Patrick Gasser (Avenir Spé) : « Mon but n’est pas de m’opposer à mes collègues médecins généralistes »
Congrès de la SNFMI 2024 : la médecine interne à la loupe
La nouvelle convention médicale publiée au Journal officiel, le G à 30 euros le 22 décembre 2024