SEP et grossesse : comment réagir ?

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Publié le 27/05/2022
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Réalisées sous l’égide de la Société francophone de la sclérose en plaques (SEP), de nouvelles recommandations (1) ont été émises pour la prise en charge de la grossesse chez les patientes atteintes de SEP ou de maladie du spectre de la neuromyélite optique (NMOSD). Que faut-il en retenir ?
L'allaitement n'est pas déconseillé, mais à discuter en consultation avec le neurologue

L'allaitement n'est pas déconseillé, mais à discuter en consultation avec le neurologue
Crédit photo : Phanie

« La SEP ne fait pas courir plus de risques obstétricaux à une patiente », relève la Pr Sandra Vukusic (hospices civils de Lyon). Une IRM systématique n’est donc pas nécessaire en cours de grossesse, s'il ne se passe rien. Néanmoins, dès que la patiente est enceinte, la prise en charge doit être pluridisciplinaire, coordonnée et adaptée au handicap. Si ce dernier est important, il est intéressant d'inclure en consultation un médecin rééducateur, un neurologue et un obstétricien. Dans la NMOSD, il est recommandé d'avoir un suivi renforcé par un obstétricien en lien avec l'équipe de neurologie, dû à un risque accru de complications obstétricales.

« Concernant les modalités d'accouchement en cas de SEP, ce sont les mêmes que dans la population générale. Cela vaut pour l'orientation vers le niveau de la maternité, le déclenchement programmé de l'accouchement, les indications de césarienne et la rééducation périnéale du post-partum, précise la Pr Vukusic. Les patientes avec une NMSOD doivent être informées d'un risque plus important de fausse couche et de prééclampsie en cas de positivité des anticorps anti-AQP4, ce qui nécessite un suivi obstétrical par une équipe expérimentée ». Les modalités d'analgésie et d’anesthésie sont les mêmes que dans la population générale. Il n'existe pas plus de risque avec la péridurale ou la rachianesthésie. Lors d'une consultation spécifique avec le neurologue, il est recommandé de discuter du moment de la reprise du traitement immunoactif et de l'allaitement, qui n'est pas déconseillé. En cas de NMOSD, la reprise rapide du traitement de fond est à prendre en compte.

Prendre en charge les poussées

En cas de poussées ou de complications, une IRM peut être réalisée. Si nécessaire, le recours au gadolinium est possible quel que soit le stade de la grossesse, en évitant les sels de gadolinium linéaires. Pendant la grossesse, la méthylprednisolone, en cure courte et à fortes doses, est autorisée. Toutefois, au premier trimestre, ce traitement doit être limité aux poussées sévères, dû à un léger surrisque de fausse couche. Inefficaces, les immunoglobulines intraveineuses sont inutiles en cas de poussées. En revanche, les techniques d'aphérèse sont une alternative dans les poussées sévères en échec à la méthylprednisolone. Durant l'allaitement, la méthylprednisolone peut être administrée, à condition de respecter un délai de quatre heures entre la prise du médicament et la tétée. L'allaitement est compatible avec les techniques d'aphérèse, sans restriction.

Concernant la prévention spécifique des poussées du post-partum, il est recommandé de ne pas administrer de corticoïdes, d’immunoglobulines intraveineuses, ni d’hormones sexuelles. Si les traitements immunoactifs ont été arrêtés, une reprise précoce après l'accouchement est préconisée dès que possible.

Quels traitements de fond ?

Plusieurs traitements de fond de la SEP sont contre-indiqués pendant la grossesse : tériflunomide, fingolimod, anti-CD20, cladribine, mitoxantrone et cyclophosphamide. Ils doivent être stoppés avant la conception (à l’arrêt de la contraception), selon un délai minimal variable en fonction des traitements : deux mois pour le fingolimod et les anti-CD20, trois pour le cyclophosphamide, six pour la cladribine, quatre pour la mitoxantrone. Ces délais peuvent être différents chez l’homme. Concernant les anti-CD20, une administration exceptionnelle peut être discutée en cas de poussée et en l'absence d'alternative satisfaisante. En raison du risque de retentissement sur la fertilité, une préservation des gamètes est à discuter avant l’instauration de la mitoxantrone et du cyclophosphamide. Quant à l’allaitement, il est contre-indiqué avec le tériflunomide, le fingolimod, la cladribine, la mitoxantrone et le cyclophosphamide. Mais il est possible sous anti-CD20.

À l’inverse, l'interféron et l'acétate de glatiramer sont autorisés, si nécessaire, pendant la grossesse et l'allaitement. Le diméthyle fumarate peut être poursuivi jusqu'au diagnostic de grossesse mais pas au-delà. Quant au natalizumab, il peut être administré avant la grossesse et pendant l'allaitement. Son maintien en cours de grossesse doit être discuté en réunion de concertation.

En cas de NMOSD, l'azathioprine peut être poursuivie si besoin avant et pendant la grossesse, ainsi qu’au cours de l'allaitement. Contre-indiqué durant la grossesse et l'allaitement, le mycophénolate doit être arrêté au moins six semaines avant la conception (trois mois chez l'homme). Après une injection de gadolinium, la poursuite de l'allaitement est possible sans interruption.

(1) https://sfsep.org/recommandations-grossesse-dans-la-sep-et-les-maladies…

Dr Nathalie Szapiro

Source : Le Quotidien du médecin