À l’heure où la PrEp « historique » par Truvada (ténofovir disoproxil/emtricitabine, désormais génériqué) débarque en ville en primoprescription (1), de nombreuses communications étaient consacrées à de nouveaux médicaments pour la prévention de l’infection par le VIH.
Nombre d’experts, et l’OMS elle-même, sont très attachés à cette stratégie de prévention strictement médicamenteuse, simple à mettre en place. Même si les coûts sont loin d’être négligeables, en particulier aux États-Unis, comme l’illustre un papier paru récemment dans le Jama (2).
La PrEp est arrivée à un moment où les autres stratégies avaient montré leurs limites. Dans les pays développés, les « hommes qui ont des relations sexuelles avec les hommes » restent un groupe à haut risque de VIH. Et les industriels ont largement investi. En témoignent la démultiplication des PrEp, que ce soit leurs principes actifs ou leur galénique, avec deux formes d’action prolongée agréées par l’agence américaine du médicament (FDA) et quatre en développement.
Résultat, les options de PrEP se multiplient. Dans le même temps, le panel de sujets visés, initialement des hommes homosexuels très actifs à haut risque, tend à s’étendre. L’offre alimentant la demande. On note toutefois que les Africaines préfèrent toujours largement l’anneau vaginal à la PrEP orale (3).
Un coût non négligeable
Depuis l’arrivée de la première PrEP par Truvada, plusieurs autres ont été mises sur le marché ces dernières années. Une seconde, par voie orale (cabotégravir/rilpivirine, Evilplera), suivie de sa forme injectable de longue durée d’action (Apretude, injection bimensuelle), a été tout fraîchement agréée par la FDA.
D’autres PrEP d’action longue sont dans les tuyaux, comme le montre le développement de l’islatravir — interrompu en phase III — et du dolutégravir — en phase préclinique — possiblement en injection annuelle (4).
Or, on l’imagine, ces nouveaux médicaments, supérieurs dans les études princeps aux anciens, ont un prix. Et celui-ci est si élevé (dans les 22 000 dollars/an pour l’Apretude aux États-Unis) qu’il pose un problème d’équité d’accès aux soins. Et possiblement de budget, si l’on considère l’investissement global dédié par l’OMS et ses filières (Onusida, etc.) à la lutte contre le VIH/Sida au niveau mondial.
Un testing inapproprié en Afrique
La PrEP doit être accompagnée d’une vérification régulière du statut VIH. Un test trimestriel est recommandé par l’OMS. Un travail s’est penché sur la fiabilité d’autotests oraux, associés à la délivrance d’une PrEP en Afrique. Ses résultats sont très alarmants. Il se fonde sur la sérothèque d’une étude thérapeutique de PrEP de phase III (JiPime-JiPrEP), menée chez des Kenyans adultes. Nombre de participants « interprètent » et, plus largement, utilisent mal les autotests fournis. Dans la vaste majorité des cas, les résultats sont discordants avec les sérologies réalisées au laboratoire. De 87 à 89 % des autotests sont invalides et, parmi ceux qui restent, la moitié ne sont que faiblement positifs.
Exergue : Près de 9 autotests sur 10 invalides au Kenya
(1) Prophylaxie (PrEP) du VIH par ténofovir disoproxil/emtricitabine dans le cadre de l’urgence sanitaire. Réponses rapides dans le cadre du Covid-19. HAS, 28 avr. 2021 (2) JM Sharfstein. Long acting cabotegravir for HIV prevention : issues of acces, cost and equity. Jama 2022;327:321-22 (3) K Ngure et al. Choice and adherence to dapivirine ring on oral PrEP by young African women in Reach. Croi 2022, Abs. 88 (4) S Deodhar et al. Transformation of dolutegravir into a year-long parenteral prodrug formulation ? Croi 2022, Abs 448
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