L’incontinence urinaire, en particulier à l’effort, est une pathologie fréquente puisqu’elle concerne de 25 à 40 % des femmes selon les études. Son impact sur la qualité de vie, le sommeil et la vie sexuelle peut être important et une intervention chirurgicale peut être envisagée en cas d’échec d’une prise en charge conservatrice bien conduite (mesures hygiénodiététiques, rééducation).
Avant la mise à disposition des bandelettes sous-urétrales (BSU), l’incontinence urinaire était un sujet relativement tabou. De nombreuses femmes n’en parlaient pas, ni ne consultaient. Pour celles qui étaient prises en charge et pour lesquelles les traitements conservateurs étaient insuffisamment efficaces, les techniques chirurgicales utilisées étaient agressives, non dénuées de complications et donnaient des résultats peu satisfaisants.
Les bandelettes sous-urétrales (BSU), à la disposition des chirurgiens depuis plus de vingt-cinq ans, ont donc historiquement été développées pour répondre à un besoin : la prise en charge d’un nombre important de femmes souffrant d’incontinence urinaire d’effort, de façon plus efficace et moins invasive.
Une révolution à leur arrivée
L’arrivée des BSU a donc été saluée comme une véritable révolution, du fait de son caractère mini-invasif et de son taux faible de complications, globalement de moins de 2 %, et majoritairement peu sévères. « Initialement, c’est la technique TVT (tension-free vaginal tape) qui a été utilisée, avec un passage rétropubien, qui impose de réaliser en peropératoire une cystoscopie à l’optique 70°, rappelle la Dr Sandrine Campagne-Loiseau (CHU de Clermont-Ferrand). Le risque de lésion vésicale est de l’ordre de 4 %, mais grâce au contrôle cystoscopique peropératoire systématique, les éventuelles lésions sont immédiatement corrigées. »
Toutefois, la crainte d’une plaie vésicale a conduit à diffuser plus largement une autre technique, la TOT (trans-obturator tape), dont les avantages théoriques étaient d’avoir un trajet plus court, de s’affranchir du risque de plaie vésicale et donc de cystoscopie peropératoire et, finalement, de gagner du temps. L’adoption large de la TOT a ainsi, à tort, donné l’impression de libérer les chirurgiens du risque vésical ; ce risque, certes moindre qu’avec la TVT, n’est pas nul, de l’ordre de 1,4 %, « et l’absence de cystoscopie ne permet pas d’agir immédiatement en cas de plaie. De plus, la proximité du nerf obturateur et du périoste de la branche ischio-pubienne, très innervé, peut être une source de douleurs, immédiatement mais aussi avec le temps », souligne la Dr Campagne-Loiseau.
Face aux complications
La survenue de complications, parfois graves, après la pose de BSU – mais également de dispositifs implantables destinés au traitement, par voie vaginale et par voie haute, du prolapsus des organes pelviens – a conduit les autorités de santé à prendre diverses mesures : seuil minimal d’activité, évaluation préalable favorable par la Haute Autorité de santé (HAS) pour l’utilisation de l’ensemble des implants, avec un dernier arrêté en avril 2025. La HAS a aussi émis, en 2023, des recommandations pour la prise en charge de ces complications.
Le nombre d’implantations de BSU est passé de 35 000 à 17 000 par an. « Il faut éviter de revenir trente ans en arrière, vers les techniques chirurgicales anciennes, plus invasives et qui ne sont plus vraiment maîtrisées par les jeunes générations de chirurgiens, souligne la Dr Campagne-Loiseau. Les BSU permettent de répondre aux besoins de nombreuses femmes. Mais, comme tout acte chirurgical, l’indication doit être bien pesée et discutée avec la femme. Avant de se tourner vers la chirurgie, les traitements conservateurs doivent être proposés : rééducation périnéale bien conduite, adaptation de la pratique des sports (avec éventuellement port de systèmes intravaginaux), correction des troubles du transit, voire injection périurétrale d’agent comblant. »
Il faut éviter de revenir trente ans en arrière
Dr Sandrine Campagne-Loiseau
« Lorsqu’un geste chirurgical est décidé, la TVT, sous réserve d’une formation adéquate, doit être privilégiée car c’est une technique beaucoup plus reproductible que la TOT, et qui expose à moins de complications à long terme », résume la Dr Campagne-Loiseau.
Entretien avec le Dr Sandrine Campagne-Loiseau (Clermont-Ferrand)
HAS, mars 2023. Complications de la chirurgie avec prothèse de l’incontinence urinaire d’effort et du prolapsus génital de la femme.
JO, 25 avril 2025. Arrêté du 25 avril 2025 encadrant la pratique des actes d’implantation associés à la pose de bandelettes sous-urétrales destinés au traitement chirurgical de l’incontinence urinaire d’effort chez la femme en application des dispositions de l’article L. 1151-1 du Code de la santé publique.
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