Dr Rodica Gincul (Société française d’endoscopie digestive) : « L’endoscope n’est pas qu’un simple outil »

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Publié le 14/03/2024
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Le développement durable et l’intelligence artificielle, la recherche, mais également la défense de la qualité de la formation en endoscopie seront les priorités de la Dr Rodica Gincul, nouvelle présidente de la Société française d’endoscopie digestive (SFED).

LE QUOTIDIEN : Quelles sont les avancées dans la détection et la caractérisation des lésions digestives ?

Dr RODICA GINCUL : Reconnaître les cancers superficiels et les différencier des lésions pré-invasives constitue la base des critères de qualité pour des examens tels que la gastroscopie et la coloscopie. Dans ce domaine, les innovations sont constantes, notamment avec l’intelligence artificielle (IA), qui s’invite en endoscopie digestive, afin de nous aider à la détection et la caractérisation des lésions. Dresser un état des lieux des applications de l’IA dédiées à l’endoscopie, avec une évaluation scientifique rigoureuse, afin de répondre à des questions éthiques et juridiques sur la responsabilité médicale, la formation, et le remboursement des actes, sera le rôle de la nouvelle commission de la SFED, « Intelligence artificielle et numérique », créée lors de ma prise de mandat en novembre dernier.

Et concernant l’endoscopie thérapeutique ?

La dissection sous-muqueuse des lésions superficielles œsogastriques et colorectales est devenue la technique de résection de référence pour les lésions planes de grande taille (≥ 20 mm) et/ou les lésions précancéreuses et cancéreuses, permettant une exérèse monobloc en marges saines, offrant le même niveau de qualité carcinologique que la chirurgie pour les lésions débutantes, mais avec un taux de morbidité moindre.

Une autre évolution majeure concerne l’échoendoscopie thérapeutique, offrant désormais des possibilités de traiter de manière moins invasive des lésions proches du tube digestif, en remplaçant ainsi certains actes chirurgicaux ou radiologiques, et en améliorant la qualité des soins et de vie des patients. L’échoendoscopie thérapeutique est devenue essentielle pour le drainage des collections péripancréatiques, le drainage canalaire (biliaire ou pancréatique) en cas d’échec de canulation de la papille ou en cas de papille principale inaccessible (sténose duodénale tumorale ou bénigne, d’anatomie modifiée post-chirurgie), le drainage de la vésicule biliaire en cas de cholécystite aiguë chez les patients inopérables.

La radiofréquence pancréatique sous guidage échoendoscopique, technique mini-invasive pour le traitement des tumeurs neuroendocrines du pancréas de ≤ 2 cm à faible risque évolutif, a été démontrée comme fiable et peu morbide. Cette technique tend à devenir la référence pour le traitement des tumeurs neuroendocrines fonctionnelles, comme les insulinomes, épargnant ainsi au patient une intervention chirurgicale invasive avec un haut risque de morbidité.

La réforme de la nomenclature est indispensable

Un autre volet majeur est l’endoscopie bariatrique, dont l’efficacité et la très faible morbidité sont désormais soutenues par une littérature substantielle, avec de bons résultats récents pour la sleeve gastroplastie endoscopique sur le poids, la Mash et même en cas d’IMC entre 27 et 30 kg/m2. La SFED a créé un curriculum de l’endoscopie bariatrique. Je défends l’idée que l’endoscopie est une spécialité et l’endoscope pas un simple outil, ce qui implique une formation longue et de qualité des endoscopistes. L’endoscopie thérapeutique n’est pas dissociable de l’endoscopie diagnostique. La SFED va rester un allié incontournable aux côtés du CNP-HGE, du Syndicat national des médecins français spécialistes de l’appareil digestif (Synmad) et de la CSMF dans la défense des conditions de pratique de l’endoscopie auprès des autorités, mais également dans la réforme tant nécessaire de la nomenclature.

Pourquoi avoir choisi l’impact environnemental comme thème des JFHOD 2025 ?

La commission « Écoresponsabilité et développement durable » de la SFED, créée en 2021, s’implique pour sensibiliser les endoscopistes à l’impact environnemental de leur activité, aux côtés de la commission d’hygiène. L’endoscopie génère 3,09 kg de déchets/patient/jour ; la capsule endoscopique, 22 000 examens annuels. Cela ne représente qu’une goutte d’eau par rapport à la pollution industrielle et domestique, néanmoins c’est un exemple d’aberration écologique. Les avancées récentes dans l’utilisation de matériel réutilisable reflètent cette préoccupation environnementale croissante.


Source : Le Quotidien du Médecin