LES LIENS ÉTROITS qui existent entre l’obésité et le diabète de type 2 sont connus depuis longtemps et ont conduit tout à l’utilisation de la chirurgie bariatrique chez des sujets obèses diabétiques. C’est ainsi qu’ont été constatées des améliorations, souvent spectaculaires, du contrôle glycémique, avant même qu’une quelconque diminution de poids ne soit enregistrée. Une situation qui ne pouvait rester inexpliquée et justifie l’intérêt porté à cette chirurgie, que la Fédération Internationale du Diabète souhaiterait voir rebaptisée chirurgie bariatrique-métabolique.
Chez l’obèse, toutes les techniques de chirurgie bariatrique induisent une perte pondérale importante, soutenue et qui est toujours supérieure à ce que l’on peut espérer de l’utilisation de traitements hygiénodiététiques et médicamenteux.
Il existe principalement trois types d’interventions :
• la pose d’anneaux gastriques ajustables (adjustable gastric banding), qui permettent de réduire de façon modulable le calibre de l’orifice d’entrée dans l’estomac ;
• les gastroplasties, en particulier la gastroplastie verticale calibrée, avec résection gastrique (vertical sleeve gastrectomy), qui semble être la plus performante en termes d’obtention et de maintien d’une réduction pondérale ;
• les opérations de dérivation, dont la plus utilisée est le court-circuit gastrique avec anse en Y de Roux qui combine un effet restrictif et une discrète malabsorption. La continuité digestive se fait entre une petite poche stomacale, d’un volume d’environ 30 ml, et la partie moyenne du jéjunum. La partie exclue (environ 95 % de l’estomac, le duodénum et la partie haute du jéjunum) est rebranchée en dérivation sur la partie terminale du jéjunum.
Une récente méta-analyse (1) a montré que l’utilisation de ces techniques chirurgicales chez les diabétiques de type 2 permettait une réduction allant 50 à 60 % de l’excès de poids et, surtout, la résolution complète du diabète dans 50 à 80 % des cas, ce avec un recul allant jusqu’à deux ans.
Nouveau concept du mode d’action.
L’essor de la chirurgie bariatrique a eu comme conséquence une remise en question du modèle mécanique classique de son mode d’action, faisant intervenir le duo restriction alimentaire et malabsorption. Désormais, Des mécanismes physiologiques sont reconnus comme jouant un rôle de premier plan. Les signaux nerveux et endocriniens, envoyés par le tractus digestif vers le cerveau et les organes digestifs tels que le pancréas (influence sur la fonction des cellules ß) et le foie (influence sur la production endogène de glucose), sont modifiés par l’intervention chirurgicale, ce qui explique ses résultats observés dans le diabète de type 2.
Les facteurs prédictifs de succès se dessinent.
Le recul aidant, plusieurs paramètres associés à de moindres chances de succès ont pu être déterminés. Pour le court-circuit gastrique avec anse en Y de Roux - après exclusion des cas d’échec liés à des problèmes de technique chirurgicale (taille inadéquate de la poche ou de l’anastomose gastro-jéjunale) - un poids non stabilisé, avec augmentation de l’IMC en période préopératoire, l’absence d’activité physique, un âge avancé et l’absence de suivi ou de compliance du patient sont autant de facteurs d’échec.
De manière générale chez les diabétiques de type 2, les résultats paraissent plus limités chez les sujets dont l’IMC initial est moins élevé (taux de rémission à un an de l’ordre de 65 % en cas de BMI initial< 35 alors qu’un taux de rémission d’environ 85 % est constaté chez les sujets dont l’IMC initial dépasse les 35). L’effet est également plus modeste et plus progressif chez les sujets dont le diagnostic de diabète remonte à plus de 5 ans. La perte de fonction des cellules ß et donc la sévérité du diabète pourraient alors limiter les effets de cette chirurgie, cet élément restant à confirmer par des essais de grande ampleur.
De nombreuses attentes.
Le ou les profils de patients pouvant bénéficier davantage de cette chirurgie en termes d’amélioration du diabète, s’ils existent, restent donc à déterminer. Puisque les sujets les plus obèses répondent mieux, l’hypothèse actuelle est que les patients dont le diabète est en plus rapport avec l’obésité et l’insulinorésistance constituent des candidats idéals.
En outre, la question du moment idéal pour réaliser cette intervention, au cours de l’histoire naturelle du diabète, se pose aussi. En dernier recours, quand il y a déjà des complications, ou tôt dans le cours évolutif, puisque de meilleurs résultats sont obtenus chez les diabétiques plus nouvellement diagnostiqués ?
Dernier élément, cette chirurgie sera-t-elle en mesure d’apporter un bénéfice sur la mortalité au long cours ? On sait désormais que c’est le cas chez les sujets obèses non diabétiques, avec une réduction de 29 % de la mortalité globale à 15 ans observée dans un essai suédois comparant la chirurgie au traitement conventionnel chez 4 047 obèses (2).
D’après la communication d’Ele Ferrannini (Pise, Italie) « What can be unified and what needs to be individualized in obesity and Type 2 Diabetes ? »
(1) H Buchwald et al. Am J Med. Weight and type 2 diabetes after bariatric surgery: systematic review and meta-analysis. 2009; 122(3): 248-56.
(2) L Sjöström et al. N Engl J Med. Effects of bariatric surgery on mortality in Swedish obese subjects. 2007; 357(8): 741-52.
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