Ischémie critique : privilégier le pontage

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Publié le 02/12/2022
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Dans l’ischémie chronique critique des membres inférieurs, le pontage chirurgical donne de meilleurs résultats, concernant le nombre d’amputations ou de réinterventions majeures, que les procédures endovasculaires. Toutefois, la condition est que le réseau veineux permette d’utiliser un greffon saphène.
En présence d’une bonne veine saphène, le pontage chirurgical donne de meilleurs résultats

En présence d’une bonne veine saphène, le pontage chirurgical donne de meilleurs résultats
Crédit photo : Burger/Phanie

Le traitement médical de l’ischémie chronique critique des membres inférieurs passe par la prise en charge de toutes les localisations concernées par l’athérosclérose et une revascularisation, afin d’améliorer la perfusion distale et limiter le risque d’amputation. La revascularisation peut être réalisée soit par pontage, soit par des procédures moins invasives (angioplastie et/ou pose de stent) qui se sont développées ces 20 dernières années. Cependant, peu de données étaient disponibles pour déterminer la procédure optimale.

Plus de 1 800 patients inclus

BEST-CLI est un essai contrôlé prospectif international, conçu pour comparer les deux principales stratégies de revascularisation dans l’ischémie chronique critique des membres inférieurs (1). Il a bénéficié d’un financement institutionnel. Les 1 830 participants à l'étude étaient âgés en moyenne de 67 ans, 28 % étaient des femmes, 36 % fumeurs, 69 % diabétiques et 11 % avaient une insuffisance rénale terminale. Dans le premier groupe, les 1 434 patients avaient de grandes veines saphènes, se prêtant à un pontage. Dans le second, les 396 patients n’avaient pas de veine saphène susceptible d’être utilisée pour le pontage, qui devait donc recourir à une veine du bras ou un greffon artificiel. Dans chaque groupe, les participants étaient ensuite randomisés entre pontage ou procédure endovasculaire.

Moins d’amputations et de réinterventions

Dans le premier groupe, après 2,8 ans de suivi moyen, les évènements indésirables majeurs (amputation au-dessus de la cheville, thrombolyse, thrombectomie, interposition/révision de greffon, pontage) au niveau du membre inférieur étaient réduits de 33 % par la chirurgie, par rapport au traitement endovasculaire. Il y avait également une réduction de 65 % des réinterventions et de 27 % des amputations au-dessus de la cheville. Les évènements cardiovasculaires hors membre inférieur (décès, infarctus du myocarde, AVC) étaient identiques dans les deux bras. Par contre dans le second groupe, après 1,9 an de suivi moyen, aucune différence statistique n'était constatée entre les deux bras. « Ces résultats s’inscrivent en faux contre l’idée, communément admise, que les patients atteints d’ischémie critique chronique des membres inférieurs devraient en premier bénéficier d’une procédure endovasculaire, a priori moins risquée sur le plan cardiovasculaire global. Chez les personnes disposant d’une bonne veine saphène et avec un risque opératoire acceptable, le pontage chirurgical entraîne de meilleurs résultats sans surrisque général, ni cardiovasculaire », remarque Pr Alik Farber (États-Unis).

L'étude comportait cependant certaines limites. Les résultats peuvent avoir été influencés par un biais de sélection : chaque centre choisissait les bons candidats pour la revascularisation. De plus, chaque chirurgien ou cardiologue interventionnel pouvait aussi déterminer la technique à privilégier, en fonction de l’équipement et des habitudes du centre. Les techniques chirurgicales et endovasculaires n’étaient donc vraisemblablement pas homogènes.

(1) Farber A et al, AHA 2022, abstract 19587

Dr Maia Bovard Gouffrant

Source : Le Quotidien du médecin