« L’objectif de "zéro décès évitable" a conduit depuis quelques années l'armée américaine à analyser systématiquement les causes de décès au combat », rappelle le Pr Stéphane Travers, médecin chef au Service de santé des armées, École du Val-de-Grâce, Paris. Le résultat a été clair : près d’un quart des décès survenus en Afghanistan auraient pu être évités si le contexte avait permis un traitement optimal plus précoce. De nombreux efforts ont alors été déployés pour favoriser l'accès rapide aux blessés, accélérer leur évacuation vers une structure chirurgicale, mais aussi pour mieux juguler ou limiter les hémorragies dès la prise en charge initiale. Désormais, chaque militaire est équipé d'un garrot et formé à son utilisation ; de nouveaux dispositifs sont aussi disponibles : pansements et packing hémostatiques, garrots jonctionnels, injection dans les plaies de dispositifs expansibles, techniques endovasculaires…
Les données accumulées soulignent également l’enjeu de la transfusion précoce, et ce d'autant plus que les blessures sont graves et surviennent en zone reculée. De gros efforts ont donc été réalisés pour déployer les produits sanguins sur le terrain et dans les vecteurs d’évacuation : plasma lyophilisé, conservation de concentrés de globules rouges dans des contenants isothermes adaptés, présélection de donneurs potentiels pour prélèvement et transfusion de sang total sur le terrain et production prochaine par le centre de transfusion sanguine des armées de sang total groupe O déleucocyté à faible taux d'hémolysines. Ces approches permettent aujourd’hui de mieux répondre aux contraintes liées à l’isolement (le prolonged field care des anglo-saxons). « La biologie délocalisée offre également des perspectives nouvelles, notamment en ce qui concerne le dosage des lactates ou l’analyse des paramètres de la coagulation », précise le Pr Travers.
La session commune SFMU/Carum (1) lors du congrès illustre l’intérêt majeur des échanges entre médecins urgentistes civils et militaires. Leur objectif commun est de réduire encore la mortalité des blessés graves quel que soit le contexte, y compris en situation difficile ou isolée.
Entretien avec le Pr Stéphane Travers, Service de santé des armées, Ecole du Val-de-Grâce, Paris.
(1) Société française de médecine d'urgence et Club des anesthésistes-réanimateurs et urgentistes militaires
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