Et si le paradis sur terre était tout simplement un vignoble ? Quelque chose comme une parcelle de 16 hectares au cœur de la région Pays de la Loire ? Et bien sûr, idéalement situé, entre les deux rives du Layon. Plus précisément à Chaudefonds-sur- Layon ! Blancs secs, - cent pour cent chenin —, moelleux « Coteaux du Layon », crémant brut, cabernet rosé et Anjou rouge, sont les fruits, - pas totalement défendus — de ce paradis-là.
Depuis 1920, quatre générations de la famille Dubillot se sont succédées aux commandes du domaine. Chacune a doublé les hectares de vignes de la précédente. Une vigne vierge court le long des murs gris de la propriété aux encoignures de briques ocre. L'automne a déjà peinturluré le haut des buttes du vignoble familial et la pente des coteaux va suivre dans quelques jours. C'est la fin des vendanges en ce début d'octobre et cela se fête toujours par un déjeuner convivial.
Habituellement, vignerons et saisonniers sont attablés sous un grand arbre, autour d' une «brouette barbecue». Mais cette année, Covid oblige, un brunch a remplacé le traditionnel repas. La plupart des vendangeurs sont des habitués du Paradis. Comme ces gens du voyage, fidèles aux Dubillot depuis près de quarante ans. « Je me souviens quand j’étais petite, les familles venaient en roulotte. Les caravanes ont pris la relève depuis… » explique Marie Dubillot, l’aînée des enfants, médecin et vigneronne.
C'est sans aucune hésitation, qu’Étienne, l'un des six de la fratrie, a emboîté le pas des parents. Il est à la tête de l’entreprise familiale, tant sur la partie vignoble que celle de l'élevage d’une cinquantaine de vaches. « Il est tombé dedans tout petit » annonce la page d’accueil du site du Paradis. Tout le contraire de Marie. La vigne, pour elle, c’était niet ! Son projet, son but «a toujours été la médecine. Une véritable vocation. J'ai voulu faire cela depuis mon plus jeune âge», précise-t-elle. Dans son cercle familial, il n’y avait pourtant aucun médecin. Déterminée, la jeune femme a entamé ses études à la fac de médecine d’Angers où elle rencontre son conjoint Vincent. Le couple quitte ensemble l’Anjou pour passer les années d'internat à Marseille.
Des cours d’œnologie en parallèle
Tout est parti des cours d’œnologie que Marie, loin de sa région d'origine, décide de suivre pendant son internat. Un peu comme cela, par curiosité, pour sa seule culture personnelle, assure-t-elle... La nostalgie du terroir ? L'appel de la terre ? Toujours est-il, que ce qui devait arriver, arriva ! La jeune interne se prend au jeu de la vigne, plus que du vin d'ailleurs. C'est surtout le végétal qui l'attire. Ce simple violon d’Ingres se concrétise par un BTS d'œnologie et viticulture. Et, patatras ! Encore interne dans la ville phocéenne, Marie décide, que tout compte fait, les vignes, eh bien, elle y retournerait volontiers ! Le jeune couple de médecins convient d’un retour au pays et aux vignes. Mais attention, sans renoncement aucun ! Car Marie négocie un mi-temps au sein du service de chirurgie cardiaque du CHU d’Angers et scinde sa vie professionnelle en deux.
Imaginez un peu, la stupeur de la famille. Et la kyrielle de questions qui ont suivi. Pourquoi diable revenir aux vignes après avoir tant donné pour une carrière médicale ? Évidemment l'effet de surprise passé, le choix de Marie a été accueilli avec grande satisfaction. Voire, carrément de la fierté. «Cela a fait beaucoup plaisir à mon père et a permis, en partie, la fin d’une carrière de 40 années de labeur au sein du domaine.»
Le retour aux vignes de l’aînée des Dubillot, a atténué, le sentiment d'échec ressenti, au fil du temps, par le père, agriculteur et viticulteur. Car, souligne, la désormais vigneronne, « le monde agricole a beaucoup perdu en valeur et en image auprès de l'opinion ». Le choix d’exercer la médecine tout en s’investissant dans le domaine familial, a redonné au patriarche, l'envie de concevoir de nouveaux projets.
La jeune femme a de qui tenir ! Avec ses grandes lunettes, une petite frimousse encadrée d’un halo de cheveux éclaircis par le grand air, une silhouette faussement menue, Marie sait faire preuve de force à plus d’un titre. Son frère Étienne, en témoigne volontiers : « physiquement, Marie a une sacrée résistance. Elle tient le coup du matin tôt au soir tard, et mentalement, elle sait ce qu’elle veut. Elle tient par exemple, à organiser, dans la cour du Paradis, une démonstration de tracteurs électriques ! ».
Son insatiable curiosité la pousse à innover et à entreprendre, en se préoccupant de l’avenir de la planète. La conversion en bio du domaine du Paradis, à l'initiative de son père, l'occupe tout entière. Sans compter les 3 hectares de vignes, loués à un vigneron retraité, et devenus ses «sarments d'Hippocrate». C’est un être aux passions plurielles. « Marie est hyper curieuse de tout ! Elle est à fond » souligne Audrey Jeanneteau sa collègue, anesthésiste au CHU d’Angers. Même constat de Vincent Cayrol, son mari, médecin généraliste et urgentiste. « Marie est enthousiaste et curieuse. Il faut que ça avance. Elle a envie de faire. De donner du sens ».
Tout, absolument tout l’intéresse
Comme tout, vraiment tout l'intéresse, c'est sur le fil du rasoir que la jeune anesthésiste s'est déterminée pour sa spécialité. Car dès que Marie effectue un stage dans un domaine médical précis, elle veut en faire sa spécialité. Et on vous le donne en mille… Le tout dernier s'est fait en anesthésie-réa. «J'ai fini par choisir cette spé qui est très large et concerne tous les organes, en étant très technique et physiologique. Je n'ai jamais regretté ce choix, qui, avec la médecine générale me passionne». Le temps de la réflexion, Marie attrape une mèche de cheveux blonds qu'elle entortille comme pour trouver le juste mot.Elle note que sa discipline a facilité sa double vie professionnelle : «Nous n'avons pas de patients attitrés et donc, nous ne sommes pas irremplaçables».
Un pied dans la vigne, un autre au CHU
Une semaine sur deux, la médecin alterne le travail de la vigne, avec ses responsabilités d’anesthésiste-réanimatrice. Son organisation est fort bien huilée et son emploi du temps parfaitement identifié par ses confrères du service de chirurgie cardiaque du CHU d'Angers. « Elle est très appréciée, elle va au bout des choses et cherche à tout prendre en compte… » souligne encore Audrey Jeanneteau, sa consoeur, anesthésiste. Ses collègues sont quelques-uns à passer commande au Paradis.
Marie tortille une nouvelle mèche. Et évoque le moment propice pour rogner, épamprer les ceps, ébourgeonner et tailler la vigne… Une autre mèche blonde est prise à témoin lorsqu'il s'agit du temps des vendanges : «Le matin à la fraîche, on sent la terre humide par la rosée, puis le soleil monte et c'est l'odeur du raisin, le sucre qui colle de plus en plus aux mains. Le soir, c'est celle, des jus en fermentation qu'il faut humer chaque jour, histoire de s'assurer que ça suit le bon chemin… Tout cet amour de la terre, c'est notre père qui nous l’a transmis…» reconnaît la jeune femme qui depuis trois ans maintenant, creuse son sillon, entre vignes et médecine.
Exergue : Tout cet amour de la terre, c'est notre père qui nous l’a transmis
Légence :
Deux vies en une
Encore interne dans la ville phocéenne, Marie décide, que tout compte fait, les vignes, eh bien, elle y retournerait volontiers ! Le jeune couple de médecins convient d’un retour au pays et aux vignes. Mais attention, sans renoncement aucun ! Car Marie négocie un mi-temps au sein du service de chirurgie cardiaque du CHU d’Angers et scinde sa vie professionnelle en deux.
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