Une enquête récente montre que plus les consommateurs de cybersexualité sont accros, plus ils éprouvent un sentiment de honte et plus ils visionnent des contenus extrêmes. Leur addiction est souvent corrélée à des difficultés érectiles. La motivation principale de leur conduite est particulièrement liée à la gestion de leurs émotions.
L’addiction cybersexuelle semble faire une apparition de plus en plus marquée dans les cabinets de thérapeutes. Il est intéressant que les cliniciens aient une vision des connaissances leur permettant de mieux appréhender ce trouble, notamment les habitudes de consommation, les motivations et les éventuels facteurs de risque de la cybersexualité.
À l’heure actuelle, il n’existe toujours pas de consensus sur la définition des critères diagnostiques de l’addiction sexuelle et cybersexuelle par manque de données venant valider les critères observés jusqu’à présent. La prévalence des troubles est donc extrêmement variable d’une étude à l’autre (3 à 97 %). En revanche le ratio hommes-femmes est plus constant (3 à 5 hommes pour une femme).
L’addiction cybersexuelle se caractérise par la répétition du comportement, la perte de contrôle, un désir de vouloir arrêter sans pour autant y parvenir et la présence de conséquences négatives aussi bien pour l’individu que pour ces proches. L’addiction cybersexuelle semble se développer en raison des effets plaisants qu’elle procure (excitation et gratification sexuelles) et comme fonction d’autorégulation, notamment pour la gestion du stress.
Une enquête en ligne a été réalisée à Louvain dans le but de mieux connaître la population masculine se livrant à cette activité. 579 hommes âgés de plus de 18 ans consommant ou non la cybersexualité ont répondu (moyenne d’âge 30 ans). 90 % disent avoir pratiqué la cybersexualité lors des trois derniers mois. Parmi eux, un tiers déclare que leur consommation a été incontrôlée à un moment où un autre de leur vie.
Trois types de consommateurs
« Au sein de l’échantillon, détaille Aline Wéry, on peut mettre en évidence trois types de consommateurs de cybersexualité : des hommes qui ne semblent pas montrer de problème par rapport à leur consommation (81 %) ; des hommes qui semblent présenter un comportement à risques, voire problématique (9 %) et des hommes qui présentent un comportement dit pathologique (10 %). Ces résultats sont néanmoins à analyser avec prudence ».
Dans cette enquête, les auteurs ont relevé que plusieurs activités sont corrélées à l’importance de l’addiction mesurée par le score Internet Addiction consacré à la sexualité, en particulier l’utilisation de la pornographie. Plus les hommes sont accros, plus ils éprouvent un sentiment de honte. Plus leur consommation de cybersexualité se prolonge, plus ils consultent des sites qui auparavant ne les intéressaient pas, qu’ils trouvaient dégoûtants. Pour s’exciter, ils doivent visionner des contenus de plus en plus extrêmes. Ce serait l’autorégulation de leurs émotions qui les amènerait à consommer de la cybersexualité de manière excessive. Enfin, plus leur score d’addiction est élevé, plus les hommes rapportent des difficultés érectiles et moins de satisfaction sexuelle. Reste à savoir si la dysfonction érectile est la cause ou la conséquence de la cybersexualité. Certains hommes se trouvent probablement prisonniers dans un cercle dont ils ne peuvent pas s’extraire.
Communication de Mme Aline Wéry, psychologue, sexologue, université catholique de Louvain.
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