• Dr Agnès Giannotti, présidente de MG France
« Perdre 10 000 médecins nous pend au nez »
Il n’y a rien de plus incompréhensible comme mesure. Quand un député veut afficher qu’il fait quelque chose, ça aboutit au contraire du but recherché. Nous sommes dans une période de pénurie ; si on dissuade les médecins de s’installer, ils iront ailleurs. Perdre 10 000 médecins nous pend au nez. Nous n’aurons ainsi plus personne pour gérer la cohérence et la qualité des soins. Le conventionnement sélectif va avantager les médecins en zone non déficitaire. Mais comment les calcule-t-on ? Dans le 13e arrondissement de Paris, il y a beaucoup de médecins, pourquoi ? Parce que c’est le siège de SOS Médecins ! À La Rochelle, compte-t-on les 10 000 habitants de l’hiver ou les 100 000 de l’été ? Notre souci, c’est l’accès aux soins et les bonnes conditions d’exercice. Nous ne pouvons être que vent debout contre toute coercition !
• Dr Franck Devulder, président de la CSMF
« C’est par la confiance et les mesures incitatives que nous y arriverons »
Libéral dans l’âme, je suis farouchement opposé à la coercition. C’est par la confiance et les mesures incitatives que nous y arriverons. Je saisis le caractère électoraliste des députés : les électeurs se plaignent de ne pas avoir de généralistes et de spécialistes… mais aujourd’hui, nous manquons de médecins partout ! Le problème, c’est qu’imposer une régulation aux médecins ne répond pas à l’enjeu. Le risque, c’est de les voir rejoindre des centres de soins non programmés, où ils adapteront leur exercice… et ne seront donc plus médecins traitants. Quand je regarde le gouvernement : François Braun et Agnès Firmin Le Bodo sont contre. Le conseiller santé d’Élisabeth Borne également. Éric Chenut, président de la Mutualité, a aussi exprimé son désaccord avec l’idée d’amplifier la coercition. Mettons le paquet sur la coordination !
• Dr Corinne Le Sauder, présidente de la FMF
« Il n’y a jamais trop de médecins, surtout en ce moment »
Nous sommes opposés à la coercition, laquelle n’a jamais marché. Où sont les zones surdotées ? Il n’y a jamais trop de médecins, surtout en ce moment. Puis, si l’on place un médecin généraliste seul dans un désert médical, comment va-t-il faire sans spécialiste ? Même quand on les paye, les médecins ne vont pas dans les déserts ! Il faut que les étudiants réalisent plus de stages en libéral pour connaître l’exercice. Il n’y a qu’en cabinet que la médecine générale s’apprend ! Il faut rendre le métier attractif et moins compliqué avec l’administratif.
• Dr Jérôme Marty, président de l’UFML-S
« Où sont les propositions pour renforcer l’attractivité ? »
Le législateur va soutenir que l’installation doit être conditionnée au départ d’un médecin, qui ne pourra qu’être remplacé. Ce qui laisse la porte ouverte à la régulation de la liberté d’installation, qui casserait la médecine. Où sont les propositions pour renforcer l’attractivité ? C’est encore une fois une mesure d’urgence et pas une proposition de fond. La réalité des faits, c’est que globalement, tous les Français rencontrent des difficultés d’accès aux soins. Il n’y a pas de zone surdotée en France. Même chez moi, à Fronton (Haute-Garonne), où, historiquement, la santé est le deuxième employeur local et où nous avons des cabinets, les patients ne trouvent parfois pas de rendez-vous avec des spécialistes avant six mois ! Il nous manque une planification avec des objectifs quinquennaux.
• Dr Philippe Vermesch, président du SML
« Ça reste la solution de la facilité »
Je dis aux députés : faites-le et vous verrez… vous serez responsables ! Mais ça reste la solution de la facilité pour pouvoir dire à la population : « vous voyez, je l’ai fait ! » Aujourd’hui, si on dit à des jeunes médecins « vous irez dans une zone sous-dotée où il n’y a rien, le PMU vient de fermer, etc. », ils iront dans des centres de santé en tant que salariés ! Mais on sait qu’un médecin en libéral équivaut à 2,2 salariés… Autre problème : dans un cabinet de cardiologie, par exemple, où trois médecins travaillent et sont saturés, ils ne pourront pas en prendre un quatrième, qui pourtant pourrait absorber la demande ! On va limiter l’expansion de cabinets qui fonctionnent très bien. Nous proposons aux jeunes médecins un contrat gagnant-gagnant avec l’Assurance maladie. Trois ans dans un désert médical, puis la garantie d’un secteur 2 à la sortie.
• Dr Élise Fraih, présidente de ReAGJIR
« Les politiques ne peuvent pas se passer de la voix des médecins »
Ces nombreuses lois coercitives portées par des députés nous inquiètent. Nous avons conscience qu’il y a urgence mais ces lois ne serviraient à rien : elles ne feront qu’écarter les étudiants de la médecine générale et susciter une vague de déconventionnement. Ce n’est pas ainsi que nous allons résoudre le problème démographique. Nous sommes 90 000 généralistes libéraux, il en faut 200 000 ! Nous avons des propositions : décharger les généralistes en leur enlevant les certificats inutiles, comme pour le sport à l’école ou la crèche ; laisser moins d’administratif pour favoriser l’interprofessionnalité ; donner davantage de poids aux territoires eux-mêmes, en associant tous les acteurs… Bref, les outils sont là ! Les politiques ne peuvent pas se passer de la voix des médecins, principaux concernés !
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