Le généraliste doit-il redouter les futurs parcours de soins ?
Yann Bourgueil : La réforme en cours porte principalement sur l’accès du patient aux soins de deuxième ou de troisième recours. Il s’agit de redéfinir, en fonction des pathologies, le niveau des soins, et à quel moment y recourir. Pour le médecin traitant, l’enjeu est de s’impliquer dans l’organisation des soins et de savoir comment s’y déroulera l'orientation du malade. Les études montrent aujourd’hui un défaut d’organisation du second recours qui complique la circulation du patient. Par exemple, pour le cancer du sein, l'un des objectifs pour les généralistes est d’avoir un accès rapide à des explorations, des avis... à des tarifs supportables pour les personnes.
Selon moi, l’omnipraticien n’a pas de crainte à avoir, la réorganisation des deuxième et troisième recours peut même rendre plus efficace et puissant le système du médecin traitant. Le plan santé cherche aussi à renforcer le soin de proximité. Une fois opérés, les patients reviendront en ville.
Ces parcours présentent-ils un intérêt de pertinence économique ou médicale ?
Y. B. : C’est toute la question. L’idée générale est qu’aujourd’hui, avec les ressources considérables engagées dans le système de santé, on peut faire mieux avec ce que l’on a. Je ne pense pas que l’objectif soit de réduire les dépenses. Il s'agit plutôt d'organiser le système pour assumer la croissance de la demande, l’évolution des patients et les contraintes économiques tout en offrant une meilleure qualité des soins. Ce qui ne se traduit pas par des économies à court terme. Grâce à un financement différent, avec la tarification aux forfaits par pathologie, on veut encourager des pratiques plus pertinentes.
La liberté de choix du praticien par le patient est-elle menacée par ces parcours ?
Y. B. : Aujourd’hui, tout le monde peut choisir son généraliste mais derrière, quelle est la liberté du patient quand il est adressé par son médecin traitant à un spécialiste ? Que sait-il de l’organisation dans laquelle on l’a intégré ? À partir du moment où l’on souhaite mieux structurer les parcours, la question de la liberté peut se poser : puis-je avoir un deuxième avis, rentrer dans une autre filière ? Avec ces nouveaux parcours, il faudra être beaucoup plus explicite sur le circuit que l’on propose et pouvoir en mesurer la qualité.
*Directeur de recherche à l'Irdes (Institut de recherche et documentation en économie de la Santé)
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Yann Bourgueil* : « La réorganisation des 2e et 3e recours peut renforcer le médecin traitant »
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