Après la publication de l'enquête édifiante dénonçant la banalisation du sexisme et du harcèlement sexuel au cours du cursus, l'Intersyndicale nationale des internes (ISNI) a avancé une dizaine de mesures concrètes pour lutter contre ces agissements coupables, lors de son Université de rentrée qui s'est tenue samedi 18 novembre à Montpellier. Le syndicat des internes réclame au gouvernement « un plan d'action complet pour en finir avec le sexisme et le harcèlement dans les études médicales ».
Les internes proposent en premier lieu d'organiser une campagne nationale de sensibilisation au harcèlement sexuel au travail avec un volet spécifique aux hôpitaux. « Le rôle de la médecine du travail dans l'établissement doit être de plus en plus important », insiste Alizée Porto, qui a piloté l'enquête sur le sexisme dans les études.
Une aide pour porter plainte
L'ISNI recommande ensuite de créer un « outil informatique anonyme » de signalement – application ou numéro de téléphone unique d'appel – permettant aux victimes et témoins de déclarer des faits de harcèlement. « Très peu de victimes portent plainte pour harcèlement sexuel », rappelle Alizée Porto. L'enquête révèle qu'une procédure judiciaire a été initiée dans 0,15 % des cas seulement.
La structure jeune désire également que les victimes soient accompagnées « gratuitement pour augmenter les procédures judiciaires ». « Nous allons effectuer un travail avec la Fédération hospitalière de France (FHF) afin de mettre à disposition les services juridiques d'établissements hospitaliers en continu », dévoile Alizée Porto.
Autre proposition : un espace physique d'échange « de lutte contre le sexisme » (dans chaque établissement ou université) pour décider et promouvoir les actions à mener contre les discriminations.
Veille nationale
C'est surtout la libération systématique de la parole que l'ISNi encourage. Il faut « briser le tabou », « ne faut plus accepter la moindre remarque ou blague sexiste », commente Alizée Porto. Le syndicat souhaite que de nouvelles enquêtes nationales ou locales soient conduites pour objectiver ces faits. « Il faudra créer un registre et une veille nationale à ce sujet », poursuit-elle.
Les futurs médecins souhaitent aussi lancer une campagne de sensibilisation auprès du personnel soignant et des usagers « en plaçant de grandes affiches dans les établissements disant "stop au sexisme" », explique la jeune femme, ajoutant que le CH de Thuir dans les Pyrénées-Orientales le fait déjà.
Selon l'ISNI, il est également impératif d'accompagner la maternité et la paternité des médecins en formation sans « qu'il y ait d'influence sur la carrière professionnelle », ce qui suppose aussi de remplacer « systématiquement tout départ en congé maternité à compétence égale ».
L'hôpital à part ?
Les jeunes appellent de leurs vœux une réflexion sur la normalisation de l'accès aux postes hospitalo-universitaires et à responsabilité. L'enquête montre que 60 % des hommes – contre 45 % des femmes – se sont vu proposer un poste de chef de clinique. « Pourquoi ne pas faire des candidatures anonymes pour certains postes ? », lance le syndicat.
L'ISNI ajoute que des enseignements sur le sexisme et les autres formes de discrimination doivent être instaurés tout au long de la scolarité. « On ne nous en parle pas », déplore Alizée Porto. « C'est davantage qu'une omerta, c'est une banalisation, a précisé une interne dans la salle. On dit tout le temps "l'hôpital est à part", maintenant on se rend compte que ces comportements ne sont pas normaux. Il faut nous former »,
Ces propositions ont été adressées à l'Élysée, Matignon et aux ministres compétents. C'est désormais le nouveau bureau de l'ISNI qui devra poursuivre le combat. Jean-Baptiste Bonnet, interne en endocrinologie à Montpellier, a été élu président de l'ISNI le 19 novembre, lors de l'assemblée générale de la structure jeune. Il succède à Olivier le Pennetier. Marie-Coline Rubio, interne en psychiatrie à Paris, a hérité du poste de vice-présidente en charge de l’égalité femmes/hommes et succède à Alizée Porto.
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